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      La chanteuse Pomme témoigne du harcèlement dans la musique

      Le HuffPost · news.movim.eu / HuffingtonPost · Thursday, 11 February, 2021 - 19:51 · 2 minutes

    La chanteuse Pomme le 14 février 2020 lors des 35e Victoires de la musique  (Photo by Alain JOCARD / AFP)

    MUSIQUE - “Quelque part entre la colère, le repos, la révolte et le lâcher prise”. Dans une lettre ouverte publiée ce jeudi 11 février sur la plateforme blogs de Mediapart, la chanteuse Pomme , 24 ans, nommée aux 36e Victoires de la musique,  décrit son “arrivée dans l’industrie de la musique” comme “traumatisante”.

    Après les mouvements de libérations de la parole qui ont été incarnés ces derniers semaines par le Metoo Gay et le Metoo Inceste , la jeune femme s’inscrit dans le sillage du MusiqueMetoo et évoque les abus dont elle a victime à ses débuts. “De mes 15 à mes 17 ans, j’ai été manipulée, harcelée moralement et sexuellement, sans en avoir conscience à cette époque évidemment. J’ai été l’objet de quelqu’un, façonnée selon ses fantasmes et déviances psychologiques”, écrit tout d’abord Pomme en évoquant tour à tour un ”’un système d’oppression dangereux”, une “cage”.

    La chanteuse raconte aussi le peu de choix qu’elle a eu sur le plan artistique, mais aussi dans sa vie privée et sur son apparence, la façon dont elle a été sexualisée, rabaissée, par un “adulte de 30 ans” quand elle avait 16. Des micro-agressions, du sexisme, des faits de harcèlements qui ont perduré au-delà de ces deux années et qui lui ont fait perdre confiance en elle.

    Tout en expliquant qu’il lui a fallu du temps pour prendre conscience de ce qu’il s’était passé et “y attribuer les mots justes”, Pomme estime aujourd’hui que son récit fait écho à celui de milliers de personnes et rappelle que “cet été, @MusicToo a recueilli plus de 300 témoignages de harcèlement, agressions et viols , réalisés dans 98% des cas par des hommes sur des femmes”.

    “Il y a donc un grand nombre d’hommes qui évoluent dans cette industrie en étant des harceleurs, des agresseurs, des violeurs. Un nombre que personne ne peut imaginer”, dit-elle avant de s’adresser à tous ceux qui entretiennent ce système et l’adoubent: “vous les applaudissez en concert (avant la pandémie). Vous les acclamez. Vous consommez leur musique (...) vous les produisez, vous les abreuvez, vous les comptez parmi vos amis”.

    La jeune femme évoque ensuite les difficultés à porter plainte, le cheminement de la guérison qui peut parfois être long, mais dit aussi ne plus vouloir laisser régner la peur. ”Ça suffit. C’est assez. Parlons-nous. Avec douceur ou avec hargne. Pour que la vérité et la justice se fassent entendre. Pour que les corps, les cœurs, les âmes de nos filles, de nos sœurs, de nos mères, ne soient plus piétinées”, ajoute-t-elle à la fin de son texte.

    À voir également sur Le HuffPost: Sur TikTok, elle met en musique des messages d’utilisateurs Tinder

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      Démission de Frédéric Mion: Delphy, sociologue féministe salue "une victoire"

      Hortense de Montalivet · news.movim.eu / HuffingtonPost · Thursday, 11 February, 2021 - 19:03 · 6 minutes

    À la suite de la démission de Frédéric Mion, Le HuffPost s

    POLITIQUE - Dans une lettre adressée aux enseignants et aux étudiants, mardi 9 février, le directeur de Sciences Po, Frédéric Mion , a annoncé sa démission, après un rapport rappelant sa connaissance des faits concernant l’affaire Duhamel.

    Même si l’ex-président de l’instance rappelle que ce document “confirme qu’aucun système de silence concerté ou de complaisance n’a existé au sein de l’établissement”, la pression, sur fond du mouvement #Sciencesporcs qui dénonce les violences sexuelles au sein des IEP, l’a poussé à quitter son prestigieux poste.

    Doit-on y voir que de #MeToo au livre de Camille Kouchner, l’omerta autour du des violences sexuelles se brise enfin et qu’une révolution est en marche au sein des institutions? Le HuffPost s’est entretenu avec la co-fondatrice du MLF et sociologue du féminisme, Christine Delphy . Avec le recul de sa cinquantaine d’années de militantisme, elle nous livre son ressenti face à tous ces hashtags émergents.

    Depuis 2017, #MeToo a fait des petits: #MetooInceste , #MetooGay et maintenant #Scienceporcs. Mais comme toute avancée citoyenne et féministe face au cuirassé du patriarcat, le retour de bâton, ce fameux “backlash”, n’est jamais loin. Et “une accentuation des horreurs” que certains hommes commettent peut être ”à prévoir”, prévient-elle.

    Le HuffPost : Comment analysez-vous la démission de Frédéric Mion, l’ex-directeur de Science po?

    Christine Delphy : Même si cette démission n’a pas été demandée par les féministes ouvertement, c’est une bonne chose. C’est une victoire même. Il était au courant des faits. Il l’a admis. Avant il ne voulait pas l’être et maintenant il n’a plus le choix. Il y a une complaisance des hommes, c’est certain. Quand on sait qu’il y a 1% des viols qui font l’objet d’une poursuite en justice, on se dit que c’est ridicule. Quand il s’agit inceste, c’est encore pire. C’est le grand rideau noir. Cette démission, c’est le début de la fin de cette complaisance.

    Comment analysez-vous le mouvement #sciencesporcs?

    Ce n’est pas une révolution, mais ça fait partie d’une évolution qu’on peut dater même d’avant #MeToo. On peut la dater depuis l’”épisode” de Dominique Strauss-Kahn (en 2011, NDLR), si l’on peut dire. C’est une réaction contre le fait que des hommes commettent des choses horribles, mais tout le monde pose un couvercle dessus. Sous ces hashtags, il y a une génération qui en a marre. Ce sont nos filles à nous. Mon époque n’a pas pu tout faire en même temps. Ce que font ces filles, c’est très bien. Il n’y a aucune raison de laisser ces crimes impunis, de laisser cet intime atroce au placard.

    Sous ces hashtags, il y a une génération qui en a marre. Ce sont nos filles à nous. Christine Delphy au HuffPost, le 11 février 2021.

    Pensez-vous que les universités françaises en font assez pour la prévention des violences sexistes et sexuelles?

    Ah, mais elles ne font rien du tout! Pourquoi? Il faudrait leur demander... Les filles, particulièrement, sont encore considérées comme des matières que l’on peut utiliser de n’importe quelle façon. Sciences Po a fermé les yeux et les oreilles. Mais ça ne concerne pas uniquement les universités, il s’agit de toute l’éducation nationale. Dans l’éducation nationale, il n’y a aucune protection des enfants qu’elle a sous sa coupe. Aucune. D’abord, il y a une crainte d’aller se plaindre, et quand on le fait c’est balayé sous le tapis…

    Vous qui avez co-fondé le MLF, est-ce que la période qu’on est en train de vivre ressemble par certains aspects à la période que vous avez vécue?

    On était moins en nombre, ça, c’est sûr. Maintenant il y a une multiplication des groupes féministes. Avec une spécialisation, comme le groupe NousToutes par exemple. Certains groupes féministes se spécialisent dans la lutte contre les crimes sexuels. Il y a tellement de choses horribles dans le patriarcat, qu’on est obligé de se concentrer sur une chose.

    Nous à l’époque, on n’avait pas les forces pour ça. Avec cette expansion des mouvements qui existent aujourd’hui, il va y avoir de plus en plus de sujets qui vont pouvoir être combattus en même temps.

    Au moment du MLF, on était moins en nombre! Aujourd'hui, avec la multiplication des groupes féministes, plus de sujets vont pouvoir être combattus en même temps. Christine Delphy au HuffPost, le 11 février 2021.

    Il y a toujours un “backlash” ou retour en arrière après les mouvements féministes. Est-ce que vous percevez déjà des conséquences de ce type aujourd’hui?

    Je ne suis pas une voyante. Je ne sais pas quelle forme prendra le “backlash”. Ce ne sera d’ailleurs pas forcément un “backlash” au sens autoritaire du terme. Ça peut être tout simplement une accentuation des horreurs que certains hommes commettent. Avec ce qui est demandé dans le porno, par exemple, et qu’on ne pouvait pas imaginer il y a 20 ans. On le voit également dans les attitudes agressives de très jeunes garçons qui y sont exposés de plus en plus tôt...

    Et de façon générale, quand on voit l’entourage du président de la République, on est en droit de s’inquiéter. Dupond-Moretti et Darmanin, quelle paire! C’est incroyable que ce soit Dupond-Moretti, l’avocat de l’affaire d’Outreau [il avait défendu Roselyne Godard, une des treize adultes acquittées, ndlr ] qui s’empare désormais des sujets du viol et de l’inceste.

    Que voulez-vous dire?

    Dans les déclarations qu’il fait sur le sujet par exemple, il parle tout de suite de prudence. Mais ça ne fait pas cinquante ans, ça ne fait pas cent ans, ça fait mille ans que les agresseurs se gargarisent de ces précautions pour continuer d’agir tranquillement… Quand j’entends notre ministre de la Justice dire ça aujourd’hui, je trouve ça incroyable.

    On a encore en France, une vision des plus arriérées sur cette question des viols et encore plus des viols sur mineurs. On a encore des hommes au Barreau qui s’arrangent pour museler les victimes. Et il y a toujours des tas d’explications, des tas de débats...Il y a encore des gens qui sont là à se demander si cet enfant n’avait quand même pas vraiment envie de se faire sodomiser par cet adulte...Tant que les victimes seront toujours déconsidérées, ces mouvements féministes et de lutte contre les violences sexuelles vont continuer.

    À voir également sur Le HuffPost: “Le sceau de l’infamie”: Geneviève Garrigos raconte les violences que l’inceste laisse derrière lui