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      Loi climat : changer de civilisation pour plaire aux écolos

      Frédéric Mas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 12 February, 2021 - 09:24 · 4 minutes

    civilisation

    Par Frédéric Mas.

    « Il s’agit de changer de civilisation, de culture et de mode de vie » , la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili l’a affirmé ce mercredi à l’issue du Conseil des ministres. La loi climat, issue de la fameuse Convention citoyenne , doit tout changer.

    Changer de civilisation, c’est mettre un terme à une civilisation industrielle dont le bilan écologique n’est plus soutenable aux yeux de la nomenklatura politique française. Ainsi c’est à l’aune de cette nouvelle idéologie que le projet d’ajouter un quatrième terminal à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle a été ajourné.

    « Le gouvernement a demandé [à Groupe] ADP d’abandonner son projet et de lui en présenter un nouveau, plus cohérent avec ses objectifs de lutte contre le changement climatique et de protection de l’environnement » a ainsi déclaré Barbara Pompili au journal Le Monde .

    En juin dernier, la filière aéronautique moribonde acceptait l’aide de l’État à la condition de prioriser l’avion « vert » ou « décarboné » sur tous ses autres projets industriels ou technologiques.

    Plus généralement, le plan de relance proposé par le gouvernement investit massivement dans l’écologie pour « aider » un pays qu’il a lui-même participé à appauvrir par son hyper-règlementation et ses mesures politico-sanitaires erratiques.

    C’est aussi fermer Fessenheim , et prier pour que les énergies renouvelables fonctionnent suffisamment bien, y compris quand l’hiver est rude, pour que tout le monde en bénéficie. Ou alors renoncer à ce progrès pour le bien commun planétaire.

    Le nouvel ordre écologique

    Le changement de civilisation, c’est aligner l’ensemble de l’ordre social sur le nouvel agenda écologique du gouvernement, qui, soyons en sûr, nous fera dégringoler dans tous les classements mondiaux en termes de compétitivité économique. C’est ce qui s’est passé pour le secteur automobile national, déclassé au profit de ses concurrents étrangers, et c’est ce qui se passera pour tous les secteurs ou la politique écolo se substituera aux règles du marché.

    Pour beaucoup de défenseurs médiatiques de la Convention citoyenne pour le climat, tout cela ne va pas assez loin. Emmanuel Macron a trahi ses promesses en ne reprenant pas à la lettre les recommandations du comité, tonne-t-on à la gauche de la gauche.

    On retient les piques du président contre cette gauche écolo qui veut revenir à la « lampe à huile » et dont l’horizon anti-technologique se confond avec celui des Amish. On voit derrière les réticences à mettre en place un programme intellectuellement réactionnaire et pratiquement infaisable la mainmise de Big business, ou pire, de l’infiltration des idées « libertariennes » au sommet de l’Etat (sic) .

    Pourtant Emmanuel Macron tient à verdir sa politique, parce que l’écologie lui permet de « gauchir » un peu son image de centriste autoritaire. L’élection présidentielle se rapproche, et le chef de l’exécutif tient à afficher des « marqueurs de gauche » pour séduire les métropoles progressistes. Peu importe si cet électoralisme se fait au prix des libertés individuelles et au profit du capitalisme de connivence.

    Et si Barbara Pompili était sérieuse quand elle parle de changer de civilisation ? Est-ce vraiment à la classe de technocrates et de politiques de diriger le changement et l’innovation dans un pays libre ? Cette prétention intellectuelle, qui repose sur une vision erronée de ses propres capacités à comprendre la complexité du monde social, c’est celle du préjugé rationaliste dont parlait Friedrich Hayek .

    L’illusion rationaliste

    Plus fondamentalement, veut-on, et peut-on vraiment changer de civilisation sur demande ? Là encore, la réflexion de Hayek est éclairante. Dans la Constitution de la liberté (1960), l’économiste rappelle que la civilisation n’est pas la création délibérée de l’homme.

    Si elle est le produit de ses actions, ou plutôt des actions de centaines de générations, elle n’est pas le produit de l’intention d’un homme ou d’un groupe d’hommes. Croire que la civilisation est un projet délibéré est une erreur « intellectualiste » qui ne permet pas d’en comprendre le fonctionnement, et donc d’en diriger l’évolution. L’ensemble d’institutions, de pratiques sociales, de coutumes et d’habitudes forme une sorte de « cerveau collectif », pour reprendre l’expression de Matt Ridley.

    Elle organise la communication et la transmission de la connaissance aux individus. C’est par la transmission institutionnelle de cet ensemble, dont les éléments se sont combinés par sélection et par accident, qu’est née la liberté individuelle.

    Prétendre « changer de civilisation » revient donc à la fois à commettre une erreur intellectuelle rétrograde et à mettre en danger l’écosystème institutionnel et moral de la liberté. Espérons, pour une fois, que l’inefficacité de l’Etat bureaucratique freine ici l’ambition de ses élites.

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      Détruisons l’environnement pour le protéger

      h16 · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 20 January, 2021 - 08:30 · 5 minutes

    Par h16.

    On apprenait il y a quelques jours que manger de la galette des rois pouvait mettre en péril la planète en plus de déstabiliser le mix énergétique français subtilement équilibré entre les énergies moralement honteuses et les belles énergies renouvelables. Aujourd’hui, découvrons comment bousiller l’environnement pour bien le protéger.

    Et pour cela, si on relançait la production d’une voiture mythique, la 4L ?

    Ce n’est pas moi qui lance cette idée, mais bien le constructeur automobile Renault qui semble ouvert au principe de construire une nouvelle mouture de la voiture sortie au début des années 1960 : rien de tel qu’un véhicule vieux de 60 ans pour bien dynamiser le marché automobile en France.

    Ah pardon, on me fait comprendre qu’il s’agit d’une nouvelle version, entièrement électrique, de ce véhicule mythique que la marque au losange avait réussi à écouler à plus de huit millions d’exemplaires. Dans cette version du XXIe siècle, il s’agirait donc de coller un moteur électrique à la place du thermique, de moderniser un peu différents aspects, par exemple avec une meilleure qualité des aciers et du châssis dont la version d’antan avait tendance à rouiller, et de vendre tout ça pour un prix modique en attendant l’avalanche de taxes et subventions compensatoires que la République du Cerfa Frétillant ne manquera pas d’infliger.

    On ne s’étonnera pas que le constructeur puise ainsi dans un catalogue vieux de 60 ans pour tenter de trouver une recette à un succès de plus en plus lointain : Renault rejoint ici un autre constructeur français, Citroën, qui, lui aussi, pense que son pot de yaourt écrasé Ami électrique va rencontrer un franc succès.

    Au passage, ces deux constructeurs représentent bien l’élite française pour laquelle l’idée d’appliquer de vieilles recettes d’un autre siècle est devenue la dernière mode du moment : il n’est qu’à voir les propositions du gouvernement (quel que soit le domaine) pour comprendre que le curseur des têtes pensantes du pays est resté bizarrement coincé au milieu des Trente Glorieuses sans que rien ne puisse l’en déloger, même pas l’âpre réalité de terrain et les résultats jusqu’à présent mitigés (pour le dire pudiquement) qu’ils ont obtenus en s’entêtant dans les voies choisies.

    Mais baste, passons et ne boudons pas notre plaisir à imaginer des milliers, que dis-je, des millions de petits véhicules électriques aux couleurs acides tournicoter dans nos centres urbains et utiliser les dernières avancées de l’intelligence artificielle pour assister le conducteur dans son évitement systématique des dos d’âne et des cassis placés par les équipes municipales endiablées, les cycloroutes à bandes multiples et brochettes d’andouilles en lycra, des piétons et autres zozos à trottinettes motorisées qui déboulent de tous les côtés sur des avenues jonchées de détritus divers que les mairies écolos semblent affectionner.

    Difficile de ne pas s’écrier « miam ! » à l’évocation vivifiante de ces voiturettes de golf glorifiées parcourant nos centres urbains sans émettre le moindre prout de dioxyde de carbone !

    Parce que voyez-vous, ces voitures étant électriques, elles ne pollueront pas lors de leur usage. Elles pollueront atrocement lors de la fabrication et de la destruction de leurs batteries, mais on s’en fiche, ce n’est pas le sujet, ahem n’est-ce pas. Et puis pour sauver l’environnement des bobos urbains, il faut bien massacrer un petit peu l’environnement des pays en voie de développement dont proviennent les matériaux de ces batteries, que voulez-vous…

    Quant à la source d’énergie, il va de soi que ce ne sera pas du nucléaire, qui pollue méchamment, ou du gaz, qui pollue violemment, ou du charbon, qui pollue salement, mais bien de l’éolien ou du solaire qui eux ne polluent pas du tout jamais jamais circulez (en voiture électrique), il n’y a rien à voir.

    Et ça tombe bien : à mesure que se développent les voiturettes de golf glorifiées solutions douces de mobilité urbaine , on voit se multiplier les projets de production d’électricité propre, comme les fermes éoliennes et les champs de panneaux photovoltaïques.

    Propre veut dire « qui ne bousille pas l’environnement ». Et pour ne pas bousiller l’environnement, quoi de mieux que motoculter vigoureusement 10 kilomètres carrés de forêt , d’aplatir tout ça pour la modique somme d’ un milliard d’euros et d’y planter une vaste quantité de panneaux solaires aux terres rares ?

    Non, ne vous inquiétez pas : pour Horizéo, ce projet au nom tout droit issu d’un brainstorming des années 1990, tout a été largement calculé et prévu. Ainsi, la production permettra d’alimenter les habitants de l’Aquitaine, même si cette région n’en a aucun besoin ; elle exporte actuellement 25 % de sa production. Dès lors, rien de tel qu’annihiler une vaste superficie de forêt pour y planter des panneaux qui ne produiront que quelques heures par jour une électricité surnuméraire venant s’ajouter à ce surplus !

    Pour compenser, Horizéo envisage de produire de l’hydrogène avec cette électricité dont on se demande ce qu’on va bien foutre tant que les hordes de voiturettes de golf n’ont pas envahi nos villes. Hydrogène qui viendra alimenter les voitures équipées d’un moteur idoine, qui n’ont pas – ce n’est vraiment pas de chance – envahi nos villes, ni actuellement ni plus tard, la rentabilité de cette forme de stockage étant encore très théorique.

    Comme on le voit, tout se goupille à merveille en République du Verdoiement Intense : une élite au taquet nous concocte des petits véhicules rigolos aux performances anémiques et au design des sixties pour parcourir des villes de plus en plus impraticables, pendant que la production d’électricité qui les alimentera est consciencieusement sabotée à coups de projets éoliens ou photovoltaïques babylonesques dont l’impact environnemental absolument catastrophique ne sera même pas compensé par les gains microscopiques en termes de pollution que ces savonnettes à piles permettront d’envisager.

    C’est absolument prodigieux, et c’est majoritairement grâce à vos impôts. Il y a vraiment de quoi se réjouir, non ?


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      Le retour de la folie hydrogène

      Michel Gay · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Wednesday, 20 January, 2021 - 03:50 · 6 minutes

    Par Michel Gay.

    Puisque la folie de l’hydrogène (H2) revient à la mode avec le plan de relance du gouvernement de septembre 2020 lui accordant 7 milliards d’euros d’ici 2030, voici quelques rappels qui risquent de refroidir les ardeurs.

    Une civilisation hydrogène ?

    Depuis cette annonce, les chasseurs de subventions se lèchent les babines devant ce pactole qu’il s’agit maintenant de s’accaparer au mieux avec des études et des projets pompes-à-fric plus mirifiques les uns que les autres pour faire croire que la France se dirige vers une future « civilisation hydrogène ».

    À l’horizon 2035, le Réseau de transport d’électricité (RTE) envisagerait de remplacer par de l’H2 vert une partie seulement de l’H2 industriel (environ 40 %) déjà produit et utilisé dans la chimie. Celui-ci est aujourd’hui obtenu à partir du gaz naturel méthane par la technique du vaporeformage pour le raffinage du pétrole et la fabrication d’engrais principalement.

    Son usage éventuel comme énergie dans la mobilité pour succéder au pétrole et au gaz n’est pas prévu avant 2050 au mieux.

    Certes, pour le service rendu en termes d’autonomie (supérieure à 600 km) et de rapidité de ravitaillement (quelques minutes), le gaz hydrogène (H2) dit vert  pourrait être le meilleur moyen écologique d’électrifier les transports via une pile à combustible (PAC).

    L’hydrogène est une énergie qui apparaît merveilleuse et futuriste pour succéder aux carburants fossiles (pétrole, gaz, charbon) dans la mobilité et le chauffage depuis… plus d’un siècle !

    En effet, l’hydrogène vert est extrait de l’eau (H2O) avec de l’électricité. En pratique, 11 litres d’eau (ou 11 kg) sont nécessaires pour produire 1 kg d’hydrogène qui permet de parcourir environ 100 km avec une PAC dans une voiture moyenne. L’eau ne manque pas en Europe, et l’électricité verte peut être produite grâce au vent et au soleil intermittents ainsi qu’à l’uranium , tous disponibles pour des millénaires.

    Après avoir brûlé le gaz hydrogène pour se chauffer, ou l’avoir retransformé en électricité dans une PAC, il se recombine avec l’oxygène de l’air pour redonner… de l’eau. Extraordinaire !

    Quoi de plus simple, de plus propre et de plus écologique ?

    Ce serait donc une énergie non polluante disponible en quantité inépuisable.

    Pourquoi ne pas y avoir pensé plus tôt ?

    D’où vient l’hydrogène ?

    L’hydrogène n’est pas une source d’énergie disponible à l’état naturel sur Terre, sauf sous forme diffuse et inexploitable .

    Pour des raisons de coûts, ce gaz est aujourd’hui extrait industriellement du pétrole, du charbon, et surtout du gaz naturel (méthane) qu’il est censé remplacer.

    Bien entendu, le gaz hydrogène n’est un vecteur d’énergie formidable que s’il est extrait… de l’eau !

    Pour produire l’hydrogène vert nécessaire chaque année pour succéder, même partiellement, au pétrole et au gaz dans les transports, la seule solution viable actuellement parmi de nombreux procédés, est selon RTE l’électrolyse de l’eau qui nécessite de produire en amont une électricité décarbonée, abondante, et bon marché.

    Mais ce procédé entraîne une perte de 50 % d’énergie pour obtenir de l’hydrogène à 700 fois la pression atmosphérique (700 bars), et jusqu’à 60 % pour obtenir de l’hydrogène liquide (à moins 253°C), à partir de l’électricité initiale.

    Puis une nouvelle perte de 50 % intervient pour transformer l’H2 en électricité dans une PAC.

    Le rendement global de la production d’électricité initiale jusqu’à l’énergie mécanique fournie « aux roues » en y incluant les pertes diverses (transports, stockages,…) est donc inférieur à 25 % (il y a plus de 75 % de pertes).

    Pour 100 kWh d’électricité produite, le « système hydrogène » en restitue moins de 25 kWh.

    Le coût de l’électricité à la sortie d’une PAC est donc au minimum quatre fois plus élevé que le prix de l’électricité à l’entrée. Sans compter l’amortissement du coût important des électrolyseurs et de la PAC qui peut doubler le prix de vente alors que, dans les mêmes conditions, le « système batterie » en restitue 75 kWh.

    Pour remplacer l’importation annuelle des 50 millions de tonnes de pétrole pour la mobilité en France par de l’hydrogène vert obtenu par électrolyse, il sera nécessaire de produire 600 térawattheures (TWh) d’électricité, en plus des 500 TWh produits annuellement aujourd’hui sur le territoire national, dont 400 TWh par le parc nucléaire.

    Il faudrait donc au minimum doubler le parc nucléaire qui est la seule source d’énergie capable de fournir massivement l’électricité nécessaire à cette électrolyse si le pétrole, le gaz et le charbon font défaut.

    Dans les véhicules ?

    L’hydrogène liquide a été abandonné pour les voitures particulières après diverses tentatives car il est difficile à conserver à moins 253°C (fuites importantes par bouillonnement permanent dans un contenant isolant et volumineux).

    Pour parcourir plus de 600 km en véhicule, le meilleur compromis aujourd’hui est le réservoir d’hydrogène comprimé à 700 bars, associé à une PAC et une petite batterie tampon d’une quinzaine de kilowattheures (kWh), comme dans la Nexo de Hyundai par exemple, dont le prix de vente est d’environ 70 000 euros. Un tel réservoir occupe un volume de 35 litres et pèse 18 kg par kg d’hydrogène contenu.

    Pour la mobilité, un kg d’hydrogène équivaut à environ 7,5 litres d’essence en énergie mécanique aux roues.

    En effet, le rendement de l’énergie mécanique fournie aux roues par l’hydrogène, depuis le réservoir via une PAC, est deux fois supérieur (environ 50 %) à celui de l’essence dans un moteur à explosion (environ 25 %).

    Donc, un kg d’hydrogène contenant 33 kWh « chaleur » fournit la même quantité d’énergie mécanique aux roues (17 kWh) pour mouvoir le véhicule via l’électricité produite par la PAC que 7,5 litres d’essence contenant 68 kWh « chaleur » via le moteur à explosion.

    Il en résulte que le réservoir d’une voiture contenant 10 kg d’hydrogène (permettant de parcourir environ 800 km avec une consommation de 1,2 kg d’hydrogène par 100 km ) représente un volume de 350 litres et pèse 180 kg. Il est donc près de six fois plus gros que le réservoir d’essence (350 litres au lieu de 60 litres) et trois fois plus lourd (180 kg au lieu de 60 kg).

    Mais d’autres inconvénients sont plus ennuyeux, voire rédhibitoires.

    L’hydrogène est difficile à utiliser, coûteux et dangereux

    L’usage du gaz hydrogène en tant qu’énergie est quasiment inexistant au niveau mondial (1 % pour les fusées) car il est difficile à manier, conditionner, transporter, stocker…

    Il est aussi coûteux à exploiter et son pouvoir explosif élevé le rend très dangereux .

    L’économie hydrogène vert en tant que vecteur énergétique ne délivre à l’utilisateur final que 10 à 25 % de l’énergie initialement produite. Il faudra vraiment avoir un besoin impératif d’hydrogène décarboné pour gaspiller autant d’énergie et donc d’argent pour se déplacer et se chauffer.

    Dans ces conditions, en dehors d’opérations publicitaires ciblées et de projets expérimentaux parfois bidons subventionnés par les contribuables, l’hydrogène ne succèdera ni au pétrole ni au gaz naturel (méthane) tant que ces derniers seront disponibles, c’est-à-dire pendant encore un siècle au moins.

    La France s’engagera-t-elle dans cette impasse énergétique et cette gabegie financière ?

    En tant qu’énergie pour succéder aux énergies fossiles, et malgré son aspect séduisant, le gaz hydrogène vert issu de l’électricité renouvelable et nucléaire est une folle solution d’avenir qui le restera longtemps si les Français et les Européens ne veulent pas se ruiner.

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      Affaire du siècle : la baudruche écolo se dégonfle

      Philippe Charlez · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Tuesday, 19 January, 2021 - 03:40 · 7 minutes

    affaire du siècle

    Par Philippe Charlez.

    Historique et revendications

    Le 17 décembre 2018, en pleine crise des Gilets jaunes , quatre ONG environnementalistes (Notre Affaire à Tous, la Fondation pour la Nature et l’Homme, Greenpeace France et Oxfam France) envoient une missive au gouvernement. Elles y accusent l’État d’être défaillant en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

    Pour appuyer leur démarche, les quatre ONG lancent une pétition en ligne le 18 décembre 2018. En 36 heures le nombre de signataires atteint le million puis deux millions en un peu plus de trois semaines.

    Bien que la comptabilisation des signataires organisée par Greenpeace ait pu faire l’objet d’interrogations, cette action qui prend le nom d’ Affaire du siècle est alors portée devant le tribunal administratif de Paris.

    Le recours demande aux autorités judiciaires de condamner l’État pour ses « manquements en matière de baisse de ses émissions de gaz à effet de serre et de lutte contre le changement climatique » . La première audience de ce procès emblématique a eu lieu devant le tribunal administratif de Paris ce jeudi 14 janvier 2021. Une mise en accusation vague et générale qu’il convient d’abord de détailler et d’analyser.

    Selon l’Affaire du Siècle, « la France ne respecte pas ses objectifs de court terme que ce soit en matière de réduction de gaz en effet de serre, de développement des énergies renouvelables et de l’amélioration de l’efficacité énergétique » .

    Reprenant les conclusions du dernier rapport du GIEC, ces « non-respects » auraient des conséquences significatives sur le réchauffement planétaire : changement de la composition de l’atmosphère, acidification des océans, fonte des glaces, hausse du niveau des mers, perte de biodiversité, dégradation de la qualité de l’air, exposition de la population à des phénomènes météorologiques extrêmes (vagues de chaleur, précipitations extrêmes, ouragans). Plus la liste est longue plus l’émotion est forte !

    Au titre de la Constitution française ( protection des citoyens vis-à-vis des risques environnementaux ), mais aussi de ses participations et engagements dans des instances internationales (convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, convention-cadre des Nations Unies, Accords de Paris) la France serait donc pénalement responsable des conséquences de ses non-respects.

    Situation de la France aujourd’hui en termes de GES

    Selon l’Affaire du Siècle, depuis le premier Grenelle de l’environnement et au fil des plans pluriannuels sur l’énergie et des lois sur la transition énergétique, la France s’est ainsi engagée à :

    • réduire ses émissions globales par rapport à 2005 de 14 % à horizon 2020 et de 37 % à horizon 2030,
    • porter la part des énergies renouvelables à 23 % de sa consommation d’énergie finale en 2020
    • réduire sa consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à la référence 2012, en visant un objectif intermédiaire de 20 % en 2030

    Depuis 2005, les émissions de la France se sont réduites de 24 % passant de 390 MtC02 à 299 MtC02 en 2019. L’Hexagone a donc largement dépassé les objectifs qu’elle s’était fixés.

    Par contre, l’objectif renouvelable est loin d’être atteint puisqu’en 2019, sa part (incluant l’hydroélectricité) dans l’énergie finale n’était que de 11 %. Impossible dans ces conditions d’atteindre les 23 % annoncés pour 2020. Enfin, en ce qui concerne l’énergie finale, elle a été réduite de 7 % entre 2012 et 2019.

    L’analyse de l’Affaire du siècle est contestable. L’accroissement largement insuffisant de la part des renouvelables et la réduction insuffisante de la consommation n’interviennent que comme « outil de réduction » ; ils ne sont en rien des critères pertinents pour juger si la France respecte ou pas ses engagements climatiques.

    Seule la réduction des émissions de GES représente le « juge de paix » du réchauffement climatique. Et sur ce point la France a largement rempli ses engagements. Quant aux objectifs post-2020 même si certains ne seront à coup sûr pas atteints, un tribunal ne peut pas préjuger l’Etat sur ses visions prospectives.

    Nous critiquons quand même au passage la naïveté des agendas inversés systématiques des gouvernements se donnant des objectifs irréalistes à long terme sans se poser de questions sur les moyens techniques et économiques pour y arriver, ni sur les conséquences sociétales que ces agendas pourraient engendrer.

    Ainsi, peut-on démontrer facilement qu’une réduction de la consommation finale de 50 % à l’horizon 2050 deviendrait incompatible avec une croissance économique même faible.

    L’Affaire du Siècle se garde bien de signaler dans sa missive que grâce à sa génération électrique nucléaire , la France est parmi les meilleurs élèves du monde en termes d’intensité énergétique (1 kWh/euros) et champion d’Europe toutes catégories en termes d’émissions par habitant (4,5 tCO2/hab). Et que finalement ses émissions sont inférieures à 1 % des émissions mondiales. Rendre la France responsable de tous les maux climatiques est aussi injuste que stupide.

    La mémoire courte

    Avant d’attaquer le gouvernement, certains leaders de l’Affaire du Siècle auraient dû commencer par s’autoflageller. Nous pensons à Nicolas Hulot dont la fondation est l’un des quatre signataires.

    Quatre mois avent le déclenchement de l’Affaire, l’ancien journaliste vedette était toujours ministre de la Transition écologique et solidaire. Il avait démissionné sans préavis le 28 août 2018 invoquant « l’accumulation de frustrations, de défaites, d’arbitrages qui se sont faits systématiquement au profit des lobbies du vieux monde au détriment de l’environnement et de la santé ».

    Une démission sonnant comme un électrochoc environnemental, un message subliminal à la planète verte et à l’écologie militante. La réalité était évidemment toute autre.

    Bien au-delà des « lobbies fantômes » la démission de Nicolas Hulot n’est que le résultat de l’impitoyable réalité des chiffres que les politiciens détestent dans la mesure où ils leur donnent rarement raison.

    Son rétropédalage sur le nucléaire de novembre 2017 fut pour le ministre en herbe le début d’un long chemin de croix au cours duquel la réalité des faits l’a chaque jour emporté sur ses convictions, irréalistes au moins dans leur timing.

    Et que dire de Cécile Duflot , aujourd’hui présidente d’ Oxfam France et signataire d’un document attaquant l’État pour sa carence en termes de rénovations énergétiques de l’habitat. Elle a probablement oublié qu’elle fût ministre de l’Égalité des territoires et du logement dans les gouvernements Ayrault I et II de mai 2012 à mars 2014.

    On perçoit donc derrière l’Affaire beaucoup de frustrations et de ressentiments politiques, des frustrations qui ne feront malheureusement pas… baisser nos émissions de gaz à effet de serre.

    Un climat instrumentalisé

    Derrière l’Affaire se cache surtout une stratégie qui vise à démanteler notre société de croissance et son démon capitaliste que les écologistes détestent au plus haut point.

    Cette nouvelle forme de lutte des classes qui s’appelle le marxisme écologique mélange de façon sournoise requêtes énergétiques, pétitions sociétales et tentations décroissantistes.

    Ainsi, les « demandes politiques » de l’Affaire partent du constat que « notre modèle économique actuel n’est pas viable et génère pollutions, maladies, inégalités et injustices » .

    Elle mélange les genres en réclamant à la fois « le développement massif des énergies renouvelables » considérant que « le nucléaire reste le principal frein aux économies d’énergie et au développement des énergies renouvelables » mais aussi « une fiscalité socialement juste au service de la lutte contre le changement climatique » et « la fin des cadeaux aux grandes entreprises » .

    Le réchauffement climatique ne serait que le fait de quelques riches privilégiés et de quelques lobbies industriels égoïstes qu’il suffirait de détruire pour résoudre le problème. Pour arriver à cette conclusion naïve, les ONG ont aussi la fâcheuse tendance d’interpréter les chiffres à leur avantage.

    Ainsi OXFAM France affirme que les 10 % les plus riches de la planète sont responsables d’environ la moitié des émissions mondiales de CO₂ alors que dans la réalité, les pays de l’OCDE en émettent 35 % contre 65 % pour les pays émergents.

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      Éolien : le vent n’est pas et ne sera jamais rentable

      Michel Negynas · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Monday, 18 January, 2021 - 03:30 · 5 minutes

    renouvelables

    Par Michel Negynas.

    Au départ, il y a plus de vingt ans, est née une fausse bonne idée : le vent est gratuit, et l’exploiter est le moyen le plus vertueux de produire de l’énergie.

    Cela fait partie des rêves écologistes, sympathiques au départ, avec un brin de poésie… mais qui tournent au vinaigre en face des réalités. C’est une situation assez courante, et la réponse de l’ écologisme politique est en général de se perdre dans la dissonance cognitive, c’est-à-dire de compenser par une fuite en avant idéologique ce que lui révèlent les données factuelles.

    Les subventions et les avantages initiaux donnés à la filière ne sont pas, en eux-mêmes, choquants. En effet, pour atteindre des coûts et des performances pérennes, toute activité a besoin d’expérience et d’effet d’échelle… Mais jusqu’à un certain point.

    Ainsi, en France, mais c’est vrai pour les autres pays occidentaux, dans un marché qu’on voudrait libéralisé, l’éolien bénéficie encore des avantages suivants :

    L’obligation d’achat

    C’est l’avantage le plus décisif et le plus étranger à un marché qui se voudrait libéral. Quel que soit le besoin, dès que les éoliennes produisent, le réseau doit acheter cette électricité. Cela oblige les autres producteurs à freiner leurs livraisons, et donc augmente leurs coûts au kWh, puisque leurs frais fixes sont moins couverts. Ceci est particulièrement défavorable au nucléaire, dont les frais fixes sont prépondérants par rapport aux coûts variables du combustible.

    Pire, dans certains contrats, si on oblige les opérateurs à arrêter leurs éoliennes (par exemple si, en été, le vent donne plus que les besoins), les opérateurs reçoivent une contrepartie égale à ce qu’ils produiraient à puissance maximale au prix qui leur est garanti. Ces opérateurs gagnent ainsi plus d’argent à ne pas produire qu’à produire.

    Les surcoûts

    Engendrés par l’intermittence et les caractéristiques technologiques ils sont supportés par le réseau. Comme montré dans un précédent article, ces coûts sont énormes. Par exemple, pour l’ offshore , le raccordement peut représenter 25 % de l’investissement total .

    Les prix d’achat

    Ils ont été longtemps fixés indépendamment de toute référence de marché. Ils sont maintenant soumis au marché, mais avec une compensation entre un prix garanti et le prix spot. Cela aurait pu paraître plus raisonnable, sauf que plus les prix spots sont bas, plus cela coûte à la collectivité. Et on verra que les prix spots seront de plus en plus souvent très bas.

    Les régulateurs

    Sous la pression des opérateurs, ils relâchent les règles sanitaires, sociales et environnementales d’autorisation des installations. Il est en théorie plus simple d’ériger cinq éoliennes de 250 m de haut que de construire un hangar de stockage d’électroménager. Seules les actions juridiques des opposants freinent l’hystérie des autorités et les actions marketing des opérateurs, lesquels sont souvent à la limite de l’éthiquement correct.

    La réalité crève les yeux

    Mais une activité qui a encore besoin d’être soutenue artificiellement après plus de vingt ans, et alors que les coûts sont arrivés à maturité, cela pose évidemment des questions embarassantes. D’autant plus que l’Allemagne nous fournit gracieusement une expérience en vraie grandeur de ce que nous prévoyons, nous aussi, de réaliser. Elle a construit 72 GW d’éolien. Voilà ce que cela donne sur la semaine du 11 au 17 janvier. Tout est en ligne sur le site Energy charts de Fraunhofer :

    L’apport du vent a varié en quelques jours de 40 GW à 4 GW ! Et où est le stockage, maintes fois promis, pour compenser l’intermittence ? Il n’existe pas, et ne sera jamais, et de loin, à hauteur des enjeux .

    Alors, qu’est ce que ça donne sur les prix de marchés (en bourse, pas les prix subventionnés). Eh bien le site de Fraunhofer publie une courbe pour l’année 2020 absolument parlante qu’il convient d’analyser.

    Sur cette courbe, on constate plusieurs éléments factuels :

    • Le réseau de points est bien plus dense entre 0 et 20GW, cela reflète bien que même quand elles tournent, les éoliennes sont généralement loin de leur puissance nominale.
    • Des écarts énormes de prix, de plus 200 euros à moins de 75 euros. Même si ces évènements sont rares, ils dénotent quand même un marché qui dysfonctionne.
    • Une remarquable anticorrélation linéaire entre prix de marché et puissance délivrée par l’éolien ; sans vent on est à 40 euros, un prix probablement très influencé par les prix de cession (imposés) du nucléaire. À environ 60 GW de vent, on est à zéro.

    Cette courbe reflète un raisonnement tellement bête que nos gouvernements successifs ne semblent pas l’avoir compris ; l’ENA prépare à de puissantes circonvolutions sémantiques, pas à des constatations factuelles.

    En effet, à partir d’une certaine pénétration de l’éolien dans le mix, soit il n’y a pas de vent, le prix de marché est élevé car la denrée produite est rare. Mais les éoliennes n’ont rien à vendre. Soit il y a pléthore, et la valeur du produit chute drastiquement car tous veulent vendre. Cela est du à une caractéristique essentielle et constamment occultée de l’électricité : à chaque seconde, la production doit égaler la consommation en tous points du réseau. Or, contrairement au discours des opérateurs d’ENR, généralement, la situation venteuse est la même sur une grande partie de l’Europe, y compris en mer. Il y a très souvent pénurie, ou, a contrario , surproduction. Et plus d’interconnexion ne changera rien.

    Conclusion

    Par nature l’éolien ne peut être rentable dans un marché vraiment libéralisé. Il ne le sera jamais. Il ne produit que lorsque les prix sont inférieurs à ses seuils de rentabilité. Et cela ira de pire en pire : actuellement, l’Allemagne a encore la possibilité d’exporter ses surplus sur ses voisins. Qu’en sera-t-il lorsque ceux-ci en seront au même point qu’elle ?