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    Présidentielle 2022: Philippe Juvin veut "un accord politique avec Xavier Bertrand"

    news.movim.eu / HuffingtonPost · Thursday, 26 August, 2021 - 16:44 · 7 minutes

Le docteur Philippe Juvin, chef des urgences à l

POLITIQUE - À huit mois de la présidentielle, la droite est plus morcelée que jamais. Entre ceux qui sont candidats à une primaire (Valérie Pécresse, Éric Ciotti depuis ce jeudi 26 août, sans doute Michel Barnier ce soir sur TF1), Xavier Bertrand qui ne souhaite pas s’y associer et ceux qui entretiennent encore le suspense comme Laurent Wauquiez ou Bruno Retailleau, les électeurs ont de quoi être perdus.

Philippe Juvin, chef des urgences à l’hôpital Georges Pompidou à Paris et maire LR de La Garenne-Colombes fait partie de la première catégorie. Dans cette primaire, si elle a lieu (réponse le 25 septembre au plus tard), il entend faire entendre une autre voix et compte sur son parcours de médecin, atypique en politique et utile en temps de pandémie . Fait rare de ce côté de l’échiquier, il se veut le candidat “des services publics”, sans toutefois augmenter le nombre de fonctionnaires, et plaide pour des dons de vaccins aux pays d’Afrique de toute urgence.

Politiquement, Philippe Juvin propose à Xavier Bertrand un “accord politique” qui s’appuierait sur les sondages du mois de janvier 2022 pour départager le président des Hauts-de-France et le vainqueur de la primaire. Entretien.

Eric Ciotti vient de se déclarer candidat à la primaire. Comment recevez-vous cette candidature ?

C’est une très bonne nouvelle. Il a une expertise sur les questions de sécurité, ce qui permettra au débat de prendre de l’ampleur.

Y aura-t-il une primaire chez LR ?

Je ne suis pas devin, mais si nous voulons être au second tour de la présidentielle, puisqu’aucun candidat ne se détache naturellement, la logique voudrait qu’il y en ait une. La primaire permet aussi de mettre des idées nouvelles sur la table, c’est l’une des raisons de ma candidature.

Vous voulez être “le candidat des services publics”, ce n’est pas fréquent à droite…

La droite s’est caricaturée sur les services publics. Dans un esprit de “père Fouettard”, elle proposait 500.000 fonctionnaires en moins en 2017. Quant à la gauche, elle créait des postes sans se soucier de leur efficacité. J’ai vu les services publics paupérisés pendant la crise, des gens qui n’ont pas pu être soignés, sans parler de la sécurité ou de l’école . Il y a une autre épidémie dont personne ne parle, c’est celle de l’ignorance. Il y a un décrochage intellectuel du pays. Le niveau scolaire s’effondre et notre pays a raté des évolutions scientifiques pour faire face à cette épidémie. Où est notre vaccin?

Il faudra investir dans les infrastructures vétustes de notre pays. 10% des ponts posent des problèmes de sécurité et une gare sur deux est délabrée.

Combien de postes de fonctionnaires proposez-vous en plus ?

Il s’agit plus de redéploiement que de créations de postes. En mettant fin à la bureaucratie, aux doublons, j’estime que l’on peut redéployer 300.000 fonctionnaires directement au contact des Français. En tant que médecin, je passe 30% de mon temps à chercher des lits pour les malades, quand je préférerais être à leur chevet. Les Français verront la différence. Il faudra aussi investir dans les infrastructures vétustes de notre pays. 10% des ponts posent des problèmes de sécurité et une gare sur deux est délabrée.

Pourriez-vous soutenir Xavier Bertrand qui ne souhaite pas participer à la primaire?

Je veux un accord politique avec Xavier Bertrand. Il ne va pas à la primaire, c’est son choix, il faut le respecter. Mais nous ne pouvons pas avoir deux candidats au premier tour. Si je gagne la primaire, je passerai un accord politique avec lui. En janvier, s’il est devant dans les sondages, on le soutient; s’il est derrière, c’est lui qui nous soutient.

Jean Castex a annoncé ce matin une 3e dose de vaccin pour les plus de 65 ans, à commencer par les résidents des Ehpad le 12 septembre. Est-ce une bonne idée?

À terme, il est probable que tout le monde ait besoin d’une troisième dose, même les plus jeunes, car, avec le temps, l’efficacité du vaccin diminue. La question, c’est quand? Sans doute immédiatement pour les plus de 80 ans. Mais plus on attendra pour les autres, plus on pourra vacciner l’Afrique. Avec moins de 2% de vaccinés, l’Afrique va fabriquer des variants, ce qui va entretenir la pandémie. L’excédent de doses achetées par les pays occidentaux suffit à vacciner l’Afrique. Il faut s’en préoccuper, car il ne sert à rien d’être dans un îlot de vaccinés.

Jean-Luc Mélenchon dit que l’utilité d’une 3e dose n’est pas prouvée . Quel est votre avis?

Il aurait mieux fait de dire “ce n’est pas prouvé pour tout de suite”. Pour moi, à 57 ans, il a raison, c’est inutile aujourd’hui. Je vais perdre l’efficacité de mes deux doses dans les semaines ou mois qui arrivent, je ne sais pas encore quand. Dans quelques mois, ce sera probablement indispensable. Mais d’ici là, vaccinons l’Afrique.

Comme d’habitude, ils vont se réveiller en catastrophe pour faire des recommandations sur les purificateurs d'air à l'école et ce sera trop tard.

La rentrée approche, Jean-Michel Blanquer encourage les collectivités locales d’installer des purificateurs d’air à l’école. L’avez-vous fait dans votre commune?

Il a raison: les écoles maternelles et élémentaires sont sous la responsabilité des communes. J’équipe la totalité de mes écoles en analyseurs de CO2: on a passé les commandes avant l’été, elle en auront toutes à la rentrée. La question-clé - et c’est là où ils ne sont pas sérieux - c’est que je demande depuis des semaines à l’Education nationale de la documentation sur d’autres appareils: les purificateurs d’air. Je reçois beaucoup de propositions de vendeurs mais c’est au ministre de m’expliquer quels appareils acheter. Les maires sont abandonnés. Comme d’habitude, ils vont se réveiller en catastrophe et ce sera trop tard. Il faudra passer les appels d’offres et les vendeurs seront en rupture de stock.

Jean-Michel Blanquer nous dit qu’il y a une nouveauté à l’école: les autotests. Ce qui est incroyable c’est qu’il le découvre maintenant. L’Angleterre le fait depuis février et je le demande depuis un moment. Ils sont sûrement tous intelligents au gouvernement, mais il leur manque une chose: ils n’ont jamais été maires .

Emmanuel Macron estime que la crise sanitaire va durer jusqu’en 2022. Pensez-vous la même chose?

Oui, bien sûr. Tant que le monde entier n’est pas vacciné, on peut avoir un nouveau variant. L’Afrique sera peut-être vaccinée en 2022. Ça nous emmène en 2023. Oui, nous en avons pour longtemps.

Peut-on faire campagne pendant une pandémie?

Il y a eu des campagnes pendant la guerre, des élections dans d’autres pays. Il faut que la démocratie fonctionne. On va s’adapter, comme on a adapté notre vie sociale. La lutte contre l’épidémie ne doit pas être arrêtée, p as plus que la vie politique et démocratique.

Valenciennes, Biarritz, la Corse… Vous vous êtes beaucoup déplacé cet été. Dans quel état est le pays à huit mois de la présidentielle?

Le sentiment que j’ai est celui d’une immense inquiétude sur la capacité des responsables politiques à faire autre chose que du commentaire. Beaucoup d’élus commentent l’actualité, comme le ferait un sociologue ou un journaliste. Ce n’est pas ce qu’on attend d’eux. Je vois aussi le scepticisme envers les politiques en raison de l’homogénéité des parcours. C’est une autre raison de ma candidature: un parcours différent des autres et une méthode nouvelle.

Le duel Macron-Le Pen peut-il être déjoué?

Depuis 1981, les élections ont été remportées par quelqu’un qui n’était quasiment jamais donné gagnant en septembre...

À voir également sur Le HuffPost : À peine réélu, Bertrand a plus parlé ”à la France” qu’aux “Hauts-de-France”

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    Macron en Irak à la rencontre de "la diversité irakienne", sur les ruines de Daech

    news.movim.eu / HuffingtonPost · Thursday, 26 August, 2021 - 15:15 · 3 minutes

La mosquée Al-Nouri, reprise aux mains de Daech en 2017. Le président Macron se rendra sur le chantier de sa reconstruction.

INTERNATIONAL - C’est un long déplacement qui va durer tout le week-end. Emmanuel Macron se rend en Irak ce vendredi 27 août au soir pour deux jours à la rencontre de toutes les composantes de la société irakienne, quasiment un an, jour pour jour, après son dernier déplacement du 2 septembre 2020.

“Le Président de la République accorde beaucoup d’importance à l’Irak, État pivot et charnière, notamment concernant la stabilité du Moyen-Orient ”, expliquait l’Élysée, quelques jours avant son départ. Tout au long de sa visite, le président aura à cœur de “marquer l’attachement de la France au renforcement de la lutte contre le terrorisme, au développement économique du pays et à sa stabilisation”.

Échanges avec des influenceurs de Mossoul

Après des entretiens samedi 28 août au matin à Bagdad avec le président irakien, Barham Salih, et le Premier ministre Moustafa al-Kazimi, le chef de l’État participera à une conférence avec plusieurs pays de la région, co-organisée avec l’Irak, sans la Syrie qui n’est pas invitée. “Il s’agira, pour l’ensemble des participants, de manifester leur soutien au rôle pivot de l’Irak et de contribuer à la baisse des tensions régionales en favorisant le dialogue”, précise l’Élysée.

Dimanche 29 août, le président se rend à Mossoul , au nord du pays, territoire anciennement détenu par le califat territorial de Daech . “L’objectif est d’échanger avec la population locale et d’apporter le soutien de la France aux opérations de stabilisation et de reconstruction de cet espace”, détaille le Palais. Emmanuel Macron rencontrera des étudiants et des influenceurs sur place qui “ont construit une partie de leur jeunesse sous Daech et qui construisent leur avenir”.

Déplacement “optimal” sur le plan de la sécurité du président

“Même si le califat territorial a été détruit, Daech et le terrorisme en général restent une menace”, rappelle l’Élysée qui promet un déplacement “optimal” sur le plan de la sécurité du président sur place. Emmanuel Macron ira sur les ruines de la mosquée sunnite Al-Nouri , là où l’“État islamique” avait été proclamé en 2014, un site symbolique de la lutte contre Daech, aujourd’hui en chantier après sa destruction.

Autre temps fort du déplacement, la rencontre avec les Kurdes qui ont lutté contre le califat et “des éléments français de l’armée qui mènent une lutte quotidienne contre Daech”, explique le Palais, sans en dire plus pour des raisons de défense nationale. “Ce combat se poursuit, il s’agit d’éviter une résurgence”, précise encore l’Élysée.

Rencontre de toutes les communautés religieuses

Le président français rendra visite à la famille d’Hujam Surchi, peshmerga emprisonné et exécuté par Daech à qui il rendra hommage. Emmanuel Macron rencontrera aussi Massoud Barzani, ancien président de la région autonome du Kurdistan et “symbole des combattants kurdes”. Il s’agira de démontrer “l’attachement de la France au Kurdistan, dans tous les domaines”.

L’essayiste Caroline Fourest, réalisatrice d’un film sur les combattantes kurdes “que le président a vu” sera dans la délégation officielle, ”à la demande du président de la République”. Il sera aussi accompagné de la co-lauréate du prix Nobel, Nadia Murad, torturée par Daech et issue de la communauté yézidie.

Le président prendra soin d’aller à la rencontre de “la diversité irakienne”, avec plusieurs étapes dans les communautés religieuses qui composent le pays. Samedi 28 août, il se rendra au sanctuaire chiite de Kadhinya,“lieu de prière et d’échanges”. Il rencontrera également des représentants des chrétiens d’Orient pour leur dire leur “attachement” et sera reçu à Notre-Dame de l’Heure, à Mossoul, lieu de culte catholique. Mgr Pacal Gollnisch, directeur général de l’oeuvre d’Orient qui soutient cette communauté fait partie de la délégation officielle.

La situation en Afghanistan sera évoquée par les différentes parties en présence, mais n’est pas “le point central” de la conférence régionale ni du déplacement du président.

À voir également sur Le HuffPost : En Irak, le pape célèbre une messe sur les ruines d’une église bombardée par l’EI

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    Avant la marche climat, militants et politiques écolos ragaillardis par l'imbroglio sur le référendum

    news.movim.eu / HuffingtonPost · Sunday, 9 May, 2021 - 10:33 · 5 minutes

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POLITIQUE - Ce n’était sans doute pas le meilleur jour pour faire fuiter une information, ou une hypothèse, comme celle-ci. Selon Le Journal du Dimanche , qui en fait sa Une, Emmanuel Macron aurait renoncé à organiser un référendum sur la protection du climat pour l’inscrire dans la Constitution.

Les conditions “ne sont pas réunies” estime le député LREM Pieyre-Alexandre Anglade dans les colonnes de l’hebdomadaire ce dimanche 9 mai, tandis que Le JDD cite plusieurs propos anonymes rattachés à des proches du président de la République allant également dans ce sens, tout en rejetant la faute sur le Sénat.

Depuis, l’Élysée dément et explique à l’AFP que cette éventualité “n’est en rien enterrée.” “La cause écologique demeure l’une des priorités du président de la République”, martèle d’ailleurs, au passage, le palais présidentiel... mais trop tard. Les défenseurs du climat, qui organisent des marches partout en France ce dimanche ont déjà saisi la balle au bond pour dénoncer ce qu’ils voient comme le nouveau renoncement du chef de l’État.

Du carburant pour la marche climat

Sur Twitter ou dans les médias, nombreux ont réagi. Regrettant “un nouvel engagement sur l’écologie renié par Emmanuel Macron et LREM, et sans doute l’un des plus importants”, le député écologiste Matthieu Orphelin juge, dans un communiqué, que “le gouvernement manoeuvre pour que le processus n’aille pas au bout.” Pour l’Insoumise Clémentine Autain, “la Start’up Nation enterre le climat et la démocratie d’un même mouvement”, quand, la sénatrice socialiste Marie-Pierre de la Gontrie accuse Emmanuel Macron de “duplicité”.

Côtés militants ou ONG, Clément Sénéchal, le porte-parole de Greenpeace en France, a lui aussi relayé la Une du Journal du Dimanche sur Twitter en estimant que la politique climatique du président de la République “n’est que mensonge et manœuvres politiciennes.”

Mêmes critiques, ou presque, pour le réalisateur écolo Cyril Dion, le promoteur et “garant” de la Convention citoyenne pour le climat. “Après avoir trahi sa parole de reprendre sans filtre les mesures de la CCC, Emmanuel Macron trahit sa parole d’organiser un référendum sur la Constitution”, fustige le militant, en rappelant que les défenseurs du climat se mobilisent ce dimanche à Paris et dans plus de 150 villes en France. Leur nouveau mot d’ordre semble ainsi tout trouvé.

Deux jours auparavant, les partis de gauche de LFI au PS en passant par EELV avaient déjà signé ensemble une tribune dans Libération pour appeler à participer à ces marches.

Comme les différentes ONG spécialistes de la défense de l’environnement, ils brocardent notamment la loi Climat adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, insuffisante à leurs yeux et en décalage complet avec la promesse faite par le président de la République aux citoyens de la Convention climat de reprendre “sans filtre” leurs propositions.

Un nouveau renoncement présidentiel?

Force est de constater que l’annulation du référendum pour modifier la Constitution serait une nouvelle difficulté pour le chef de l’État, qui s’était engagé sous les applaudissements des “150 citoyens” en décembre dernier. “Ce sera une réforme constitutionnelle en un article” qui “doit d’abord passer par l’Assemblée nationale puis le Sénat et être votée en des termes identiques. Ce jour-là, elle sera soumise à référendum”, avait-il précisé aux membres de la CCC en reprenant une de leurs idées .

Mais cinq mois plus tard, la macronie semble désormais tentée à l’idée de rejeter la faute sur la Haute assemblée. Le Sénat, contrôlé par la droite et qui doit examiner lundi 10 mai le texte déjà voté par l’Assemblée nationale, “a fait le choix de vider de sa substance la proposition de la convention citoyenne pour le climat, et donc d’empêcher l’accord”, accuse ainsi Pieyre-Alexandre Anglade, le porte-parole du groupe LREM à l’Assemblée, dans Le JDD .

Dans le détail, le projet de loi inspiré par la CCC grave à l’article 1er de la Loi fondamentale que la France “garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique”. Or la majorité du Sénat rejette le terme “garantit”, qui donnerait selon elle à la préservation de l’environnement une forme de priorité sur les autres principes constitutionnels.

De mauvais arguments pour Bruno Retailleau. “Avant même que le Sénat n’ait voté quoi que ce soit et que la discussion avec l’Assemblée nationale ne s’engage, Emmanuel Macron nous accuse de blocage pour justifier l’annulation d’un référendum dont il ne voulait pas”, fustige le patron des sénateurs LR, avant de siffler: “La manœuvre et l’hypocrisie sera la marque de cette dernière année de mandat.” Un imbroglio dominical qui aura donc réussi à fâcher les écolos et la droite sénatoriale.

A voir également sur le HuffPost: Sans filtre? Macron explique l’expression qui met les citoyens de la Convention en colère

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    Ce que Macron prévoit pour défendre les hôpitaux contre les cyberattaques

    news.movim.eu / Numerama · Thursday, 18 February, 2021 - 13:24

Après avoir discuté avec les dirigeants de deux hôpitaux victimes de cyberattaques, le président Emmanuel Macron a annoncé une série de mesures dédiées à la protection des établissements de santé. [Lire la suite]

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    "La République ne déboulonne pas de statues", disait Macron, mais c'est plus compliqué

    news.movim.eu / HuffingtonPost · Saturday, 13 February, 2021 - 02:48 · 12 minutes

POLITIQUE - La mémoire qui flanche. Emmanuel Macron était très attendu, le 14 juin 2020, au moment de s’adresser solennellement aux Français, pour la troisième fois de l’année. Attendu, bien sûr, sur le coronavirus au terme d’un printemps éprouvant sur le front sanitaire, mais également scruté quant à sa position sur un vif débat de société: quelle place accorder aux figures contestées de notre histoire et à celles encore dans l’oubli?

Quelques semaines avant sa prise de parole, des militants détruisaient deux statues de l’abolitionniste Victor Schoelcher en Martinique quand d’autres vandalisaient des représentations de Léon Gambetta ou du général de Gaulle en métropole. Ces questions se sont également portées sur l’image de Jean-Baptiste Colbert, ancien ministre de Louis XIV et rédacteur du “Code noir” , représenté par une immense statue devant l’Assemblée nationale.

Des débats éruptifs, initiés aux États-Unis par le mouvement #BlackLivesMatter, sur lesquels le président de la République était attendu, alors même que plusieurs manifestations, portées par Assa Traoré, réunissaient des dizaines de milliers de personnes en France pour rendre hommage à George Floyd, un Afro-américain tué par un policier blanc à Minneapolis.

Le Président a choisi de trancher: “la République n’effacera aucune trace ni aucun nom de son Histoire”. “La République ne déboulonnera pas de statue”. Nous devons plutôt lucidement regarder ensemble toute notre Histoire, toutes nos mémoires”, plaidait ainsi Emmanuel Macron depuis l’Élysée en ce 14 juin.

La France déboulonneuse

Une fin de non-recevoir répétée presque mot pour mot trois mois plus tard , le 4 septembre, à l’occasion du 150e anniversaire de la proclamation de la République lorsqu’il appelait à “épouser” la France “tout entière.” “Le Sacre de Reims et la Fête de la Fédération, c’est pour cela que la République ne déboulonne pas de statues, ne choisit pas simplement une part de son histoire, car on ne choisit jamais une part de France, on choisit la France”, martelait-il, en reprenant les mots de Marc Bloch, qui écrivait dans L’Étrange défaite : “qui n’a pas vibré au sacre de Reims et à la fête de la Fédération n’est pas vraiment Français”.

Mais les choses sont-elles aussi simples que les mots du président de la République? Les représentations ou allusions au Maréchal Pétain n’ont-elles pas disparu de l’espace public, à l’image d’autres représentations jugées problématiques avec le temps?

Contactés par Le HuffPost , plusieurs spécialistes de la mémoire s’accordent à dire que la France a bel et bien déboulonné et débaptisé par le passé, contrairement à ce que sous-entend le chef de l’État.

Cet article fait partie de notre dossier “La mémoire en mouvement”. Alors qu’Emmanuel Macron appelle à la création d’une liste de personnalités pour mieux représenter “la diversité de notre identité nationale”, Le HuffPost se plonge dans l’histoire de France et dans l’actualité pour interroger notre mémoire collective.

“L’histoire est la science du changement”, nous dit Sébastien Ledoux en citant, lui aussi March Bloch. “L’histoire est en mouvement, c’est une loi invariable. On observe des transformations de paysages symboliques, faites par les êtres humains, depuis la nuit des temps”, ajoute le chercheur à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, spécialiste de la mémoire, qualifiant la position du chef de l’État “d’anti-historienne.”

C’est surprenant comme déclaration parce que la République, les républiques ont toutes été fondées sur le fait de reforger (...) les incarnations de la Nation qui les ont précédées Sarah Gensburger, chercheuse au CNRS en science politique

“C’est un peu surprenant comme déclaration”, enchérit Sarah Gensburger, “parce que la République, les républiques ont toutes été fondées sur le fait de reforger, de transformer, de modifier les incarnations de la Nation qui les ont précédées.”. “C’est intrinsèque à la République, c’est presque dans sa nature que de faire évoluer ces incarnations”, martèle la chercheuse en science politique au CNRS. Il suffit par exemple de se pencher sur la Révolution française pour voir que nombreuses statues royales érigées à l’époque n’ont pas résisté. Et le chef de l’État ne l’ignore pas.

Alors comment expliquer ses mots répétés de l’Élysée au Panthéon? Pour Sébastien Ledoux, Emmanuel Macron se comporte surtout en défenseur du patrimoine et non de la mémoire vive collective. “On est dans une vision très patrimoniale qui consiste à faire du passé un instrument de conservation”, regrette-t-il en citant le philosophe Saint-Augustin qui parlait, au Ve siècle, de “la mémoire” comme “un présent du passé.”

“Si on suit cette définition-là, il s’agit d’une réinterprétation du passé à l’aune du présent, donc ce sont des relectures, des reconfigurations permanentes. La mémoire est vivante, or, la phrase d’Emmanuel Macron renvoie à l’idée de conserver les traces d’un passé en danger”, nous explique l’historien. Autrement dit, si Emmanuel Macron estime inconcevable de toucher à la statue de Colbert, ou si sa majorité refuse de renommer la salle qui porte son nom à l’Assemblée, c’est parce qu’ils considèrent que retirer ou questionner la figure de ce dernier est “contraire à l’intérêt national qui serait de le conserver comme un patrimoine.”

La République, ce n’est pas (que) lui

Reste que le chef de l’État n’est pas le seul maître à bord. Les décisions de retirer cette statue monumentale, comme de déboulonner telle ou telle figure érigée dans une commune du Périgord ou de renommer la rue d’une bourgade du Lot-et-Garonne, ne lui appartiennent pas totalement. Pour ne pas dire... pas du tout.

“Ce n’est pas au président de la République de dire qui doit être en statue et ce qui va se passer pour elle, c’est le plus souvent du ressort des pouvoirs territoriaux”, note Sarah Gensburger. ”‘La République’, comme Emmanuel Macron l’entendait est une sorte de concept incantatoire qui reste très fragile, car les choses ne se passent pas comme ça, il y a différents individus, collectifs, collectivités locales qui ont accès à ces prises de décision”, ajoute l’historien Sébastien Ledoux.

Le Président de la République fixe l’orientation, il est le dépositaire du legs de l’Histoire” L'Élysée

Ce sont, effectivement, les conseils municipaux, les collectivités territoriales ou les institutions publiques qui sont concrètement à la manœuvre. En septembre 2020, la mairie de Paris a par exemple décidé l’installation d’une statue à l’effigie de “Solitude” , une héroïne de la résistance des esclaves, dans le 17e arrondissement de la capitale. Trois mois auparavant, en juin, la ville de Bordeaux posait des plaques explicatives dans cinq rues, passages et places au nom de négriers reconnus.

En 2004, c’est le Conseil régional d’Île-de-France qui décidait de débaptiser le lycée Florent-Schmitt, situé à Saint-Cloud -du nom du compositeur français accusé de collaboration pendant la Seconde Guerre mondiale- pour lui donner celui, bien plus consensuel, du romancier Alexandre Dumas.

“Certes, ce n’est pas lui qui décide in fine , mais le Président de la République fixe l’orientation, il est le dépositaire du legs de l’Histoire”, répond l’Élysée, en résumant ainsi la ligne du chef de l’État: “Le Président de la République regarde l’Histoire en face. On enrichit, on contextualise s’il le faut ou on ajoute de nouvelles figures, mais on n’efface rien.”

“On ne peut pas effacer tout ce qui ne plaît pas dans l’histoire, sinon il ne resterait plus grand-chose”, abonde l’islamologue et historien Rachid Benzine, pour qui, l’enjeu est aujourd’hui “d’apaiser les débats.” Pour cela, il faut, à ses yeux “assumer son passé” en le “recontextualisant”, mais surtout développer un “récit national plus large et inclusif.”

C’est justement dans ce but, et avec ce rôle de boussole mémorielle qu’Emmanuel Macron a réclamé, le 4 décembre dernier, lors d’une interview au média en ligne Brut, une liste de “300 à 500 personnalités” , “figures de la diversité”, à proposer aux maires et autres élus locaux. L es noms de Cherif Cadi, le premier musulman admis à l’École polytechnique, de l’acteur italien Lino Ventura, de l’artiste américaine Joséphine Baker ou encore de la femme de lettres martiniquaise Paulette Nardal, selon les premières pistes dévoilées dans la presse, pourraient ainsi trouver place dans nos rues, si les élus locaux le décident. Selon La Croix , c’est finalement une liste de 315 figures oubliées depuis la Révolution française qui a été rendue au gouvernement au cours de cette semaine.

“De la communication avant tout”, tranche Sarah Gensburger, en ajoutant avec ironie: “ce document est présenté comme une ‘ressource’ à disposition, mais heureusement que les collectivités territoriales savent faire.” ”À la mairie de Paris, ça fait des années qu’ils réfléchissent à de nouveaux noms de rue ou de nouvelles statues pour changer l’espace public, pour l’adapter, le faire évoluer, mais ils ne le revendiquent pas forcément de façon visible. C’est dossier par dossier”, note-t-elle.

On aurait pu imaginer une réflexion des habitants à l’échelle des communes. La République, c’est la chose commune, c’est le bien collectif et c’est donc aux citoyens de s’en emparer. Sébastien Ledoux, chercheur et historien spécialiste de la mémoire

Pour la chercheuse, auteure de À quoi servent les politiques de mémoire?, paru en 2017, l’initiative du président de la République s’apparente à une sorte de “négociation avec ce qu’il fait mine de croire que les militants anti-racistes attendent: on va leur en donner un peu, céder un peu sur ça...”.

Et elle n’est pas la seule à interroger cette façon de faire. Regrettant une liste établie ”à la va-vite”, Sébastien Ledoux n’est pas plus optimiste. Plutôt qu’un comité installé par le haut, l’historien plaide pour “un processus démocratique qui engage les citoyens”. “On aurait pu imaginer une réflexion des habitants à l’échelle des communes par exemple”, avance-t-il, en ajoutant, en référence aux mots d’Emmanuel Macron: “la République, c’est la chose commune, c’est le bien collectif et c’est donc aux citoyens de s’en emparer.”

Une recommandation “d’ouverture” partagée par Nicolas Offenstadt, l’historien “favorable à des arènes hybrides où les spécialistes et les profanes discutent.” “Il ne faut pas reléguer ces questions avec les ‘vandales’ d’un côté, les conservateurs de l’autre. Je pense qu’il faut un débat dans la sphère publique. C’est une question citoyenne”, expliquait déjà ce spécialiste de la mémoire collective en juin dernier au HuffPost.

Une promesse non tenue (à ce stade)

C’est pourtant ce qu’avait promis Emmanuel Macron chez Brut en décembre en lançant un appel à la “contribution collective” pour une liste “nourrie par la jeunesse” et “ceux qui ont une conscience civique.” Mais selon nos informations, aucun citoyen n’a, à ce stade, été convié à la réflexion menée par une équipe d’historiens, de sociologues et de personnalités coordonnée par Yvan Gastaut, sous la direction d’un comité scientifique présidé par le spécialiste de la colonisation et des immigrations Pascal Blanchard.

“Ce n’est pas une liste étatique”, précise immédiatement l’islamologue Rachid Benzine, un des membres de cette assemblée spécialement constituée. Pour lui, il s’agit “d’un fragment, d’un outil, loin d’avoir une valeur absolue, qui doit être complété avec d’autres.”

“Que le président de la République fasse ce geste, c’est symboliquement très fort mais il ne pourra y avoir d’effectivité que si un phénomène d’appropriation suit cette liste” Rachid Benzine, islamologue et romancier

“Que le président de la République fasse ce geste, c’est symboliquement très fort mais il ne pourra y avoir d’effectivité que si un phénomène d’appropriation et de réincarnation suit cette liste”, nous dit-il avant d’ajouter: “le vrai travail va commencer dans les municipalités qui le souhaitent, avec le concours des citoyens.”

D’autant que ces questions, latentes depuis des décennies dans la population, sont loin d’être nouvelles. “Ces doutes, ces incertitudes sur le récit national existent depuis la fin des années 1970. Depuis quarante ans, on est dans ce questionnement-là, dans ces remises en cause (...) et là on est en train d’en voir maintenant la dimension coloniale”, observe Sébastien Ledoux.

Alors comment expliquer cette virulente irruption dans le débat public au printemps dernier? Sarah Gensburger y voit la conjugaison de plusieurs facteurs. Le premier, la fin du confinement printanier, et le rapport à l’espace public. “On observe souvent des occupations de place après des moments d’attentats comme à Madrid, New York ou Paris. Ici on a eu un peu le même phénomène: une sorte de besoin collectif de réappropriation de l’espace public”, nous dit la chercheuse.

Une expression à laquelle s’ajoute des “enjeux de discriminations raciales exacerbées”, selon ses mots, accrédités par les différents travaux du Défenseur des droits au cours des dernières années. Ainsi, “la trace de ces inégalités dans l’espace public devient naturelle pour accrocher cette discussion”, poursuit-elle, précisant toutefois “que ce serait une erreur de l’y réduire.”

À voir également sur Le HuffPost : À Paris, les statues de femmes sont rares, mais en plus elles sont problématiques

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    La plateforme antidiscriminations promise par Macron est en ligne

    news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 12 February, 2021 - 11:13 · 2 minutes

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SOCIÉTÉ - Élisabeth Moreno, la ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’ égalité des chances , a annoncé sur Sud-Radio, la mise en ligne, ce vendredi 12 février, par la Défenseur des droits de la plateforme antidiscrimination.fr . Un dispositif annoncé par Emmanuel Macron en décembre dernier lors de son interview à Brut, “pour que les gens puissent dénoncer de manière très simple, unique et nationale” les discriminations.

Il s’agit d’un nouveau service de signalement et d’aide des victimes de discriminations, permettant d’accompagner gratuitement les victimes pour les rétablir dans leurs droits. La plateforme est également accessible par un numéro de téléphone à quatre chiffres, le 3928.

Concrètement, comment ça marche? “Il y aura cinq lignes téléphoniques. Des juristes du Défenseur des droits vont écouter les victimes, qualifier leur situation, a affirmé Claire Hédon au quotidien 20 minutes , si c’est dans notre champ de compétences, les services du Défenseur des droits vont instruire le dossier, voir les éléments de preuve et essayer de rétablir la victime dans ses droits, notamment par la voie de la médiation. La plateforme va aussi pouvoir orienter les personnes vers des institutions et des associations qui pourront les accompagner.”

“L’ascenseur (social) est rouillé”

Le plafond de verre reste une réalité pour les personnes issues des minorités (ainsi que pour les femmes). “L’ascenseur (social) est rouillé”, même si “certains arrivent encore à prendre l’escalier”, a estimé Élisabeth Moreno, interrogée sur la possibilité aujourd’hui pour un jeune de réaliser un parcours identique au sien, venue du Cap-Vert dans les années 70.

L’un des obstacles à cette ascension sociale reste la couleur de peau, comme l’avait souligné Emmanuel Macron , en écho à l’affaire de Michel Zecler “aujourd’hui, quand on a une couleur de peau qui n’est pas blanche, on est beaucoup plus contrôlé (…) On est identifié comme un facteur de problèmes et c’est insoutenable”. Ainsi, “toutes les formes de discrimination pourront faire l’objet d’un signalement”, a déclaré le gouvernement.

Aucun type de discrimination n’est laissé pour compte. La Défenseure des droits l’explique, “il faut, comme on le répète depuis des années, un index dans les entreprises sur la diversité, comme il y a un index sur l’égalité femmes-hommes, avec des éléments qui permettent de les évaluer. Mais il faut que ce soit un vrai index, avec de vrais moyens mis sur la table.”

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    Nouvel An lunaire: Emmanuel Macron évoque la "haine aveugle" pendant le Covid

    news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 12 February, 2021 - 09:03 · 1 minute

NOUVEL AN LUNAIRE - “Je me souviens [...] de la discrimination que nous avons vécue, que vous avez vécue”: dans un message vidéo adressé le 12 février à la communauté franco-asiatique à l’occasion du Nouvel An lunaire, Emmanuel Macron a pris soin d’évoquer la vague de racisme provoquée par la pandémie de coronavirus , il y a près d’un an. Un discours à retrouver en intégralité dans la vidéo en tête de cet article.

Des voeux marqués bien sûr par l’omniprésence du coronavirus , où le président a mis l’accent sur “les raisons” d’espérer de l’année qui vient. “Alors que chaque année cette période est festive [...], je sais aussi combien la pandémie vous prive de cette chaleur humaine”, a regretté Emmanuel Macron, avant de rendre hommage aux victimes de la maladie.

Une adresse qui fut enfin l’occasion d’évoquer les liens entre la France et l’Asie du Sud-est: “Par votre dynamisme [...], vous contribuez à ouvrir la France à de nouveaux horizons, à construire l’avenir de notre pays”, a-t-il déclaré depuis l’Élysée. “Ce sont autant de ponts qui sont jetés vers vos pays d’origine [...] auxquels je tiens tout particulièrement”, a-t-il ajouté.

Souvent considérée comme “discrète”, la communauté asiatique en France change d’image ces dernières années, notamment pour lutter plus activement contre les stéréotypes. Le Nouvel An lunaire, souvent appelé “Nouvel An chinois” par les Occidentaux alors qu’il concerne une partie importante de l’Asie du Sud-est, est justement l’occasion de ressortir les vieux clichés , un écueil que l’Élysée a pris soin d’éviter.

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    Retraites : Macron prendra-t-il vraiment le risque de réformer ?

    ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 12 February, 2021 - 04:30 · 15 minutes

retraites

Par Jacques Garello.

Nos gouvernants, et le président lui-même, ont laissé entendre que la réforme des retraites serait remise en chantier cette année. Je suis très sceptique car ce serait à mon sens prendre un risque électoral considérable. Emmanuel Macron serait-il décidé à jouer son deuxième mandat sur ce dossier politiquement explosif ?

Toute véritable réforme redistribue les acquis et les chances d’un grand nombre de personnes décidées à tout faire contre le changement. En janvier 2020 le gouvernement a prudemment mis fin aux travaux de la Commission Delevoye , qui n’avaient pourtant rien de révolutionnaires, puisque le système de la répartition régissant les retraites depuis 1941 1 n’était pas remis en cause.

Tout le monde politique et social était d’accord sur ce point : la réforme ne changera pas le système, elle l’adaptera ; elle ne sera pas « systémique », mais seulement « paramétrique ».

L’attachement à la répartition est historique et sentimental : elle est réputée plus juste et plus solidaire puisque les jeunes paient pour les vieux, les cotisations des actifs financent les pensions des retraités. Mais le système ne trouve pas son compte dans une population vieillissante ; il a fallu attendre le rapport Charpin (1999) pour découvrir une évidence : le système de répartition est mis en danger par le vieillissement de la population .

Le chiffre de la proportion d’actifs par rapport aux retraités était de 4 pour 1 il y a quarante ans, il est aujourd’hui autour de 1,5 pour 1 et sera à 1 pour 1 dans moins de dix ans. Une immigration massive avec regroupement familial et forte natalité est-elle la solution ? Le remède est parfois plus dangereux que le mal.

Delevoye : régime unique et retraite par points

Le mal c’est la stupidité de persévérer dans un système ruineux , qui ne présente aucun avantage pour les Français. Le projet Delevoye était mort-né puisqu’il ne se voulait que paramétrique comme les précédents 2 , et consistait à modifier le dispositif de la répartition : âge de la retraite, durée de cotisation, calcul de la base, indexation des pensions, pénibilité, etc.

Et très vite il s’est trouvé pris au piège de la retraite par répartition ; l’âge du départ en retraite . J’ai l’habitude de le présenter comme un problème de plomberie : si l’on veut stabiliser le niveau de l’eau dans la baignoire il y a deux possibilités : ouvrir davantage le robinet (augmenter les cotisations) ou freiner l’écoulement de la bonde (diminuer les pensions).

Le recul de l’âge de la retraite a le double mérite d’amener les assurés à cotiser plus longtemps, et à percevoir leurs droits plus tard. Voilà peut-être le miracle qui permet de compenser le raccourcissement de la vie active (commencée plus tard, et avec un quart des jeunes au chômage) et l’allongement de l’espérance de vie (une bonne chose tout de même).

Néanmoins le projet Delevoye se voulait innovant et poursuivait aussi deux objectifs majeurs originaux : régime unique et retraite par points.

Représentaient-ils un progrès ?

Le régime unique est une réforme jacobine , qui ignore totalement les choix personnels ou professionnels que chacun peut faire pour sa retraite. Certes la disparition de certains régimes spéciaux pouvait supprimer des privilèges tout à fait artificiels, qui bénéficiaient notamment aux salariés du secteur public , fonctionnaires ou personnel des entreprises publiques. Mais elle mettait fin aussi à des régimes mis en place par nombre de professions libérales qui avaient eu l’intelligence d’abandonner la répartition pour gérer leurs retraites à leur façon (les pharmaciens par exemple).

Par contraste la retraite par points pouvait rendre un certain degré de liberté aux assurés sociaux : les cotisations versées seraient désormais transformées en points, et il serait possible aux cotisants d’abonder un compte personnel en achetant des points. Cette disposition qui a séduit certains de nos amis 3 présente un vice fondamental : quelle sera la valeur du point le jour du départ en retraite ? Pour gérer sa pension il faut en avoir une idée même approximative 4 .

Pourquoi pas la capitalisation ?

Proposer une réforme à la fois impopulaire et incohérente, bloquée entre autres par le piège de l’âge de la retraite, ne pouvait aller bien loin – pas plus loin que les précédentes. Le déficit de la répartition continuera à s’aggraver et si la France est mal classée par les experts internationaux c’est que la viabilité du système est très faible : aucun avenir pour la répartition 5 .

Mais les Français en ont-ils conscience ? La plupart sont persuadés que l’argent versé à l’URSSAF est bloqué sur un compte qui leur rapporte et qu’ils retrouveront le jour heureux de leur retraite. Ils ne savent pas que cet argent a été immédiatement reversé aux retraités du moment.

Ils ne savent pas davantage que la part patronale payée à l’URSSAF est en réalité prélevée sur leur salaire, ils ignorent ce qu’est le salaire complet , qui est le vrai montant de la valeur qu’ils ont ajoutée par leur travail, valeur payée par l’acheteur du bien et service produit.

Le mythe du « meilleur système social du monde » est donc dans la plupart des esprits. Mais il faut aussi prendre en compte le poids de l’idéologie . Tout ce qui évoque le capital, le capitalisme, et a plus forte raison le capitalisme financier a mauvaise presse dans notre pays sans éducation économique et formaté à la lutte des classes. On a fait grand bruit autour de faillites célèbres et souvent frauduleuses : Enron, Maxwell, Madoff ont fait perdre des milliards aux retraités. Cela n’a rien à voir avec la capitalisation, c’est un vol, un détournement de fonds, qui relève du droit pénal, et qui a été en général puni.

La capitalisation est pourtant un calcul élémentaire, que j’ai appris jadis en classe de huitième (CM1 dirons-nous). Si je place 100 euros pendant 16 ans à un taux d’intérêt de 4 % je récupérerais environ le double de ce que j’ai placé. Cela s’appelle « la loi des intérêts composés 6 ». Mais où placer et qui fixe le taux d’intérêt ?

Où placer ? En général auprès d’un fonds de pension, d’un fonds de placement ou d’une compagnie d’assurance. Il est à noter que les Français qui le peuvent ont pris le chemin de la capitalisation en souscrivant des contrats d’assurance-vie. Ils seraient plus de 16 millions.

D’autres bénéficient de couvertures qui ne relèvent pas de la seule répartition : les fonctionnaires avec la Préfon , et ceux qui ont des comptes dits d’épargne retraite PEE, PERP, PERC, PERE, PERCO. Mais la grande majorité des ménages français n’a pas les moyens ou le droit de se prémunir contre la faillite de la répartition : ce sont les plus mal lotis, et bien sûr les plus dépourvus. Voilà comment le système par répartition répond au principe de « justice sociale ».

La vérité est qu’à la différence de presque tous les pays de l’OCDE, la France n’offre pas la possibilité de choisir une retraite par capitalisation. Je ne sais pas faire la part de l’ignorance ou de l’idéologie dans cette exception française.

La face cachée de la capitalisation

Je voudrais insister sur un aspect de la capitalisation qui est rarement évoqué, alors qu’il est à mon sens le plus important.

Qu’est-ce qui autorise fonds de pension, fonds de placement et assureurs à fixer des taux d’intérêt réels capables de valoriser les placements ? C’est simplement que les sommes versées par les futurs retraités sont placées, et investies dans des titres financiers et des entreprises. Les entreprises sont directement ou indirectement sélectionnées pour leurs performances actuelles, mais plus encore pour les perspectives que leur ouvrent des innovations durables et une compétitivité avérée.

Par comparaison la répartition est un pur gaspillage de l’argent. Les cotisations encaissées par l’URSSAF ou quelque autre collecteur sont immédiatement versées aux pensionnés. L’économie nationale n’aura pas vu la couleur de l’argent autrement que sous forme de dépenses de consommation. Évidemment les keynésiens pensent que seule la dépense crée la croissance, et pour eux peu importent son origine et son financement (y compris l’endettement) mais cette vue n’a jamais conduit qu’à la stagnation ou plus souvent à la récession.

Par contraste les investissements réalisés par les gestionnaires des pensions capitalisées sont sources de produit marchand, de revenus et d’emplois. Il n’y a ni « distribution de faux droits » (Rueff) ni « mal-investissement » (Hayek), l’argent va où il doit être pour satisfaire au mieux les besoins repérés sur le marché à travers les signaux des prix et profits relatifs.

C’est dire que le passage à la capitalisation est source de croissance rapide et des performances remarquables ont été réalisées dans nombre de pays ayant introduit la capitalisation, sous forme d’un système unique ou d’un pilier important (facultatif ou obligatoire) d’un système composite 7 . C’est notamment le cas des Pays-Bas , de l’ Australie , de la Nouvelle Zélande, d’Israël, de la Suède et de la Norvège, pays en tête du classement mondial des systèmes de retraite.

En réalité, à côté de ses performances financières chiffrées il faut comprendre que le passage à la capitalisation est un vrai choix de société. C’est ce qu’avait souligné Gary Becker , prix Nobel d’Économie, venu à Paris en 1996 tenir conférence à mon invitation et à celle de Gérard Maudrux , gestionnaire de la Caisse des Retraites des Médecins. Voici le choix de société lié à la capitalisation :

« C’est un retour au travail, plus de gens seront actifs et le seront plus longtemps. C’est un retour à l’épargne alors que la répartition dilapide l’argent gagné et la richesse nationale. C’est un retour à la responsabilité personnelle ; la répartition contient tous les germes de la collectivisation et aboutit à faire disparaître toute idée de progrès personnel 8 ».

Alors, pourquoi retarder depuis des décennies la transition à la capitalisation, partielle ou totale ?

La transition et ses embûches

C’est peut-être que la transition est délicate, car le défi majeur est de rassurer ceux qui sont actuellement assurés : ils ne perdront rien des droits qu’ils ont déjà acquis dans le système de répartition auquel ils ont été assujettis.

Comment relever le défi ?

José Pinera, économiste chilien formé à Harvard, n’eut pas de véritable difficulté pour gérer la transition de la répartition à la capitalisation dans son pays en 1980 9 : le niveau des pensions par répartition était ridicule, le nombre d’assurés était faible, et il pouvait honorer les droits acquis en utilisant le pactole de la privatisation des mines, des ports et autres bijoux de l’État chilien.

Malheureusement la France de 2021 n’est pas le Chili de 1980. Le niveau des retraites est élevé (proche de celui de tous nos voisins européens), les droits acquis dans le régime public par répartition représentent globalement la valeur de quatre années de PIB (environ 10 000 milliards d’euros), enfin la vente des bijoux de l’État n’excéderait guère 1000 milliards.

Je me suis risqué à aborder la gestion de la transition dans un de mes tomes 10 , et j’ai observé les deux méthodes pour honorer les droits acquis : celle de Pinera relevait de la chirurgie, celle de nombreux économistes de Chicago (principalement Sam Pelzman) relevait de la médecine douce. Chirurgie : impraticable dans le contexte français. Médecine douce : il est possible d’étaler sur une longue période le paiement des droits acquis en acceptant de grossir la dette sociale, mais pour quel montant et jusqu’à quand ?

Chez nous c’était la mission de la Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (CADES) mais elle n’a pu tenir le rythme imposé par les déficits sans cesse croissants. Avec 45 milliards d’euros de déficit en 2020 la dette sociale à rembourser se monte maintenant à 136 milliards et a été étalée jusqu’en 2033… ou plus tard. Il est d’ailleurs de bon ton actuellement de pronostiquer qu’aucune dette ni publique ni sociale ne sera remboursée.

Pour m’en tenir à une gestion plus rigoureuse mais réaliste j’ai retenu une idée de Pinera : la transition n’a pas la même urgence pour tous les âges de la population, et il faut scinder les assurés en trois classes : trop vieux, très jeunes, et entre les deux. Les retraités actuels et les personnes à moins de 15 ans de la retraite n’ont aucune chance de reconstituer leur capital retraite, ils doivent donc être pris en charge avec les cotisations des jeunes entrant en activité. À l’autre bout de la chaîne les jeunes ont pour obligation légale de cotiser pour les précédents, et à un taux supérieur pour compenser le déficit démographique.

Cet effort, à poursuivre sur 15 années, est légitimé pour deux raisons : d’une part ils ont le droit de posséder d’ores et déjà un compte en capitalisation, d’autre part ils paient une rançon pour être libérés de la répartition et bénéficier de la capitalisation une fois passées les années de « solidarité intergénérationnelle ».

Finalement leur retraite leur coûtera moins cher et sera à l’abri de toute faillite. Enfin la génération intermédiaire aura le choix : rester en répartition, avec les risques calculés et annoncés, ou passer en capitalisation puisqu’en quelque 25 ans ils ont le temps de reconstituer un capital retraite plus avantageux.

Cette solution a l’air bien compliquée et incertaine, mais elle repose sur l’idée du « cycle vital » jadis exprimée par William Baumol : il y a un âge pour dépenser et un âge pour épargner et investir, en fonction de la taille de la famille, de la croissance des revenus, du capital déjà constitué.

Sans doute un chiffrage plus précis doit-il être fait par des spécialistes du calcul actuariel, je n’en suis pas capable. Mais finalement tout revient à une simple hypothèse : les cotisations pour honorer la dette sociale diminuent avec l’âge, de sorte que des sommes d’épargne retraite sont libérées avec l’âge, permettant de capitaliser. Il faut évidemment insister sur le fait que la liberté retrouvée pour les Français les plus jeunes et la génération immédiatement précédente permet d’accéder à des pensions plus élevées et mieux assurées.

Il y a urgence : prenons le temps !

Toute réforme mérite d’être réfléchie si elle veut être réussie. Cette évidence n’a pas été respectée à ce jour, puisque la classe politique et la population n’ont jamais évoqué la seule solution qui s’impose : opérer un changement systémique . Il ne manquait pourtant pas de littérature scientifique et politique sur la question. L’intérêt de la réflexion repose cependant sur quelques préalables.

Le premier préalable est l’information sincère des Français. Les rapports du COR (Centre d’Orientation des Retraites) ou de la Cour des comptes ont pourtant alerté la nation, mais l’alerte n’a pas intéressé grand monde.

Le deuxième est la comparaison internationale : elle fait apparaître le retard de la France et détruit le mythe du « meilleur système du monde ».

Le troisième est de comprendre que ce sont bien les salariés, et pas leurs employeurs, qui sont spoliés par le niveau élevé des cotisations ; payer le salaire complet est une information déterminante.

Le quatrième est de dépolitiser la réforme, et de l’affranchir du calendrier électoral. C’est sans doute le préalable le plus impérieux dans un pays où tout est politique.

  1. Le système de retraite français a été créé non pas à la Libération (comme on le dit), il n’est pas le résultat de « conquêtes sociales et syndicales » , mais une innovation du régime de Vichy . En 1941, le ministre René Belin, ancien cégétiste, crée l’Allocation aux Vieux Travailleurs Salariés. Il est conservé en 1945 par Parodi et Laroque, inventeurs de la Sécurité sociale.
  2. Parmi les « grandes réformes » celles de Balladur 1993, Fillon 2003, Woerth 2010 et Touraine 2014.
  3. Jacques Bichot et Alain Madelin.
  4. Il est vrai que l’on a toujours le choix entre un système à cotisation définie et un système à prestation définie : dans un cas on sait ce qu’on paye, dans l’autre ce que l’on perçoit. Il y a aussi un choix important : la sortie en capital ou en annuités.
  5. Parmi les classements il y a celui de Mercer, proposé par l’Université de Melbourne. Dans la liste de 20 pays étudiés l’an dernier la France est à la vingtième place essentiellement parce que sa note de  viabilité est la plus basse de l’échantillon. Le niveau des pensions est au contraire à son avantage, mais cela prouve qu’on sert pour l’instant des retraites au-dessus des moyens de les financer… et cela ne saurait durer longtemps.
  6. Cf. Le deuxième tome de la trilogie sur Futur des retraites et retraites du futur, Librairie de l’Université, éd. Aix en Provence, 2009.
  7. On note en général quatre piliers dans un système de retraite composite : filet social public (répartition), complémentaires obligatoires (publiques ou privées), complémentaires facultatives, fonds de pension privés.
  8. Cf. la citation complète dans mon ouvrage
Comment sauver vos retraites , libréchange, ed. Nice 2014, p.113. Cf son article dans Le Journal des Libertés , printemps 2019, accessible sur le site journaldeslibertes.fr Futur des retraites et retraites du futur, tome III la Transition, op.cit. 2010 Librairie de l’Université, éd. Aix.