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Une fois que le moniteur Olivier eut pris congé de moi, ma monitrice revint dans le dortoir, s'assit de nouveau sur la chaise à côté de moi et me demanda très innocemment :

« Pourquoi t'étais pas allée faire derrière les arbres, si tu pouvais pus t'retenir ?

- C'est pas interdit ?

- En principe, si mais tu crois qu'ys s'sont gênés, les autres ? Depuis qu'Olivier a fermé la porte des WC, l'après-midi, tous les enfants font leurs besoins derrière les arbres et nous, les monos, on fait comme si on voyait rien. On va tout de même pas les gronder alors qu'ys peuvent pas faire autrement.


extrait de : UN PIÈGE DIABOLIQUE


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Rassurée par les mots du moniteur, la lumière se fit dans ma tête et je protestai :

« Mais non, j'veux pas qu'y ait d'bêtises. Moi, si j'vais aux cabinets, c'est parce que j'ai besoin d'y aller.

- T'es sûre ? »

Décidément, ce moniteur, il est comme ma mère : si on lui met pas les points sur les i, y comprend rien.

« Non, j'veux pas qu'y ait d'bêtises. C'est Éric, mon amoureux. Les autres, ys ont pas l'droit d'faire des bêtises.

- Bon, d'accord, répondit le moniteur. Dans ce cas, y a pas de problème. Moi, j'veux bien qu'y ait des histoires d'amour pendant les vacances. C'qu'y s'passe entre ton copain et toi, je ne m'en mêlerai pas. Moi, tout ce qui me préoccupe, c'est les WC… »

qui furent rouverts le jour même.


extrait de : MALSAIN


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« Moi, ça m'amuse pas de verrouiller l'accès aux WC, me raconta le moniteur Olivier. Si je fais ça, c'est parce que j'veux pas qu'y s'passe des trucs malsains en colonie, tu comprends ?

Malsain ? Ce mot me fit le même effet que la mauvaise intuition que j'avais eue quand, enfermée dans un WC, j'avais entendu les garçons murmurer aux lavabos.

« P'têt que… p'têt que j'comprends pas parce que ça m'fait peur, bredouillai-je.

- Non, non, faut pas avoir peur. Nous, les monos, on est là pour faire en sorte qu'y ait pas de bêtises. Si tu m'dis qu'tu veux pas qu'y ait des bêtises dans les WC, moi, je f'rai le nécessaire et y aura pas d'bêtises. Tu peux m'faire confiance. Moi, tout ce dont j'ai besoin, c'est que tu m'dises si toi, tu veux qu'y ait des bêtises aux WC. »


extrait de : MALSAIN


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Sauf que le lendemain, ça avait recommencé pareil : personne dans la cabane en bois lorsque j'y étais entrée mais dès que je m'étais enfermée dans un WC, j'avais entendu des garçons murmurer aux lavabos. À priori, je ne voyais aucune raison de m'en inquiéter mais ça me donnait une mauvaise intuition. Ça me faisait peur.

Là-dessus, j'avais entendu la voix d'un moniteur - Olivier, m'avait-il semblé - gronder les garçons parce qu'ils escaladaient les tuyaux de canalisation et que ça risquait de les casser… puis plus rien. Apparemment, le moniteur avait fait sortir les garçons et je m'en étais sentie plus tranquille bien que, en y réfléchissant, je ne voyais pas de raison de m'en faire. Mon intuition avait vu juste, les garçons avaient bel et bien fait une bêtise puisqu'ils s'étaient amusés à faire de l'escalade sur des installations de plomberie, ce n'est pas prévu à cet effet mais moi, qu'est-ce que ça pouvait me faire ? Ça ne me concernait pas. Pourquoi ce mauvais pressentiment ? Pourquoi donc avais-je éprouvé comme de la peur quand j'avais entendu ces garçons murmurer aux lavabos ? N'étais-je pas un peu bébête, à toujours croire qu'on me voulait du mal ?


extrait de : MALSAIN


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    Inceste: Geneviève Garrigos raconte la souffrance qui se perpétue

    news.movim.eu / HuffingtonPost · Wednesday, 20 January, 2021 - 17:16 · 2 minutes

#METOOINCESTE - “Et ça, encore, c’est d’une très grande violence”. L’émotion est palpable et fait encore parfois trembler sa voix et ralentit sa diction. Alors que les témoignages se multiplient sous le hashtag #MeTooInceste depuis samedi 16 janvier, Le HuffPost a rencontré Geneviève Garrigos , élue municipale, ancienne présidente d’Amnesty International. Et victime d’ inceste à l’âge de 5 ans.

Après 40 ans d’amnésie traumatique, cette conseillère de Paris peine encore à trouver les mots pour évoquer les violences sexuelles qu’elle a subies. Après le lent travail de conscientisation, il faut encore affronter le regard des autres, encore mal préparés à faire face à ce tabou. Mais ce n’est pas tout.

La parole officielle blesse

À la télévision, à la radio, c’est aussi la maladresse des mots, la lente prise de conscience et la déconnexion de certains qu’il faut encore subir. Cette violence dans les prises de parole est encore plus forte quand elle vient de l’exécutif.

″Ça fait des années qu’on en parle, il ne s’agit pas d’une affaire, d’une émotion”. L’élue municipale fait ici référence à l’intervention du Premier ministre Jean Castex dans l’émission de France 5, “C à Vous”. Sur le plateau, les hésitations, les adjectifs employés pour parler de l’inceste comme “inimaginable” ont fait sortir de ses gonds cette victime, comme vous pouvez le voir dans notre vidéo ci-dessus .

Les débats renvoient à sa propre “monstruosité”

Ajoutons à cela la violence des débats de société dont on oublie qu’ils peuvent renvoyer certaines victimes d’inceste à leurs traumatismes. Pour Geneviève Garrigos, ce sont les débats sur la PMA, le mariage pour tous ou encore ceux sur l’avortement qui réveillent les douleurs du passé et ralentissent l’apaisement.

À travers ces débats, “on a une idéalisation de la famille normée”, explique-t-elle. “Dans une vision assez conservatrice de la société, la famille est sanctuarisée, où la famille est aimante, où si un enfant n’a pas un père et une mère, et bien il est mal construit. [...] Et là, pour les enfants comme moi qui se sont construits au sein d’une famille où il y avait de la violence, où le père n’était pas celui qu’ils attendaient, [...] quand on grandit et qu’on entend ce genre de discours, mais c’est d’une violence totale.” Pour cette victime d’inceste, cela renvoie ”à une monstruosité”, ajoute-t-elle, “nous sommes des monstres puisque nous n’avons pas ça [cette famille normée, ndlr ]”.

À voir également sur Le HuffPost: Les violences sexuelles faites aux enfants sont encore un tabou