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      Quand le père Noël se fait piéger par la réglementation française

      Valentin Petkantchin · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 26 December, 2020 - 04:35 · 3 minutes

    Père Noël

    Par Valentin Petkantchin (2007), publié en collaboration avec l’Institut Economique Molinari.

    La fête de Noël est passée et le père Noël a dû distribuer les jouets aux enfants sages. Mais en dépit de sa bonne volonté, il risque d’avoir de plus en plus de mal à exaucer les vœux des Français à cause des réglementations en place.

    En France, c’est l’État qui décide – à la place des propriétaires de magasins – non seulement l’ouverture le dimanche ou le début et la fin de la période des soldes. Il réglemente aussi très strictement les relations entre fabricants et distributeurs.

    Et c’est là que le cauchemar du père Noël a commencé. Que ses prix soient différents ou les mêmes d’un magasin à un autre, le père Noël est toujours coupable !

    Tout d’abord, si ses prix sont différents, il peut être poursuivi pour non respect de la loi Galland qui interdit la revente en dessous d’un niveau bureaucratiquement établi. Cette loi interdit aussi la soi-disant « discrimination tarifaire » : des conditions de vente différentes peuvent donc faire l’objet de poursuites. Logiquement, les fabricants de jouets ont tendance à pratiquer les mêmes prix plancher, les mêmes rabais et les mêmes conditions de vente.

    Comment le législateur français peut-il en effet espérer – à moins de croire réellement au père Noël – que les fabricants de jouets concéderaient des avantages et des prix plus bas à un distributeur, si les autres distributeurs peuvent exiger par la loi les mêmes conditions favorables ? De même, comment peut-il croire que les distributeurs négocieraient de meilleurs deals pour leurs clients, si n’importe lequel de leurs concurrents peut obtenir les mêmes conditions favorables en invoquant une « discrimination tarifaire » ?

    Bien que ces dispositions entravent la concurrence entre distributeurs et les empêchent de faire profiter les consommateurs de prix plus bas et de meilleures offres, celle-là n’a pas complètement disparu.

    Ne pouvant pas se concurrencer sur les prix, les enseignes offrent à la place des programmes de fidélité, incluant bons de réduction ou remises pour les clients. À l’image de Carrefour qui offre 25 % de réduction sur une centaine de jouets aux détenteurs de sa carte de fidélité.

    Mais en respectant la loi Galland par des prix identiques dans les rayons, le père Noël n’est malheureusement pas à l’abri des problèmes. Il devient alors la cible facile des associations de consommateurs et des bureaucrates anti-trust. Ces derniers ont ainsi, le 20 décembre 2007, infligé des amendes de 37 millions d’euros à différents fabricants et distributeurs de jouets en France.

    Quelle en était la raison ? Le père Noël a été puni pour s’être entendu sur les mêmes prix à travers la France, ce qui a été jugé anticoncurrentiel !

    Mais pouvoir imposer des prix identiques pour le même produit n’est pas contraire à la libre concurrence : n’est-ce pas précisément le cas, pourrait objecter avec raison le père Noël, de tout fabricant verticalement intégré qui vend directement au consommateur ?

    Ce sont in fine les consommateurs qui devront subir les conséquences de cet enfer réglementaire un jour ou l’autre, en termes de moindre choix ou des prix plus élevés.

    La réglementation française fait de son mieux pour mettre en échec la mission magique du père Noël. Quand comprendra-t-on qu’il n’a pas besoin de toute cette réglementation, mais d’une réelle déréglementation, si on veut qu’il offre des jouets de meilleure qualité et moins chers à nos bambins ?

    Article initialement publié en décembre 2011.

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      Comment les Soviétiques ont cherché à détruire Noël

      Foundation for Economic Education · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 26 December, 2020 - 04:20 · 3 minutes

    Par Michael de Sapio.
    Un article de The Foundation for Economic Education

    Lorsque les régimes totalitaires (en particulier ceux de gauche) arrivent au pouvoir, une des premières choses qu’ils font généralement est de détruire les symboles culturels sacrés, afin de mieux reconstruire la société depuis la base. La campagne soviétique pour remplacer les symboles de Noël est un chapitre culturel intéressant dans l’histoire de ce que Ronald Reagan nommait « l’empire du mal ».

    À la suite de la Révolution russe, le nouveau gouvernement athée commença une campagne antireligieuse. Tous les symboles jugés religieux ou bourgeois furent éradiqués et remplacés par de nouvelles versions laïques. Ainsi Noël (qui dans le calendrier orthodoxe russe est le 7 janvier) fût aboli en faveur du Nouvel An, et plusieurs coutumes et traditions de Noël reçurent de nouvelles identités.

    Nouveau père Noël et nouvelle nativité

    Saint-Nicolas et le père Noël cédèrent leur place à Ded Moroz ou « Grand-père gel » (une figure populaire provenant des temps païens), et la nouvelle « nativité » le présentait avec sa petite-fille la Vierge des neiges au lieu de Joseph et Marie, parfois avec le « garçon du Nouvel An » à la place de Jésus. Les cartes de Noël représentaient souvent Ded Moroz chevauchant aux côtés d’un cosmonaute soviétique dans un vaisseau spatial blasonné avec un marteau et une faucille.

    De telles images semblent ridicules de nos jours, mais la volonté de détruire les traditions fait partie intégrante des mouvements sociaux radicaux à travers l’histoire. Pensez aux révolutionnaires français qui ont remplacé le calendrier chrétien, allant jusqu’à renommer les mois et les jours de la semaine afin d’éviter toute référence possible au christianisme .

    Et les Soviétiques n’étaient pas les seuls à avoir un problème avec Noël. Les puritains de Boston au XVIIe siècle s’y opposèrent avec véhémence. Un « avis public » de l’époque proclamait :

    « La célébration de Noël étant considérée comme un sacrilège, l’échange de cadeaux et de salutations, vêtir de beaux vêtements, l’organisation de festins et autres pratiques similaires sataniques sont par la présente interdits avec le délinquant, passible d’une amende de cinq shillings. »

    Un groupe détestait Noël parce qu’il était religieux, et l’autre le détestait parce qu’il était irreligieux. L’histoire et la nature humaine sont pleines de paradoxes.

    Quant aux Soviétiques, ils ont fini par adoucir leur position. En 1935, Pavel Postyshev, le dirigeant du Parti communiste, écrivit un éditorial dans la Pravda qui se moquait de la faction extrémiste anti-Noël. Il déclarait que les coutumes de Noël devraient être ramenées pour le plaisir et le bénéfice des enfants. Il va sans dire que pour les enfants l’objectif était toujours de les rendre serviteurs obéissants de l’État. Après la chute de l’Union soviétique en 1991, Noël devint populaire à nouveau.

    Tout cela montre que si vous pouvez lutter contre les traditions, vous ne pouvez pas les détruire complètement. Elles peuvent être cachées, en sommeil, mais une fois les restrictions levées, elles jailliront de nouveau. Et tout régime qui tente de remplacer le monde familier par un monde synthétique est fondamentalement en guerre avec l’esprit humain.

    Article paru initialement en 2016

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      Noël, déformation mercantiliste ? Mais non !

      Guillaume Nicoulaud · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 25 December, 2020 - 04:45 · 8 minutes

    Par Guillaume Nicoulaud.

    Si vous lisez ces mots, c’est que la fin du monde n’a finalement pas eu lieu et que vous êtes désormais entièrement absorbés par l’affaire la plus urgente du moment : demain, ce sera Noël.

    Comme chaque année, vous allez donc vous trimbaler un sapin et passer des heures à ramasser ses aiguilles. Comme chaque année, vous allez vous farcir quelques heures de cuisine pour préparer ces figures culinaires imposées que vous mettrez plusieurs semaines à digérer. Comme chaque année, vous allez courir les magasins pour tenter de dégoter in extremis ce cadeau absolument indispensable que vous réclame votre petit dernier.

    Comme chaque année, enfin, vous allez devoir vous cogner le discours sentencieux du mauvais coucheur familial qui vous expliquera des heures durant que ces traditions païennes souillent la commémoration de la naissance du Christ ; que ces cadeaux ne sont que le signe de l’abject mercantilisme dans lequel baigne notre époque ; qu’en sacrifiant à ses coutumes factices, vous jouez le jeu du grand capital (mondialisé et néolibéral).

    En cette veille de Noël, je vous propose donc quelques petits éléments de mise au point.

    Ce fameux 25 décembre

    Ce 25 décembre, donc, toute la chrétienté fêtera la naissance de Jésus-Christ de Nazareth. Pourtant, il n’en fut pas toujours ainsi : Noël n’a été intégré au calendrier liturgique que tardivement, probablement entre l’édit de Milan (313) par lequel Constantin accordait la liberté de culte à ses sujets et 354, sous le pontificat de Libère, date à laquelle une première célébration de la nativité est attestée.

    Naturellement, le 25 décembre n’a que très peu de chance (1 sur 365) d’être la véritable date d’anniversaire du Christ puisque rien, ni dans les écritures ni ailleurs, ne nous permet de dater précisément, fût-ce à un an près, cet événement. Néanmoins, si cette date n’est que pure convention, elle ne doit rien au hasard : avant de devenir la date de naissance symbolique du Christ 1 , le 25 décembre c’était le dies natalis solis invicti , le jour de naissance de Sol Invictus, le soleil invaincu devenu sous le règne d’Aurélien la divinité principale de l’empire.

    Désormais autorisée et même activement soutenue par le pouvoir impérial, la jeune Église n’avait de cesse que concurrencer les cultes païens ; c’est probablement 2 pour cette raison que le dies natalis de Sol Invictus est devenu le dies natalis du Christ ; le Natale italien.

    Mais si la date de Noël s’impose si facilement dans l’empire, ce n’est pas tant grâce au dieu de synthèse d’Aurélien 3 car le 25 décembre, dans le calendrier julien 4 , c’est le lendemain du solstice d’hiver, le moment où les jours recommencent à rallonger, un événement déjà fêté depuis la nuit des temps dans de nombreuses cultures et notamment celles de l’Europe pré-chrétienne comme les celtes et les peuples germaniques qui célébraient ce même jour la fête de Yule. Notre Noël dérive ainsi très probablement du neue helle germanique, la « nouvelle lumière », le moment où le Soleil gagne sur les ténèbres, la promesse d’une nouvelle année, de nouvelles récoltes, la vie qui poursuit son cours.

    Noël est une extraordinaire collection de symboles païens. L’habitude de se réunir en famille autour d’un bon repas, les chants et les histoires que l’on raconte aux enfants sont des traditions bien antérieures à la christianisation de l’Europe.

    Ce sapin qui trône dans votre salon a très probablement des origines celtiques ; c’était autrefois un épicéa que nos lointains ancêtres décoraient de pommes, de blé, de guirlandes de gui et couronnes de houx.

    De même, bien avant qu’elle ne devienne un dessert, on avait coutume, ici comme en Scandinavie, de faire brûler une grosse bûche durant toute la veillée du solstice d’hiver.

    Enfin, bien sûr, on ne peut pas évoquer Noël sans parler de ce sympathique barbu qui, pour on ne sait quelle obscure raison, s’obstine à gâter nos têtes blondes.

    De qui Père Noël est-il le nom ?

    On ne sait pas qui il est celui-là. La seule chose dont on soit à peu près sûr, c’est qu’il est le résultat de la fusion, opérée au début du XIXe siècle aux États-Unis 5 , entre le Father Christmas anglais et Saint Nicolas européen.

    Le premier, s’il a donné son nom à notre Père Noël, n’a eu que très tardivement pour fonction d’offrir des cadeaux aux enfants ; il est apparu au début du XVIIe siècle, vieux bonhomme bien nourri et vêtu d’une houppelande verte, et n’était rien de plus qu’une personnification de l’esprit festif de Noël.

    Les origines de Saint Nicolas, en revanche, sont mieux connues : c’est Nicolas de Myre, un évêque de l’actuelle Turquie, qui fut convoqué par l’Église pour devenir le protecteur des enfants et, accessoirement, le distributeur officiel de cadeaux du 6 décembre. Son nom, Sinter Klaas en vieil hollandais, est devenu Santa Claus aux États-Unis avant de fusionner complètement avec Father Christmas .

    Or voilà : si, lors de la christianisation des peuples germaniques et scandinaves, l’Église a ressenti le besoin d’invoquer Nicolas de Myre, ce n’est sans doute pas sans raison. C’est certainement qu’il y avait, là aussi, une tradition païenne à christianiser ; une tradition qui impliquait qu’un personnage aussi invisible que mythique distribue des cadeaux aux enfants. Nous entrons ici dans le domaine de la conjecture et, n’ayant aucune prétention en matière historique, je vais me contenter de vous raconter un conte ; un conte de Noël, cela va de soi.

    Il y a bien longtemps, avant que l’Europe ne devienne chrétienne, les mortels comme les dieux d’Ásgard avaient coutume de célébrer dignement la nuit du solstice d’hiver, la fête de Yule. C’est cette nuit qu’Odin, « père de Yule », choisissait pour traverser le Bifröst et, chevauchant Sleipnir, son fier destrier à huit pattes, il parcourait le ciel en chassant 6 .

    Naturellement, les prouesses de l’animal – qui pouvait voler et parcourir d’immenses distances en un rien de temps – avaient vite fait de l’épuiser ; il fallait donc le nourrir. Sachant cela, les enfants avaient pris l’habitude de remplir leurs chausses de carottes et de blé à l’attention de Sleipnir et de les déposer près de l’âtre avant d’aller se coucher. Toujours selon la légende, Odin, sensible à cette délicate attention, ne manquait jamais de les remercier en remplaçant ces victuailles par des friandises et des cadeaux.

    Qu’avons-nous là ? Un vénérable barbu (« longue barbe » est un des nombreux noms d’Odin), manifestement d’origine nordique (vous admettrez avec moi que le traineau de notre Père Noël et sa houppelande y font penser au moins un peu), qui chevauche un cheval (comme Saint Nicolas) à huit pattes (comme les huit rennes du Père Noël) qui a la faculté de voler et qui passe la nuit de Noël à distribuer des cadeaux (comme le Père Noël) aux enfants qui ont eu la gentillesse de nourrir sa monture (comme Saint Nicolas). Le moins que l’on puisse dire c’est que notre sympathique petit papa Noël entretient quelques similitudes frappantes avec le maître d’Ásgard.

    L’esprit de Noël

    Quoi qu’il en soit – et ça c’est une certitude – cette habitude qui veut que nous offrions des cadeaux à nos enfants le jour du solstice d’hiver n’a rien d’une déformation mercantiliste de Noël ; elle lui est, de loin, antérieure.

    Ce faisant, à l’image de nos sapins et de nos bûches de Noël, nous ne faisons que perpétuer les traditions séculaires de notre vieille Europe. Pensez-y quand vos monstres surexcités ouvriront leurs cadeaux : même si vous n’êtes pas chrétien, même si vous ne vénérez aucun dieu, ce que vous célèbrerez ce soir-là, en famille et au travers de la joie de vos enfants, c’est la vie qui continue.

    Joyeux Noël à toutes et à tous !

    NB : Celles et ceux qui utilisent un autre calendrier que celui de Rome – notamment nos amis orthodoxes – voudront bien me pardonner : ce texte est déjà trop long.

    Article initialement publié en décembre 2017.


    Sur le web

    1. Pour ce qui est de l’année, Denys le Petit s’est sans doute trompé de quelques années – même Benoît XVI l’admet volontiers.
    2. Il n’existe aucune certitude à ce propos ; bien que probable, cette interprétation reste sujette à débats.
    3. Sol Invictus a été créé de toutes pièces en reprenant des attributs d’Apollon et du dieu indo-iranien Mithra à qui il doit notamment sa date de naissance.
    4. Dans notre calendrier actuel, le solstice d’hiver a habituellement lieu entre le 21 et le 22 décembre.
    5. Profitons-en pour tordre le coup à une idée reçue : ce n’est pas Coca-Cola qui a inventé le Père Noël ni même la couleur rouge de sa houppelande. La firme d’Atlanta, dans sa campagne publicitaire de 1931, n’a fait qu’utiliser à son profit une iconographie déjà existante en privilégiant la couleur qui l’arrangeait le mieux.
    6. J’évoque Odin, Ásgard et le Bifröst sans vraiment vous en dire plus : si vous ne connaissez pas ces choses-là, demandez à n’importe quel gamin de 10 ans et il vous l’expliquera. Par ailleurs, si vous demandez comment un gamin à peine vieux d’une décennie peut connaître aussi bien la mythologie scandinave, c’est très simple : c’est grâce aux comics de Marvel et à Hollywood qui les a remis au goût du jour ces dernières années (ravages du capitalisme, édition culturelle).
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      Noël en 1870 : une lugubre célébration pour Paris assiégé

      Gérard-Michel Thermeau · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 25 December, 2020 - 04:37 · 9 minutes

    Noël

    Par Gérard-Michel Thermeau.

    Noël en 1870 tombe un dimanche. Paris est assiégé par l’armée allemande depuis 100 jours. Il fait excessivement froid. Ce froid exceptionnel dure depuis plusieurs semaines. Au 25 décembre le sol est tellement dur que le travail des tranchées est arrêté.

    Finalement, Noël 2020 n’est peut-être pas le pire qu’ait connu notre pays. Il y a 150 ans, nos compatriotes avaient bien des sujets de se lamenter.

    Noël en 1870 : pas une priorité

    Pour les journaux parisiens, en tout cas, Noël n’est guère la priorité. Ce 25 décembre n’est jamais qu’un jour de guerre parmi d’autres. « Qui songe aux brimborions à l’heure qu’il est » lit-on dans Le Siècle (27 décembre 1870).

    Les colonnes de la presse sont presque entièrement occupées par les informations militaires. Paris connait seulement depuis peu les détails des opérations militaires du début du mois de décembre. Depuis que la France a perdu ses deux armées organisées, l’une encerclée à Sedan avec Napoléon III et l’autre livrée par Bazaine à Metz, les Français ont tenté d’éviter l’inévitable.

    Paris, qui subit depuis le 20 septembre 1870 un siège, est devenu le pôle central de la guerre.

    Paris assiégé depuis 100 jours

    Le gouvernement provisoire, aux mains des républicains, a tenté de lever des milices armées dans l’esprit de l’an II. Gambetta n’a cessé de payer de sa personne. Tous ses efforts tendant vers le même but, secourir la capitale. À la surprise des Allemands, une armée de la Loire s’est constituée, marchant sur Orléans qui est libérée le 10 novembre.

    Ce succès éphémère se révèle vite illusoire. Les combats de Patay et Loigny, le 2 décembre 1870, remettent les pendules à l’heure. Dès le 5 décembre, Orléans est de nouveau aux mains des Allemands. L’armée des mobiles s’est brisée sur la puissance de feu d’une armée de métier.

    La délégation du gouvernement provisoire, d’abord réfugié à Tours, a du gagner Bordeaux plus sûr. Six cents kilomètres séparent les deux capitales, une bien longue distance pour des pigeons voyageurs saisis par le froid.

    Tout espoir de libérer Paris s’est évanoui. Les Prussiens ont choisi d’abord l’usure comptant sur la famine pour réduire la ville. Trochu se révèle parfaitement passif, l’armée de Paris se contentant de quelques sorties totalement inutiles. Le général ne croit pas à la réussite d’une percée et considère la capitulation inévitable. Mais il garde cette pensée pour lui et tient en public un discours de fermeté.

    Fêter Noël en 1870 : 25 grammes de beurre par tête

    Depuis le début du mois de décembre, la situation s’est beaucoup dégradée pour les Parisiens avec la hausse des produits alimentaires. Sans doute les boucheries ont-elles délivré le jour de Noël un peu de viande de bœuf, et non de cheval, et un peu de beurre demi-sel, 25 grammes par tête. Un luxe par les temps qui courent.

    Le Figaro du 27 décembre, bien loin de ses anciennes préoccupations mondaines, s’intéresse à la « chasse aux aliments » : « Pour tout le monde, la halle est déserte. […] le céleri lui-même est devenu une rareté […] la volaille de plus en plus rare est aussi de plus en plus cher. Les oies et les dindons atteignent des prix fabuleux : de 80 à 90 fr. et ils sont mauvais. »

    Et ce n’est pas le confinement mais le dénuement généralisé qui tue le secteur de la restauration : « Le nombre de restaurants diminue chaque jour et les meilleures maisons se demandent le jour si elles ouvriront le lendemain. »

    L’Univers (26 décembre) sous la plume du farouche polémiste catholique Louis Veuillot, ironise : « Dans les dix ou douze articles dictés par la sanglante Noël de 1870, il apparaît surtout un vif regret de tant de boustifailles supprimées. »

    Non seulement on ne peut plus bouffer mais on se gèle. Il n’y a plus ni gaz, ni charbon et le bois se vend à prix d’or.

    Noël en 1870 : le Noël de César

    Le Journal des Débats constate amèrement dans son numéro du 26 décembre sous la plume de Louis Ratisbonne :

    « Aujourd’hui est né Celui que le monde a appelé le Sauveur du monde, et qui devait réunir les hommes dans un fraternel embrassement. Quel rêve et quelle distance du rêve à la réalité ! […] Il a dit deux paroles : « Charité et fraternité » qui sont tombées sur la terre comme deux gouttes de lait ; mais elles sont tombées sur la pierre dure, et le sang a continué de couler. Depuis le premier Noël, il faut même citer à l’actif de la civilisation un merveilleux progrès dans l’art de le verser par torrents. »

    On se console comme on peut. Le républicain radical Camille Pelletan dans Le Rappel du 26 décembre écrit :

    « Noël ! Pour les chrétiens, c’est une nouvelle année qui s’ouvre. Pour huit cent mille Allemands, elle nait froide, sur une terre gelée, sans abri, loin du pays, au milieu des balles qui sifflent et des obus qui éclatent. »

    Eh bien, il sera gai leur réveillon

    Le royaliste Francisque Sarcey dans Le Gaulois du même jour est dans la même tonalité. Pour lui, Noël en 1870 doit être le « Noël de la patrie ressuscitée » :

    « La voilà donc arrivée cette fête de Noël que les Allemands avaient marquée comme le dernier terme de la guerre. Ils avaient d’abord parlé de la célébrer chez eux, dans leur famille : ils avaient ensuite rabattu de leurs prétentions. C’était chez nous, à Paris, qu’ils se promettaient de faire réveillon, en joyeux réveillon, disent les chansons soldatesques que nous avons confisquées dans la giberne des morts.

    Eh bien ! Il sera gai leur réveillon.

    Tandis que leurs femmes pareront mélancoliquement l’arbre de Noël, en l’absence du père, du mari, du fiancé ou du frère, et que les enfants tout tristes demanderont à la mère : Où est donc papa ? Et que fait-il ?

    […] Nous non plus notre réveillon ne sera pas, cette année, animé de la joie bruyante qui en est la compagne ordinaire. Le dindon traditionnel manquera sur nos tables, et les chants des soupers n’éveilleront point le deuil de la nuit.

    […] En ce jour où naquit celui qui devait enseigner au monde que tous les hommes sont frères, nous pouvons, nous du moins, nous rendre ce témoignage que nous subissons une guerre aussi injuste qu’elle est cruelle ; que nous avons désiré, la paix ; que nous l’avons même demandée, et que nous ne continuons de nous battre que parce qu’un ennemi impitoyable nous a fait des conditions incompatibles avec notre honneur. »

    Noël en 1870 : l’arbre de Noël est allemand

    Il est vrai que, côté allemand, l’enthousiasme est bien retombé avec cette guerre qui n’en finit pas. Noël en 1870 est bien triste pour les centaines de milliers de soldats allemands qui ne bénéficient pas du menu réservé à leurs officiers. Le siège de Paris et la levée par Gambetta d’armées peu efficaces mais bien irritantes, au nord, à l’est, au sud de la Loire, ont assombri Moltke.

    Le siège de la capitale française n’avait pas été prévu par l’état-major allemand. Pour pouvoir bombarder cette ville défendue par des fortifications, il faut acheminer difficilement et de loin d’énormes canons. Le bombardement n’aura pas lieu avant le début du mois de janvier.

    Le Constitutionnel du 25 décembre 1870 nous rappelle combien Noël, tel que nous le célébrons aujourd’hui, était à l’époque une particularité allemande ou alsacienne :

    « C’est ce soir la Weinachten, dit l’Avenir national, la fête si chère à l’Allemagne. Cette nuit, l’arbre de noël, resplendissant de lumières, orné de devises, de rubans, de fruits, de bonbons, de toutes les joies de l’enfance, abritera sous ses branches les cadeaux, les surprises que parents, enfants, amis, se ménagent les uns les autres avec un soin jaloux ; mais un voile de tristesse assombrira cette fête du foyer domestique, cette véritable fête nationale de l’Allemand, qui malgré son origine religieuse, confond dans un même sentiment les chrétiens de toutes sectes et jusqu’aux juifs eux-mêmes. »

    Dieu est décidément allemand

    Le même  journal ajoute :

    « Parisiens, devenus soldats, fêtons aussi Noël à la façon qui nous sied aujourd’hui, c’est-à-dire en prenant l’anniversaire de la naissance du Christ pour la date de notre résurrection de patriotes, de citoyens et d’hommes libres ! Que le ciel exauce ce vœu qui doit être le vœu de tous : dans les sabots de Noël du Paris de 1870, que Dieu mette la victoire ! »

    Mais le Ciel resta sourd aux prières des Français. Ce diable de Bismarck avait mis tout le monde dans sa poche, y compris le Bon Dieu.

    Soutenons le petit commerce

    Pour sa part, Le Petit Journal du 26 décembre 1870 se veut digne en ces temps difficiles :

    « Que Paris célèbre dignement la fête de Noël en s’inspirant de la gravité des circonstances. Donnons aux nécessiteux, consolons les affligés, soignons les malades et prions pour tous. »

    Pratique, le même journal consacre un entrefilet aux étrennes :

    « Ne privons pas les enfants et les serviteurs de leurs étrennes. On donne du travail aux ouvriers et aux ouvrières qui fabriquent des jouets, on fait faire de petits bénéfices aux marchands déjà très éprouvés, et on ne prive pas les enfants de leurs joies habituelles et les serviteurs et les employés d’un supplément de ressources bien nécessaires en ce moment. »

    Voilà qui sonne bien d’actualité en ce Noël 2020 . Et relativise nos petits malheurs actuels.

    Joyeux Noël, malgré tout…

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      Macron offre un état d’urgence sanitaire éternel pour Noël !

      Nathalie MP Meyer · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 24 December, 2020 - 04:00 · 6 minutes

    Macron

    Par Nathalie MP Meyer.

    Chers lecteurs, voici venu pour moi le moment d’afficher ma traditionnelle crèche de blog et de vous souhaiter du fond du cœur un très Joyeux Noël 2020. Malgré les restrictions et la morosité ambiante, j’espère que ce sera pour vous l’occasion d’échanges joyeux et chaleureux en famille !

    Pour ma part, je compte faire le vide politique dans ma tête et oublier pour un temps les nombreux tourments de notre actualité. Mais au moment où j’écris ceci, j’ai cependant le cœur lourd car pour Noël, Emmanuel Macron a décidé de nous offrir un état d’urgence sanitaire éternel. Quelle immonde trahison !

    On commençait à se dire qu’avec l’apparition de plusieurs vaccins anti-Covid prometteurs, l’année 2021 signifierait peut-être le retour très attendu à une vie sanitaire, politique, économique et sociale à peu près normale. Mais tout montre hélas que ce sera une vie à peu près normale au sens où on l’entend dans la France d’Emmanuel Macron.

    Souvenez-vous, il y a un an…

    Il y a un an, en décembre 2019, il n’était pas encore question de Coronavirus, ni de masques, ni de gel, ni de confinement, ni de couvre-feux, ni d’état urgence sanitaire, ni de mise à l’arrêt administrative de l’économie, ni d’installation de la grande roue de Lille… sans public .

    Mais le pays était déjà sens dessus dessous et la SNCF était une fois de plus en grève à la veille des vacances de Noël pour protester contre la réforme des retraites concoctée par le gouvernement.

    Quant au gouvernement de l’époque, au-delà de la mesure de fin des régimes spéciaux qui avait motivé le grève – et qui était effectivement souhaitable – il cherchait alors à parachever la collectivisation complète de notre système de retraite en faisant main basse sur les réserves excédentaires des régimes autonomes des pharmaciens, des avocats, etc.

    Le président de la République Emmanuel Macron avait d’ailleurs déjà prouvé mille fois auparavant qu’il n’avait rien d’un grand libéral sur le plan économique – sauf dans la vision hallucinée d’un Jean-Luc Mélenchon ou d’un syndicaliste de la CGT. Et il avait prouvé mille fois de plus qu’il méprisait les libertés civiles tout en se gargarisant de discours sur la France des Lumières qui ne renoncera jamais aux caricatures.

    Belle hypocrisie.

    Macron et les restrictions de libertés en cascades

    Que vaut l’hommage à Samuel Paty , cet enseignant décapité pour avoir utilisé des caricatures du prophète Mahomet dans un cours sur la liberté d’expression, si par ailleurs tout est organisé pour réduire petit à petit et bien souvent sans trop le dire, les degrés de liberté des citoyens dans l’ensemble de leur vie quotidienne ? Il ne vaut rien.

    Or dès octobre 2017, soit quelques mois à peine après son accession au pouvoir, Emmanuel Macron « mettait fin » à l’état d’urgence instauré par François Hollande en novembre 2015 après les attentats terroristes du Bataclan… en intégrant ses dispositions les plus caractéristiques dans le droit commun !

    Dès ce moment, l’orientation du quinquennat était claire : l’État d’abord, les citoyens ensuite.

    Nous avons donc eu droit à une véritable déferlante de restrictions des libertés individuelles : d’abord la loi contre les fake news (2018), puis la loi anti-casseurs  (2019) heureusement censurée par le Conseil constitutionnel, puis la création du Conseil de déontologie journalistique (2019), puis la loi Avia contre la haine en ligne (avril 2020), heureusement retoquée elle aussi par le Conseil constitutionnel, puis le vote contrarié sur la prolongation de l’état d’urgence sanitaire (4 novembre 2020).

    Avec les textes en préparation tels que le projet de loi contre les séparatismes, il est question de réduire la liberté scolaire et de réintroduire des éléments de la loi Avia contre la haine en ligne, et avec le projet de loi de sécurité globale, il est question d’interdire la diffusion d’images des forces de l’ordre dans l’exercice de leurs fonctions au mépris de la liberté de la presse et de la liberté d’informer (le fameux article 24 ).

    Macron, un pas de plus vers toujours moins de libertés

    Et maintenant, Emmanuel Macron fait un pas de plus, un pas de trop, dans sa conception liberticide des libertés : via son Premier ministre Jean Castex, il a déposé avant-hier en fin de journée un projet de loi en procédure accélérée « instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires ». Autrement dit, comme pour l’état d’urgence tout court, il est question d’intégrer l’état d’urgence sanitaire dans le droit commun. Il fallait s’y attendre, c’est la méthode Macron.

    Dans un État libéral comme celui qu’Emmanuel Macron prétend défendre contre les pulsions illibérales de certains pays, la maîtrise médicale prévisible de la pandémie grâce aux vaccins commanderait une seule action : la fin pure et simple de l’état d’urgence sanitaire qui autorise le gouvernement à prendre pratiquement toutes les mesures de restriction qu’il souhaite en matière de déplacements des personnes, activités des entreprises, réquisitions de biens et services et fixation des prix.

    Mais comme l’écrivait Margot Arold hier dans Contrepoints , ce ne sera pas le cas :

    Vous aviez apprécié les mesures mises en place par la Chine ? Vous allez adorer celles prévues par la France !

    Le stade du « libérer-protéger » autour duquel s’articulait la théorie politique d’Emmanuel Macron à ses débuts est largement dépassé. Il s’agit dorénavant de tout fossiliser – les individus, les idées, les initiatives, pour accroître le pouvoir des hommes de gouvernement de « faire notre bien » malgré nous, alors même qu’on sait par expérience historique que ce genre de pouvoir ne génère que malheur, pauvreté, corruption et coercition.

    On peut se moquer des leaders populistes friands d’autoritarisme inlassablement dénoncés par notre Président – dénoncés à raison d’ailleurs – nous avons clairement le même à la maison.  À notre tour maintenant de dénoncer sa dérive liberticide de plus en plus voyante et systémique et d’affirmer que rien, ni la gestion de la pandémie, ni la gestion du terrorisme, ni aucune gestion de quoi que ce soit, n’exige de soumettre nos vies quotidiennes à un état d’exception perpétuel.

    La recherche du bonheur est notre affaire, pas celle de nos gouvernants. Au lieu d’inscrire le climat dans l’article I de la Constitution par pur racolage démagogique, c’est cela qu’il faudrait réaffirmer au fronton de nos institutions politiques.

    Sur le web

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      Cette machine en Lego vous aide à emballer des cadeaux de Noël avec élégance

      Maxime Claudel · news.movim.eu / Numerama · Tuesday, 22 December, 2020 - 12:09

    Cette machine presque intégralement composée de briques Lego découpe un emballage cadeau à la perfection. Un super assistant en cette période de Noël. [Lire la suite]

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      Courses de Noël : attention à ces 3 arnaques qui visent les Français

      Marie Turcan · news.movim.eu / Numerama · Tuesday, 1 December, 2020 - 11:49

    La période des fêtes de fin d'année est une aubaine pour les arnaqueurs. Pour éviter leurs pièges, le meilleur moyen reste de les connaître. Cyberguerre vous présente 3 des scénarios les plus utilisés dans les campagnes de phishing, afin que vous puissiez les reconnaître. [Lire la suite]

    Voitures, vélos, scooters... : la mobilité de demain se lit sur Vroom ! https://www.numerama.com/vroom/vroom//

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