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      Pandémie : l’échec des États, pas de la liberté

      Diego Taboada · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 28 January, 2021 - 04:15 · 6 minutes

    pandémie

    Par Diego Taboada
    Un article de Podcast Liber-thé

    Dès les premières semaines de la pandémie, il y a bientôt un an, bon nombre de commentateurs, par conviction ou intérêt, ont vu dans ce virus la manifestation des « excès du néolibéralisme ». La croissance et le libre-échange auraient engendré le Covid, les frontières ouvertes favorisé sa prolifération et les coupes budgétaires et les politiques « d’austérité » mis à nu les systèmes de santé.

    Un regard rapide en arrière confirme que les épidémies n’ont pas attendu la mondialisation pour sévir. Si un monde globalisé accélère la propagation d’un virus, il ne faut pas oublier qu’il a surtout rendu les sociétés plus résilientes à travers la création de richesses qui a permis l’amélioration des systèmes de santé dans le monde entier.

    De plus, la circulation de l’information a par exemple catalysé le développement de tests et de vaccins à une vitesse record . Les pourfendeurs de la liberté et de l’échange se trompent sur les causes, mais ont toutefois raison quand ils affirment que cette crise met en évidence les limites du système. Non pas celles du libéralisme, mais celles des États, en particulier en Occident.

    L’échec des États, pas de la liberté

    Une année après le début de l’épidémie le constat est clair : les États ont échoué. Tant l’absence de stocks de masques , l’échec systématique du traçage de contacts et les difficultés à mettre en place un processus de vaccination massif ont dévoilé les failles de l’État au grand jour.

    Les confinements généralisés, qui ont été présentés comme une décision courageuse d’un « État qui protège », sont en fait la matérialisation de ses limites . Ils s’imposent comme solution de dernier recours quand on a perdu le contrôle de l’épidémie. C’est un aveu d’impuissance majeur.

    C’est bien la faillite des États comme institution à laquelle nous assistons depuis bientôt une année. Bien qu’ils interviennent dans de plus en plus de domaines de notre vie, ils n’ont manifestement pas été à la hauteur de ce qu’on attendait d’eux. En effet, un État tentaculaire qui croit devoir s’occuper de tout, ne finit par s’occuper de rien. Cet échec met alors en exergue l’impossibilité structurelle pour une seule institution, aussi puissante et monopolistique soit-elle, de prévoir et d’organiser une société de manière centralisée.

    Cet échec est encore plus frappant si l’on considère, à l’instar des mouvements collectivistes, que l’État serait capable de prévoir le temps long, car il serait indépendant des contraintes de court terme qui paralysent les individus et les entreprises. Il n’en est rien.

    Par ailleurs, cette crise a permis de rappeler un problème de fond : les citoyens placent des attentes démesurées en l’État , alors que celui-ci est par essence incapable de remplir les missions en question, ou du moins pas de façon plus efficace qu’une entité privée. En mettant les différents aspects de leur vie (éducation, retraites ou encore santé) dans les mains de l’État, les citoyens ne peuvent qu’être déçus.

    Dans sa critique du projet socialiste et centralisateur, Hayek mettait déjà en cause le principe de planification d’une société . Non pas seulement pour des aspects moraux ou politiques qui vont de soi pour toute personne attachée à la liberté, mais à cause des limites cognitives humaines.

    Peut-on vraiment attendre qu’une poignée de hauts-fonctionnaires ou de ministres anticipe et planifie chaque événement qui pourrait potentiellement surgir ? Comment prétendre être capable d’appréhender l’information dans toute sa complexité ?

    Après tout, les responsables politiques ne sont pas des surhommes éclairés, mais des individus comme les autres. Cette incapacité à réunir les informations nécessaires et représentatives des désirs individuels explique à elle seule pourquoi la préférence pour des solutions centralisées est une approche vouée à l’échec.

    Ainsi, les limites de l’État sont avant tout des limites humaines ; l’arrogance de croire qu’un groupe d’individus est capable de rassembler tout le savoir et l’information qui circulent dans nos sociétés afin de pouvoir la diriger n’est que rarement pointé du doigt.

    Or, comme l’explique Pierre Bentata dans un récent pamphlet , avec la débandade à laquelle on assiste, c’est le mythe de l’État omnipotent et protecteur qui s’effondre. Les responsables politiques ont échoué, car l’État ne peut pas tout.

    La liberté a de beaux jours devant elle

    À première vue, il serait légitime de craindre que la liberté soit toujours davantage remise en question à la suite de cette crise. Elle a en effet beaucoup été restreinte , noyée dans des états d’urgence exceptionnels qui semblent se prolonger sine die . Il est d’ailleurs frappant d’observer comment la liberté est désormais considérée comme un obstacle à la bonne gestion de crise, plutôt que comme la valeur cardinale de nos sociétés.

    Nous subissons probablement les frais de notre lâcheté collective qui a consisté à abandonner la liberté comme projet et comme tradition durant les dernières décennies, comme le dit si bien François Sureau.

    Toutefois, la liberté a de beaux jours devant elle, n’en déplaise à ses critiques. Il y a d’une part fort à parier qu’après avoir été privé de presque toutes nos libertés, nous assistions à un sursaut du désir de liberté que nous chérirons à nouveau à sa juste valeur.

    Par ailleurs, l’événement qui était censé sonner le glas de la mondialisation et du « néolibéralisme », a prouvé son efficacité.

    La course aux vaccins en est un exemple parlant : la mondialisation des échanges a accéléré la transmission des savoirs et la mobilisation des intelligences pour développer un vaccin en moins d’une année. C’est aussi la recherche du profit qui a poussé les entreprises à développer ce vaccin. Une belle illustration de la main invisible : des acteurs privés qui, en cherchant leur propre intérêt, agissent pour le bien de tous.

    Il est alors essentiel de tirer les bonnes conclusions de cette crise. La liberté est au fondement des échanges et de l’esprit d’entreprise. Le « monde d’après » ne doit donc pas consacrer la subordination des individus au service du collectif. Ceux-ci doivent cesser de chercher le salut dans l’action de l’État, car la stratégie du plus d’État est vouée à l’échec.

    Les États modernes doivent au contraire réapprendre à se recentrer sur leurs tâches essentielles de garants des libertés individuelles. Seul un État agile sera capable de faire face aux défis du XXIe siècle.

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      La Loi Ma Santé 2022 ne résoudra pas la crise hospitalière mais l’aggravera

      Bernard Kron · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Saturday, 16 January, 2021 - 04:35 · 4 minutes

    ma santé 2022

    Par Bernard Kron.

    « Que peut-il ? Tout ! Qu’a-t-il fait ? Rien ! »

    Jugeant très insuffisante la réponse du gouvernement à la crise de l’hôpital, 1200 médecins hospitaliers dont 600 chefs de services avaient décidé de démissionner avant la pandémie en 2019. Leur lettre de démission collective avait été rendue publique en conférence de presse. Ces médecins dénonçaient la crise de gouvernance et le manque de personnels. Ils rejoignaient ainsi les mouvements de grèves lancés par les services d’urgences et les internes.

    Le collectif inter-hôpital s’était mobilisé avec les internes pour une grande manifestation le 14 février 2020. La Covid a tout stoppé mais rien n’est réglé et la contestation est repartie avec la grève des praticiens hospitaliers.

    La restructuration des CHU est devenue une urgence

    Les hôpitaux sont sur-administrés et ce budget empêche une réelle revalorisation des carrières. Malheureusement aucune simplification administrative n’est envisagée par le Ségur de la santé.

    Avec le plan 2022 ce sera pire car il ne change pas de cap avec le nouveau Premier ministre Jean Castex responsable de cette situation. Il était aux affaires dès 1996 en inventant la T2A qui imposa aux hôpitaux de travailler à flux tendu.

    Rien n’est prévu pour simplifier l’organisation administrative des régions et des hôpitaux. On renforce au contraire le rôle des ARS (Agences régionales de santé) et des GHT (Groupements hospitaliers de territoire) avec les CPTS ( communautés professionnelles territoriales de santé ).

    L’exemple le plus criant est celui de l’AP-HP, l’Assistance publique de Paris avec onze strates administratives : le nombre d’échelons augmente à chacune des réformes qui vient s’ajouter à la précédente. Elles viennent s’empiler les unes sur les autres sans annuler la précédente et en multipliant encore les agences et instituts de santé qui ont été incapables de gérer la Covid et la vaccination.

    Nombre de chirurgiens devront travailler sur deux établissements. Les urgences chirurgicales vont se disperser un peu plus entre les mains des urgentistes. Si on suit les propositions du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie (HCAAM), influencées par notre collègue Guy Vallancien, cela pourrait se traduire par la création d’établissements de santé communautaires.

    Le nouveau scénario du Ségur pour aller plus vite plus loin et plus fort est un mirage

    « Un problème créé ne peut être résolu en réfléchissant de la même manière qu’il a été créé » disait Albert Einstein.

    Le Ségur de la santé va malheureusement vers le renforcement de la gouvernance, ce qui est un très mauvais choix. Elle consistait déjà ces dernières années à faire évoluer vers les systèmes nordiques notre modèle de système de santé solidaire sans le bouleverser.

    Cette stratégie nous a déjà amenés au bord du gouffre . Trop de postes hospitaliers resteront toujours vacants ou feront l’objet de nouvelles démissions car les primes promises ne régleront pas les problèmes de fond, les salaires trop bas et les plans de carrières obscurs. Nombre de postes resteront pourvus par des médecins n’ayant pas nos diplômes et par des vacataires !

    Cette détérioration aggravera les listes d’attente car de nombreuses pathologies sont en souffrance et vont submerger les services après la crise. La démotivation des équipes entraînait déjà suicides, arrêts de travail, démissions, insatisfaction des usagers, burn-out des soignants et des situations de harcèlement.

    Épuisés ou malades, les personnels sont à bout. En cas de doute, il suffisait pour s’en convaincre d’écouter avant la pandémie mes collègues raconter leur CME ( Commission médicale d’établissement ) ou lire les appels et lettres aux pouvoirs publics pour avoir des moyens de protection.

    Le Ségur de la Santé avec des revalorisations salariales misérables ne calmera pas les esprits. Ce scénario risque d’aboutir à la désintégration.

    « Avec cette pleine puissance, en huit mois un homme de génie eût changé la face de la France… » (Victor Hugo, Napoléon le Petit )

    Les contraintes administratives, la multiplication des agences et le poids technocratique vont aggraver le développement des déserts médicaux paralysant un peu plus l’hôpital de plus en plus en situation de monopole.

    Avec le retard apporté à la prise en charge des pathologies lourdes depuis le confinement, la perte de chance va alourdir la durée et le coût des traitements.

    Alors oui, les demandes des médecins hospitaliers sont totalement justifiées 1

    1. Mon livre sur les blouses blanches à paraitre en mars expliquera comment sortir de cette situation.