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      Comme prévu, l’état d’urgence sanitaire entre dans le droit commun

      Jonathan Frickert · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 24 December, 2020 - 04:30 · 6 minutes

    l’état d’urgence

    Par Jonathan Frickert.

    Ce lundi 21 décembre ne sera malheureusement pas à marquer d’une pierre blanche. À moins d’une semaine du début de la vaccination et alors que le président de la République fêtait ses 43 printemps, le dernier Conseil des ministres de l’année a fait un étrange cadeau de Noël aux Français.

    En vue de préparer la sortie de l’état d’urgence sanitaire le 1er avril prochain, l’exécutif a présenté le projet de loi n°3714 instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires .

    Comme nous l’anticipions depuis plusieurs mois, le gouvernement tente aujourd’hui d’introduire dans le droit commun plusieurs mesures de l’état d’urgence sanitaire, réduisant encore davantage le sort des libertés publiques dans ce pays.

    Le texte part pourtant d’une bonne intention, privilégiant l’incitation et l’anticipation à l’oppression et à la précipitation qui auront marqué cette année 2020.

    Pour pallier cette situation, il pêche toutefois par la rencontre de deux logiques : d’une part, d’un texte global ressort une mesure particulièrement liberticide ; d’autre part, l’entrée dans le droit commun de mesures initialement destinées à rester ponctuelles.

    Des mesures isolées

    Ce texte s’inscrit dans une série de trois lois suivant la même logique et que nous avons dénoncé ici même.

    Début octobre, le projet de loi contre le séparatisme a montré une volonté de l’exécutif de s’attaquer à la liberté scolaire via son article 21, relançant une nouvelle fois la guerre scolaire.

    Un mois plus tard, c’était au tour de la liberté d’information d’être attaquée par le gouvernement avec le projet de loi « sécurité globale », débattu au milieu du mois de novembre, toujours selon la procédure accélérée, introduisant un article 24 objet de nombreuses manifestations depuis un mois.

    Aujourd’hui, c’est bien cet article 1er du texte qui fait polémique.

    L’incitation plutôt que l’obligation

    Pour cause, cet article reprend la promesse élyséenne de non-obligation vaccinale , engagement sans doute destiné à ménager la méfiance des Français envers les vaccins.

    Chose rare pour être saluée, l’incitation a été ainsi été préférée à l’obligation. Elle souffre toutefois d’un problème d’échelle.

    En effet, s’il serait moralement légitime pour une entreprise privée d’accepter ou refuser qui elle souhaite, l’article 1er du texte vise à donner la possibilité au Premier ministre de décider si une personne non vaccinée ou dépistée peut ou non prendre les transports en commun, mais également se rendre dans un établissement privé comme un restaurant, élargissant ainsi les obligations vaccinales déjà en place dans la santé et l’éducation.

    La mesure rappelle fortement la proposition de la députée UDI du Nord Valérie Six de mettre en place un « passeport vert » permettant aux personnes vaccinées de se déplacer librement et qui risque de créer deux classes de citoyens.

    En d’autres termes, vous n’êtes pas obligé légalement de vous vacciner, mais si vous ne le faites pas, vos libertés seront largement restreintes, notamment au regard d’établissements publics pour lesquels vous êtes contraint de fiscalement contribuer.

    La polémique a contraint Olivier Véran à reculer sur cette mesure moins de 24 heures après le début des hostilités.

    Or, comme le notait Margot Arold dès mardi dans nos colonnes, c’est bien la globalité du texte qui vise à étendre les prérogatives gouvernementales.

    L’art de l’anticipation

    La crise sanitaire aura été un incroyable effet de loupe sur le mal français où le gouvernement, pénalisé par son appareil administratif, encadrait et réquisitionnait au mépris du bon sens, entraînant une suite de conséquences économiques, sociales et sanitaires encore mal mesurées.

    Face à son impréparation, le gouvernement a également répondu par la restriction de nos libertés les plus élémentaires : liberté de circulation, liberté de travailler, liberté d’enseignement et liberté de culte en tête.

    Ce projet de loi clôt donc une année où les mesures liberticides ont succédé aux réglementations bureaucratiques.

    Dans ce sens, le projet de loi propose de répondre au manque d’anticipation.

    Toutefois, il souffre d’une absence de bilan de ce qui s’est passé permettant de tirer des conséquences. Le projet de loi répond à chaud à quelque chose qu’il aurait fallu analyser à froid.

    Mieux encore, il pêche par une logique bien connue d’entrée dans le droit commun de mesures initialement ponctuelles.

    L’état d’urgence sanitaire : des atteintes pérennes

    C’est donc bien la pérennisation d’un régime liberticide qui est en jeu ici. Une logique que nous anticipions et dénoncions depuis plusieurs mois sur Contrepoints .

    Difficile en effet de ne pas penser à plusieurs mesures destinées elles aussi à être ponctuelles, mais qui finirent dans le droit commun, que ce soit la CRDS dont la durée de vie a été rallongée en mai dernier jusqu’en 2033 , ou encore la loi de sécurité intérieure de 2017 introduisant dans le droit commun plusieurs mesures controversées de l’état d’urgence antiterroriste dont le texte devait permettre de sortir.

    Dans cette logique, le projet de loi présenté lundi propose l’entrée dans le droit commun de plusieurs mesures ayant essaimé durant cette année. Liberté de circuler soumise à obligation de test et de traitement, extension des procédures d’isolement et de quarantaine ainsi que l‘élargissement des cas de violation du secret médical sont ainsi au rendez-vous.

    Comme dans le cas de l’état d’urgence antiterroriste, la France est désormais vouée à vivre dans un état d’urgence sanitaire permanent.

    Un espoir nommé Montpensier

    Si le libéralisme est, comme toutes les pensées, mouvant sur l’échiquier politique, les libéraux occidentaux sont généralement situés au centre de ce dernier, là où les idéologies les plus autoritaires sont aux marges.

    Il est ainsi étonnant, pour ne pas dire insolite, de voir l’inversion qui s’est opérée cette année. Les plus autoritaires sont désormais au centre, LREM et UDI en tête, tandis que les ailes plus radicales apparaissent, par pur opportunisme, plus libérales, à la manière des populistes, montés au créneau dès lundi soir, mais qui n’auraient sans doute guère fait mieux sinon pire.

    Reste à espérer une censure au moins partielle du texte. Le Conseil constitutionnel ne devrait en effet pas manquer d’être saisi, que ce soit par l’opposition ou par le chef de l’État dans un geste d’apaisement d’une gronde qui ne fait que croître.

    Le siège du Conseil constitutionnel est situé rue de Montpensier, qui doit son nom à un frère de Louis-Philippe, un des rois les plus libéraux qu’ait connu la France.

    Reste donc à espérer que l’institution garante de notre état de droit lui redonne enfin ses lettres de noblesse.

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      Macron offre un état d’urgence sanitaire éternel pour Noël !

      Nathalie MP Meyer · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Thursday, 24 December, 2020 - 04:00 · 6 minutes

    Macron

    Par Nathalie MP Meyer.

    Chers lecteurs, voici venu pour moi le moment d’afficher ma traditionnelle crèche de blog et de vous souhaiter du fond du cœur un très Joyeux Noël 2020. Malgré les restrictions et la morosité ambiante, j’espère que ce sera pour vous l’occasion d’échanges joyeux et chaleureux en famille !

    Pour ma part, je compte faire le vide politique dans ma tête et oublier pour un temps les nombreux tourments de notre actualité. Mais au moment où j’écris ceci, j’ai cependant le cœur lourd car pour Noël, Emmanuel Macron a décidé de nous offrir un état d’urgence sanitaire éternel. Quelle immonde trahison !

    On commençait à se dire qu’avec l’apparition de plusieurs vaccins anti-Covid prometteurs, l’année 2021 signifierait peut-être le retour très attendu à une vie sanitaire, politique, économique et sociale à peu près normale. Mais tout montre hélas que ce sera une vie à peu près normale au sens où on l’entend dans la France d’Emmanuel Macron.

    Souvenez-vous, il y a un an…

    Il y a un an, en décembre 2019, il n’était pas encore question de Coronavirus, ni de masques, ni de gel, ni de confinement, ni de couvre-feux, ni d’état urgence sanitaire, ni de mise à l’arrêt administrative de l’économie, ni d’installation de la grande roue de Lille… sans public .

    Mais le pays était déjà sens dessus dessous et la SNCF était une fois de plus en grève à la veille des vacances de Noël pour protester contre la réforme des retraites concoctée par le gouvernement.

    Quant au gouvernement de l’époque, au-delà de la mesure de fin des régimes spéciaux qui avait motivé le grève – et qui était effectivement souhaitable – il cherchait alors à parachever la collectivisation complète de notre système de retraite en faisant main basse sur les réserves excédentaires des régimes autonomes des pharmaciens, des avocats, etc.

    Le président de la République Emmanuel Macron avait d’ailleurs déjà prouvé mille fois auparavant qu’il n’avait rien d’un grand libéral sur le plan économique – sauf dans la vision hallucinée d’un Jean-Luc Mélenchon ou d’un syndicaliste de la CGT. Et il avait prouvé mille fois de plus qu’il méprisait les libertés civiles tout en se gargarisant de discours sur la France des Lumières qui ne renoncera jamais aux caricatures.

    Belle hypocrisie.

    Macron et les restrictions de libertés en cascades

    Que vaut l’hommage à Samuel Paty , cet enseignant décapité pour avoir utilisé des caricatures du prophète Mahomet dans un cours sur la liberté d’expression, si par ailleurs tout est organisé pour réduire petit à petit et bien souvent sans trop le dire, les degrés de liberté des citoyens dans l’ensemble de leur vie quotidienne ? Il ne vaut rien.

    Or dès octobre 2017, soit quelques mois à peine après son accession au pouvoir, Emmanuel Macron « mettait fin » à l’état d’urgence instauré par François Hollande en novembre 2015 après les attentats terroristes du Bataclan… en intégrant ses dispositions les plus caractéristiques dans le droit commun !

    Dès ce moment, l’orientation du quinquennat était claire : l’État d’abord, les citoyens ensuite.

    Nous avons donc eu droit à une véritable déferlante de restrictions des libertés individuelles : d’abord la loi contre les fake news (2018), puis la loi anti-casseurs  (2019) heureusement censurée par le Conseil constitutionnel, puis la création du Conseil de déontologie journalistique (2019), puis la loi Avia contre la haine en ligne (avril 2020), heureusement retoquée elle aussi par le Conseil constitutionnel, puis le vote contrarié sur la prolongation de l’état d’urgence sanitaire (4 novembre 2020).

    Avec les textes en préparation tels que le projet de loi contre les séparatismes, il est question de réduire la liberté scolaire et de réintroduire des éléments de la loi Avia contre la haine en ligne, et avec le projet de loi de sécurité globale, il est question d’interdire la diffusion d’images des forces de l’ordre dans l’exercice de leurs fonctions au mépris de la liberté de la presse et de la liberté d’informer (le fameux article 24 ).

    Macron, un pas de plus vers toujours moins de libertés

    Et maintenant, Emmanuel Macron fait un pas de plus, un pas de trop, dans sa conception liberticide des libertés : via son Premier ministre Jean Castex, il a déposé avant-hier en fin de journée un projet de loi en procédure accélérée « instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires ». Autrement dit, comme pour l’état d’urgence tout court, il est question d’intégrer l’état d’urgence sanitaire dans le droit commun. Il fallait s’y attendre, c’est la méthode Macron.

    Dans un État libéral comme celui qu’Emmanuel Macron prétend défendre contre les pulsions illibérales de certains pays, la maîtrise médicale prévisible de la pandémie grâce aux vaccins commanderait une seule action : la fin pure et simple de l’état d’urgence sanitaire qui autorise le gouvernement à prendre pratiquement toutes les mesures de restriction qu’il souhaite en matière de déplacements des personnes, activités des entreprises, réquisitions de biens et services et fixation des prix.

    Mais comme l’écrivait Margot Arold hier dans Contrepoints , ce ne sera pas le cas :

    Vous aviez apprécié les mesures mises en place par la Chine ? Vous allez adorer celles prévues par la France !

    Le stade du « libérer-protéger » autour duquel s’articulait la théorie politique d’Emmanuel Macron à ses débuts est largement dépassé. Il s’agit dorénavant de tout fossiliser – les individus, les idées, les initiatives, pour accroître le pouvoir des hommes de gouvernement de « faire notre bien » malgré nous, alors même qu’on sait par expérience historique que ce genre de pouvoir ne génère que malheur, pauvreté, corruption et coercition.

    On peut se moquer des leaders populistes friands d’autoritarisme inlassablement dénoncés par notre Président – dénoncés à raison d’ailleurs – nous avons clairement le même à la maison.  À notre tour maintenant de dénoncer sa dérive liberticide de plus en plus voyante et systémique et d’affirmer que rien, ni la gestion de la pandémie, ni la gestion du terrorisme, ni aucune gestion de quoi que ce soit, n’exige de soumettre nos vies quotidiennes à un état d’exception perpétuel.

    La recherche du bonheur est notre affaire, pas celle de nos gouvernants. Au lieu d’inscrire le climat dans l’article I de la Constitution par pur racolage démagogique, c’est cela qu’il faudrait réaffirmer au fronton de nos institutions politiques.

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