TOURISME - Après le soleil, la grisaille. La haute saison a beau battre son plein en Martinique et en Guadeloupe, le moral des territoires ultramarins est au plus bas. En cause, les nouvelles restrictions de voyages pour les territoires Outre-mer afin de limiter la propagation des variants du coronavirus. “Coup de massue”, “hécatombe économique”... Alors que ces territoires avaient été particulièrement prisés lors des vacances de fin d’année, le contrecoup est aujourd’hui très rude.
En effet, depuis mardi 2 février, de nouvelles conditions de vol à destination des territoires ultramarins sont en vigueur. Ces dernières restrictions imposent des “motifs impérieux” aux voyageurs, en plus des tests PCR négatifs de moins de 72h (les tests antigéniques ne sont plus acceptés) et la septaine obligatoire à l’arrivée .
En Polynésie française par exemple, les voyages touristiques sont suspendus depuis mercredi 3 février. Cette décision devrait porter un nouveau coup dur à l’économie polynésienne dont le tourisme, en grande difficulté, est le premier secteur d’activité, note l’AFP. Le tourisme figurait jusqu’à présent parmi les motifs impérieux qui permettaient de se rendre en Polynésie, afin de préserver son économie. Mais seuls désormais seront acceptés les motifs d’ordre familial, sanitaire ou professionnel, accompagnés de justificatifs.
Les Outre-mer destinations prisées de Noël 2020
Il faut dire que jusqu’ici, certaines îles avaient réussi à tirer leur épingle du jeu. Faute d’avoir pu voyager à l’étranger, les Français en recherche de soleil se sont rabattus vers les territoires français d’Outre-mer pour les fêtes de fin d’année. Le niveau de réservation des compagnies aériennes y “est presque similaire à l’année dernière”, assurait à la mi-décembre Jean-Pierre Mas, président des Entreprises du Voyage, le syndicat représentant les voyagistes français.
“On a un léger frémissement”, confirmait Susan Soba, directrice générale de l’Ile de la Réunion Tourisme, qui affirmait que son île faisait “partie depuis quelques semaines des destinations les plus recherchées” sur internet.
Selon La 1ere , du 15 au 31 décembre 2020, l’archipel guadeloupéen a accueilli plus de 3600 passagers, avec un regain de touristes de moins de 30 ans (plus 10% par rapport à 2019). D’ailleurs, Air France avait renforcé ses offres avec le retour des liaisons Paris Charles de Gaulle /Pointe-à-Pitre ou Fort-de-France en plus des départs depuis Orly, notait le média.
Après une augmentation des réservations de plus 200% à Noël, la destination continuait de progresser avec + 108,4 % de réservations en janvier selon une étude* de PAP Vacances, site de locations saisonnières entre particuliers, repéré par Le Figaro . Dans le détail, La Réunion et la Guadeloupe enregistraient respectivement une hausse 270,0 % et 175,0 % de réservations. La Martinique arrivait après avec + 25,2 %. Des voyages qu’il faut donc désormais annuler pour les prochaines semaines.
“Les départements d’Outre-mer se présentaient comme une bonne destination de report pour les Français, car ils ne pensaient pas que les frontières allaient être fermées”, explique au Figaro Corine Joly, présidente de Pap.fr.
“C’est déjà la fin de la haute saison”
Après avoir cru pouvoir sauver les meubles pendant la haute saison , les professionnels du tourisme des territoires ultramarins accusent désormais le coup.
“La situation est très préoccupante, c’est une catastrophe, se désole auprès du HuffPost François Baltus Languedoc, directeur général du comité martiniquais du Tourisme. Ce dernier nous explique que cette mise en place des “motifs impérieux” est un “deuxième coup de massue”, après celui encaissé à l’annonce des septaines . Des décisions qu’il a dû mal à comprendre alors que le taux d’incidence en Martinique est “l’un des plus bas de France” malgré l’afflux de touristes en décembre et janvier.
“L’annonce de l’autoconfinement pendant sept jours a été le point de départ d’énormément d’annulations de voyage. Mais les ‘motifs impérieux’ ont carrément signé l’arrêt total de la haute saison”, nous explique François Baltus Languedoc. Une saison primordiale, censée durer 5 mois et qui n’aura finalement duré que quatre semaines entre la fin du confinement en décembre et ces nouvelles restrictions de février.
“Aujourd’hui nous n’avons plus que 10% de voyageurs venant de l’Hexagone par rapport à décembre (200 ou 300 par jour contre 2000). Et les projections sont vraiment inquiétantes”, nous assure-t-il. Le directeur du CMT prend pour illustration des estimations qu’il avait fait faire le 1er février pour le mois de février. Le nombre de réservations de billets et d’hôtel était estimé à -69% par rapport à février 2019. Il a redemandé une estimation le 3 février après la mise en place des nouvelles restrictions : elles étaient tombées à -78%.
Impossibilité de se projeter
Selon François Baltus Languedoc, le plus dur est de ne pas pouvoir se projeter, puisqu’aucune date de fin de ces mesures n’a été donnée. “Le préfet de la Martinique a annoncé que cette date de fin serait corrélée avec le nombre de personnes vaccinées sur l’île. Mais d’une part les vaccinations ici se font de façon assez lente et d’autre part il n’y a pas eu de pédagogie sur les vaccins auprès des Martiniquais, ce qui maintient une certaine méfiance sur ce sujet”, regrette notre interlocuteur.
L’ambiance est également morose en Guadeloupe, où l’annonce de la septaine avait abattu les professionnels du tourisme. “Les dernières mesures arrivent comme un coup de massue au moment où les choses commençaient à repartir”, regrette Olivia Ramoutard, 1re vice-présidente de la Fédération du tourisme de proximité en Guadeloupe, auprès du site Outremers360 .
“On est complètement abasourdi. On va avoir beaucoup d’annulations et la prise de commande s’est nettement stoppée”, témoigne de son côté Patrick Vial-Collet, président de la CCI de Guadeloupe.
“C’est un manque à gagner pour nous qui étions déjà dans l’attente de reprendre une activité normale, confie à FranceInfo une commerçante du marché du Diamant en Martinique. Me concernant, c’est vécu comme une hécatombe économique”.
(*) L’étude repose sur 8712 demandes de réservations effectuées entre le 4 janvier et le 31 janvier 2021 via le site PAP Vacances pour la période du samedi 6 février 2021 au 6 mars 2021, comparée à la même période de l’année 2020.
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