TOURISME - Aurons-nous besoin pour nous déplacer, voyager, aller au restaurant ou au musée, d’un passeport vaccinal ? Pascale Fontenel-Personne veut lancer le débat. Dans un courrier adressé au gouvernement, cette députée MoDem de la Sarthe appelle à la création d’un “passeport sanitaire” en France.
“Le Covid est une ultime contrainte, explique celle qui, avant de siéger au Palais Bourbon gérait une entreprise de voyages (voir la vidéo ci-dessus) . Pour en sortir, il faut trouver des arguments et des options, et le passeport sanitaire en est une.”
Son objectif: préparer “une relance rapide et sécurisée de notre économie” et surtout du secteur touristique. “Je suis sollicitée par beaucoup d’opérateurs aujourd’hui pour avoir une vision de la reprise, affirme la co-présidente du groupe “tourisme” de l’ Assemblée nationale . Et je pense que se sécuriser avec un passeport sanitaire en fait partie.”
Pas de vaccin obligatoire
Pas question pour autant de rendre le vaccin obligatoire. “Je crois qu’on peut élaborer d’autres critères que le vaccin, développe-t-elle. Un PCR négatif peut être un critère acceptable, ou bien des gens qui ont déjà eu le Covid et ont encore des anticorps. C’est pour cela que je parle de passeport sanitaire et pas vaccinal.”
L’idée, qui fait débat, serait de conditionner l’accès à certains pays, ou certains lieux, à la réalisation d’un vaccin ou d’un test, par exemple. Pour le moment, la députée, soutenue par François Bayrou, souhaite l’utiliser pour les déplacements des personnes entre la France et l’étranger. “Quand vous voulez en Afrique, vous avez des vaccins qui sont obligatoires, et cela ne pose pas de problème”, donne-t-elle comme exemple.
Le patron de la compagnie aérienne australienne Qantas avait le premier évoqué dès novembre la “nécessité” que les voyageurs internationaux soient vaccinés contre le Covid-19 pour embarquer.
La Suède et la Grèce lancent le débat
En Europe, l’idée fait son chemin. Le 4 février, la Suède a annoncé qu’elle allait développer un certificat électronique de vaccination contre le Covid-19 destiné à voyager et d’autres usages, après une décision similaire du Danemark.
En discussion avec des députés israéliens, espagnols, danois, Pascale Fontenel-Personne souhaite que la France s’inscrive dans un processus plus global. “N’arrivons pas trop tard. Fin juillet ou fin août, si on a suffisamment vacciné, on ne pourrait peut-être pas aller à l’étranger,” prévient-elle.
Au niveau européen, le débat a été lancé mi-janvier sur un certificat de vaccination européen, proposé par la Grèce mais qui suscite les réticences de certains pays face aux risques de discriminations envers les personnes qui ne seraient pas vaccinées.
Mais les incertitudes sur le virus et les vaccins sont nombreuses: efficacité des vaccins, durée de l’immunité, émergence de nouveaux variants... Des “inconnues fondamentales” qui ont poussé les experts de l’OMS à s’opposer mi-janvier “pour le moment” à conditionner l’entrée d’un pays à une preuve de vaccination.
“Prématuré” pour le gouvernement
Les partisans du passeport vaccinal, nombreux dans les secteurs du tourisme et des loisirs, y voient aussi un moyen de “revenir à la vie d’avant”, avec un accès sécurisé aux salles de spectacle, aux restaurants ou aux stades de football.
Décriée par certains comme une atteinte aux libertés, l’idée est pour l’instant jugée prématurée par le gouvernement. Emmanuel Macron avait déclaré, le 22 janvier, qu’il fallait traiter cette question avec “une grande prudence”.
“Nous n’en sommes pas là , avait également indiqué de son côté ministre de la Santé Olivier Véran. Nous sommes seulement dans le démarrage de cette aventure de la campagne de vaccination. ” “Si on parle d’un papier, un document qui vous autorise à voyager en Europe, je crois que c’est très prématuré ”, avait aussi déclaré le 17 janvier dernier Clément Beaune, secrétaire d’État chargé des Affaires européennes.
D’autant que dans un contexte où le nombre de doses de vaccins disponibles dans le monde reste contraint, imposer ce document serait discriminatoire pour tous ceux qui n’y ont pas encore accès.
Atteinte aux libertés?
Autre écueil, le tollé suscité en France par un projet de loi qui envisageait de restreindre l’accès à certains lieux à une vaccination. Il montre que l’acceptabilité d’une telle mesure est problématique. Pour une raison soulevée le 10 février par la ministre de la Culture Roselyne Bachelot a été claire . “Je reste opposée au passeport vaccinal qui me semble une atteinte à nos libertés. L’amoureuse des libertés que je suis a du mal à l’imaginer! Si on en arrivait-là, ce serait un recul”, a souligné la ministre, interrogée dans Télématin sur France 2.
“On a toujours un peu de mal avec l’inconnu, reconnait Pascale Fontenel-Personne. Donc j’envisage qu’il y ait un peu de mal et une adhésion après.”
Plusieurs sondages suggèrent qu’une majorité de la population y serait favorable pour prendre l’avion ou pour les visites à l’hôpital et dans les Ehpad, mais est beaucoup plus partagée pour des situations de la vie quotidienne (transports en commun, accès aux établissements scolaires, aux cinémas ou à son lieu de travail).
“Dans notre pays de liberté et d’expression, je ne suis pas spécialement pour une obligation de rentrer dans les clubs et restaurants, affirme Pascale Fontenel-Personne. Mais si des opérateurs et des acteurs avaient envie de jouer cette partition-là, ils auraient le loisir de le faire.”
À voir également sur Le HuffPost : Le désarroi de cette station de ski familiale face à la fermeture