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      Katalin Kariko sauveuse de l’humanité : 5 leçons d’innovation

      Philippe Silberzahn · ancapism.marevalo.net / Contrepoints · Friday, 12 February, 2021 - 04:35 · 10 minutes

    Katalin Kariko

    Par Philippe Silberzahn.

    Retenez bien ce nom, si vous ne le connaissez pas déjà : Katalin Kariko. De façon sans doute un peu exagérée par des journalistes qui aiment les belles histoires, elle a été qualifiée de « femme qui allait sauver l’humanité » , mais il y a beaucoup de vrai néanmoins.

    Katalin Kariko, une histoire peu banale

    Chercheuse brillante, elle fuit sa Hongrie natale en 1985 car elle manque de moyens et atterrit aux États-Unis. Aujourd’hui à l’Université de Pennsylvanie, elle est l’inventeur du vaccin à ARN messager (ARNm), celui qui va probablement sauver des millions de vies menacées par la Covid.

    C’est une belle histoire comme on aime à les conter, celle de l’inventeur parti de rien, seul contre tous, qui manque de tomber plusieurs fois mais qui se relève et réussit finalement à triompher et connaît enfin la gloire.

    Mais plus prosaïquement, c’est aussi une histoire dont nous pouvons tirer des leçons utiles pour l’innovation, et singulièrement pour notre pays, qui en a bien besoin.

    Good girls go to heaven ; other girls go wherever they want.

    Quelles leçons tirer de l’incroyable aventure de Katalin Kariko ? Bien sûr, celle-ci ne sauve pas l’humanité à elle toute seule. Le vaccin sauve des vies parce que tout un système socio-technico-économique a été mobilisé pour le mettre au point, le financer, le tester, le fabriquer, le distribuer et l’administrer.

    Ce système mobilise des centaines de milliers d’acteurs. Il n’empêche, sans sa détermination et sa conviction chevillée au corps que la technologie à base d’ARN messager était prometteuse, nous serions aujourd’hui démunis face à l’épidémie.

    J’identifie pour ma part cinq leçons.

    Ce n’est pas l’idée qui compte, mais son acceptation

    L’important n’est pas d’avoir une bonne idée, mais de faire accepter cette idée. Katalin Kariko a eu très tôt l’intuition que l’ARN messager était une technologie prometteuse, sans forcément savoir où l’appliquer.

    Cette idée était minoritaire. À l’époque les chercheurs travaillaient sur les modifications d’ADN, solution que Kariko trouvait compliquée et dangereuse. Son opposition lui vaut d’être quasiment licenciée de l’université de Pennsylvanie.

    Heureusement un responsable de la faculté de médecine de la même université la connaît et lui fait confiance ; il lui trouve un poste où elle peut reprendre ses recherches.

    Plus tard, elle s’associera avec la startup allemande BioNTech pour mettre au point le vaccin. Lorsqu’on parle d’entrepreneuriat, mais aussi de découverte scientifique, qui correspondent aux mêmes logiques, on raisonne souvent en termes d’idées : est-ce que mon idée est bonne ? En pensant qu’il suffit d’avoir une bonne idée pour que tout le monde l’accepte.

    C’est une erreur très fréquente, notamment chez ceux qui ont eu une formation scientifique. Ce que cette histoire montre c’est qu’avoir une bonne idée ne suffit pas ; ce qu’il faut c’est convaincre les autres qu’elle vaut la peine d’être poursuivie. Comme disent les Américains : « Salesmanship is part of the game » (la vente fait partie du jeu). Autrement dit, la science, tout comme l’entrepreneuriat, est un exercice social.

    La carrière de nombreux innovateurs a été brisée pour avoir ignoré ce précepte fondamental. Katalin Kariko a réussi parce son travail et sa personnalité ont suscité la confiance d’acteurs-clés, et les a amenés à s’engager dans son projet d’une façon ou d’une autre pour le faire avancer.

    Offrir des voies multiples de succès

    Ce qui a sauvé Katalin Kariko est que face à l’hostilité de ses collègues de l’Université de Pennsylvanie, il s’est trouvé un service dont le responsable croyait en elle et lui a trouvé un job. Un système devient ainsi robuste lorsqu’il offre de multiples portes de sortie ou voies de rattrapage à ceux qui ne cadrent pas avec les croyances du moment.

    Ce fut l’une des grandes forces de l’Europe de l’après XVIIe siècle. Quand un homme, philosophe ou scientifique, était persécuté chez un prince, il pouvait toujours partir trouver refuge chez un autre prince. L’Europe a ainsi constitué une grande foire des idées et des croyances, qui fut source d’innovation et de robustesse, en empêchant une croyance dans un domaine de s’imposer totalement.

    Tous les grands innovateurs questionnent des modèles mentaux dominants, ces croyances profondes qui sont vues par ceux qui les ont comme des évidences, des vérités ne pouvant être questionnées. Sans voies alternatives d’avancée, les innovateurs sont condamnés à aller attaquer ces modèles frontalement, sans pratiquement aucune chance de succès. Les dindes ne votent pas pour Noël.

    Je pense à tous ces innovateurs qui participent aux concours internes de leur entreprise et doivent passer devant un jury de sages, c’est-à-dire de personnes qui doivent leur carrière au système en place, système que les innovateurs viennent questionner.

    Avoir conscience de la limite des grands programmes

    Cette leçon est directement liée à la leçon précédente.

    Il existe un courant important qui prône le développement de grands programmes dits moonshot (viser la Lune), inspiré du fameux programme Apollo de Kennedy.

    Ce courant est très prisé en France. Dès que nous connaissons un échec quelque part, il est question de lancer un grand programme. Nous avons donc pu entendre certains évoquer un Airbus du vaccin .

    Et pourtant, si la réussite de Katalin Kariko montre une chose c’est qu’elle n’est pas le produit d’un grand moonshot mais d’une détermination individuelle à poursuivre une idée.

    Dans son domaine, les grands programmes des années 1990 se basaient sur l’ADN, et c’est sa contestation de ces programmes qui lui a valu ses ennuis. Le principe de ces programmes est d’identifier un problème clair avec une solution tout aussi claire, puis de miser massivement sur sa résolution.

    C’est le propre d’une démarche causale : on fixe un objectif, on choisit une solution, puis on mobilise les moyens pour mettre cette solution en œuvre. Cette approche fonctionne relativement bien pour des objectifs simples et surtout dans un environnement stable.

    Elle est risquée face aux problèmes complexes dans lesquels les paramètres sont si nombreux qu’on ne sait pas à l’avance d’où la solution peut émerger, en l’occurrence dans des situations de rupture où on avance dans l’inconnu. Le programme Airbus tant vanté a réussi parce qu’il ne consistait qu’en un rattrapage de Boeing. Ce n’était pas facile, loin de là, mais la référence d’un tel programme pour des situations de rupture est contre-indiquée.

    Les grands programmes sont également inadaptés lorsqu’on part d’une solution et qu’on cherche un problème. En d’autres termes, lorsque l’objectif n’est pas connu à l’avance, comme ce fut le cas des travaux de Katalin Kariko. Mais au-delà, les grands programmes moonshot ont aussi le défaut de figer a priori à la fois la définition du problème et la solution recherchée, c’est-à-dire de s’enfermer dans un modèle mental figé.

    Ils éliminent de facto toute pensée alternative et ignorent que la révolution industrielle a résulté de l’expérimentation et de la démarche entrepreneuriale par petites victoires menées par des individus en marge du système. Autrement dit, les grands programmes pensent « science dirigée » alors que la réussite de l’ARNm traduit une pensée entrepreneuriale.

    L’incroyable pouvoir de l’intelligence humaine

    Est-il besoin de le préciser, la mise au point et la fabrication du vaccin (en fait de plusieurs vaccins) en un temps record est une prouesse extraordinaire . L’être humain a une incroyable capacité d’innovation pour résoudre les problèmes auxquels il est confronté, même si parfois ceux-ci semblent immenses.

    Faisons ici une sorte de pari de Pascal : plutôt que céder au pessimisme, qui ne nous fait rien gagner, parions sur cette capacité en regardant l’avenir comme infiniment ouvert. Il ne s’agit pas d’être naïvement optimiste – les défis sont nombreux et de taille – mais de reconnaître que le pessimisme nous enferme. Parier sur le génie humain et tout faire pour qu’il s’épanouisse est raisonnable.

    Questionner les modèles mentaux français

    La cinquième leçon est spécifiquement française. Beaucoup a été écrit récemment sur l’échec des entreprises françaises à développer un vaccin. Trop peut-être : un pays ne peut pas tout faire, et tout programme de recherche d’un vaccin ou d’un médicament peut échouer ; ce sont des choses qui arrivent, c’est même le lot des industries pharmaceutiques.

    Néanmoins, il ne fait aucun doute que cet échec devrait être l’occasion d’une prise de conscience de notre pays à propos de l’innovation. Comme en juin 1940, nous pouvons nous complaire dans une recherche de fautes passées et de coupables (version Maréchal Pétain), ou nous pouvons au contraire prendre acte de l’échec et regarder vers l’avenir (version de Gaulle) en nous demandant que faire pour que la prochaine Katalin Kariko soit française, ou à tout le moins qu’elle émerge et réussisse en France ? On pourrait intituler ce travail « opération Marie Curie »: qu’est-ce qui fait que nous avons réussi Marie Curie mais pas Katalin Kariko ?

    Beaucoup d’observateurs ont proposé des pistes d’explication au premier chef desquelles le fameux principe de précaution . Il est certain que celui-ci nous enferme dans une logique infernale dans laquelle le risque estimé est toujours supérieur au bénéfice possible.

    On a évoqué aussi, à juste titre, le salaire misérable des chercheurs en science. Je me souviens d’un ami chasseur de tête, spécialisé dans le débauchage de chercheurs français au profit d’entreprises et d’universités américaines. Il était effaré que ses cibles gagnent moins que son assistante, mais surtout de leur manque criant de moyens financiers et humains et de la stupidité bureaucratique.

    Il y a beaucoup d’autres raisons au marasme français, mais derrière tout cela se sont au final des modèles mentaux bien spécifiques, c’est-à-dire des croyances profondes, qu’il faut aujourd’hui questionner : essentiellement notre pessimisme, notre réflexe systématique à voir le mauvais côté d’une innovation, très souvent fantasmé.

    J’en fais régulièrement l’expérience.

    Lorsque j’évoque les progrès de la robotique, on me répond systématiquement qu’ elle va créer du chômage alors qu’on a depuis longtemps montré le contraire.

    Lorsque j’évoque les progrès de la génétique et de la biologie synthétique, on me répond Frankenstein.

    Nous sommes prisonniers d’un énorme modèle mental de peur du futur, et d’une nostalgie d’une époque dorée qui n’a jamais existé (on pense ainsi que l’on se nourrissait mieux avant). Plus précisément, le futur nous fait peur, et il nous dégoûte. Il ne nous intéresse pas, ou plus.

    Quand j’évoque les incroyables pistes de croissance économique possibles, qui tireront des millions de gens de la pauvreté, on me répond que cela épuise la planète , alors que plus un pays est riche, plus il est écologiste. Il s’agit de changer la façon dont nous voyons l’avenir et dont ceux qui contribuent à le créer sont considérés et reconnus dans la société.

    En bref, l’échec face au vaccin devrait être l’occasion d’un sérieux examen de conscience, mais comme l’a montré le traumatisme de 1940, cet examen peut nous conduire dans des directions fort différentes, le repli ou le sursaut. Nous n’avons aucun péché à expier ni traître à démasquer et à punir.

    Nous avons à tirer les leçons d’une situation regrettable, et nous convaincre que le futur est à nous si nous savons nous en emparer. Faute de quoi ce sont les autres qui le feront et il nous restera plus qu’à devenir un grand parc de conservation de la vie d’avant.

    Sur le web

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      Covid: entre le gouvernement et des cabinets de conseil, 11,3 millions d'euros de contrats

      AFP · news.movim.eu / HuffingtonPost · Wednesday, 10 February, 2021 - 20:56 · 2 minutes

    Un logo du cabinet de conseil McKinsey & Company (Photo Illustration by Rafael Henrique/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)

    CONSEIL - Le ministère de la Santé a passé pour 11,3 millions euros de contrats avec des cabinets de conseil depuis le début de la crise du covid-19 , selon des chiffres dévoilés ce mercredi19 février par une députée sur fond de polémique sur le recours de l’Etat à ces cabinets privés.

    28 contrats ont été signés entre mars 2020 et janvier 2021 pour un total de 11,353 millions d’euros avec sept cabinets de conseil dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire liée au covid-19, a détaillé la députée LR Véronique Louwagie confirmant des informations déjà dévoilées par le site Politico .

    Véronique Louwagie, qui intervenait en commission des finances de l’Assemblée nationale dans le cadre de sa mission de contrôle, se fonde sur des chiffres transmis par le ministère de la Santé.

    Ces montants concernent le seul périmètre de la “protection des populations” au sein de la nomenclature budgétaire et n’excluent pas d’autres contrats potentiellement passés au titre de Santé Publique France par exemple.

    C’est le cabinet américain McKinsey qui se taille la part du lion avec un total d’environ quatre millions d’euros de contrats passés avec l’avenue de Ségur. L’un d’entre eux portant sur “l’accompagnement dans la stratégie cible visant à doter l’ensemble du territoire français des doses de vaccins” s’élèvent à 3,2 millions d’euros, selon les chiffres rapportés par la députée.

    “A titre personnel, le recours à des cabinets de conseil ne me choque pas”, a fait valoir la députée de l’Orne. “En revanche ce qui me gêne c’est la fréquence et le montant”, a-t-elle poursuivi.

    “Il y a des opérations qui auraient pu relever de l’administration de la Santé (...) cela ne va pas de soi même en temps de crise”, a ajouté Véronique Louwagie qui estime que “l’Etat s’est désarmé en matière sanitaire”.

    En janvier, plusieurs médias avaient souligné que le cabinet de conseil privé McKinsey and Compagny avait été engagé pour épauler le gouvernement dans sa stratégie de vaccination et sa logistique, provoquant un début de polémique et suscitant des réactions indignées des oppositions.

    Mardi dans l’hémicycle, le ministre de la Santé Olivier Véran a de nouveau justifié le recours à ces cabinets de conseil rappelant que les gouvernements ont de longue date fait appel à ces sociétés, quelles que soient les majorités.

    Les règles “sont évidemment respectées”, a répondu le ministre au député communiste Pierre Dharréville.

    À voir également sur Le HuffPost: Covid: Castex explique pourquoi un troisième confinement est à nouveau écarté

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      Avec le vaccin, la fin du masque? Pourquoi on ne peut toujours pas l'affirmer

      Grégory Rozières · news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 5 February, 2021 - 13:38 · 7 minutes

    SCIENCE - Un an après son émergence, le coronavirus continue de ravager la planète. Mais grâce à la science, l’humanité commence à entrevoir le bout du tunnel avec l’arrivée de plusieurs vaccins efficaces contre cette maladie.

    Début février, un seuil très symbolique a été atteint: le nombre de personnes vaccinées a dépassé celui des cas confirmés de Covid-19 , avec plus de 100 millions de doses administrées. La route est encore longue et semée d’embuches, entre les pénuries de vaccins et l’apparition de variants du Sars-Cov2 qui pourraient diminuer l’immunité, mais l’espoir est bien là.

    Il n’est pour autant toujours pas possible d’affirmer qu’une fois vaccinés, nous pourrons tomber le masque et faire la bise comme si de rien n’était. Notamment en raison d’une inconnue: le vaccin, s’il empêche efficacement la maladie Covid-19 de se développer, permet-il également de bloquer la transmission? En clair, une personne vaccinée peut-elle être infectée par le coronavirus, rester asymptomatique, mais contaminer son entourage?

    S’il est aujourd’hui impossible de répondre avec certitude à ces questions, c’est parce que l’urgence était avant tout de développer des vaccins empêchant les formes graves du Covid-19. Les laboratoires n’ont donc pas spécialement étudié cette question de la transmissibilité chez les personnes vaccinées. De récentes données sont encourageantes, mais doivent être relativisées. Car même si les bonnes nouvelles se confirment, il n’est pas dit que cette immunité bien particulière, que l’on appelle muqueuse, dure très longtemps.

    Signaux encourageants

    Commençons par les espoirs, qui sont encore très légers et devront être confirmés. Dans l’essai clinique du vaccin Moderna, les participants ont réalisé un test PCR juste avant la seconde dose. Il y avait 66% de personnes positives mais asymptomatiques (donc contagieuses) de moins chez les participants ayant bénéficié d’une première dose de vaccin que chez ceux ayant reçu le placebo.

    Dans des données complémentaires de l’essai clinique d’AstraZeneca publiées le 1er février (mais pas encore validées par des pairs), le nombre d’asymptomatiques est assez proche entre ceux ayant reçu le vaccin ou le placebo. Au global, le nombre de personnes positives par PCR est par contre beaucoup plus faible chez les vaccinés: 28 contre 84, soit une efficacité de 67%.

    Ce qui n’est pas obligatoirement une mauvaise nouvelle. Imaginons que le vaccin permette au coronavirus de se développer dans notre nez et notre gorge tout en l’empêchant de descendre plus profondément dans l’organisme et d’entraîner la maladie Covid-19. Alors que le nombre de cas avec symptômes baisse, on aurait du voir proportionnellement plus d’asymptomatiques parmi les vaccinés. Ces chiffres sont intéressants, mais encore trop limités pour en tirer des conclusions définitives. D’ailleurs, l’efficacité après la deuxième dose pour AstraZeneca n’était plus que de 49,5%.

    D’autres données du monde réel commencent à être disponibles, par exemple en Israël où une part importante de la population, notamment âgée, est vaccinée. Une récente étude en condition réelle semble confirmer l’efficacité du vaccin pour réduire les infections en général et l’évolution des cas est positive dans le pays. “Mais le pays est actuellement sous confinement, avec une propagation limitée, ce qui peut fausser les données”, pondère Morgane Bomsel, spécialiste en virologie à l’Institut Cochin interrogée par Le HuffPost . Le confinement sera progressivement levé dans l’Etat hébreu à partir de ce dimanche 7 février.

    Une durée hypothétique

    Encore une fois, ces données demeurent incomplètes et doivent être vérifiées via diverses études sur plusieurs terrains. D’abord pour savoir si le nombre d’asymptomatiques diminue bien grâce au vaccin, mais surtout à quel point.

    Et même si d’aventure les nouvelles sont bonnes, reste une grande question: pour combien de temps? De manière générale, la durée de l’efficacité des vaccins est encore floue. Mais la plupart des scientifiques, au vu de l’immunité naturelle conférée après une forme de Covid-19, tablent sur plusieurs mois a minima .

    Le problème, c’est que l’efficacité pour bloquer la transmission pourrait durer moins longtemps. Pour comprendre, il faut rappeler que notre système immunitaire fonctionne en deux partie assez distinctes. D’un côté, l’immunité systémique, globale. Ce sont les anticorps qui circulent majoritairement dans le sang, notamment les IgG. Ce sont eux qui empêchent le coronavirus d’infecter les poumons et d’entraîner une forme grave de la maladie Covid-19.

    Mais il y a une autre immunité, muqueuse, qui fonctionne différemment ( plus de détails dans notre article consacré au vaccin muqueux ou nasal ). Ce sont des anticorps spécifiques, les IgA, qui se situent au niveau de toutes nos muqueuses: nez, bouche, intestin, etc. Ce sont ces cellules qui empêchent le coronavirus de nous infecter tout court, en l’empêchant de pénétrer nos cellules au niveau du nez et de la gorge. En clair, l’immunité muqueuse (IgA) bloque la porte d’entrée de notre corps, l’immunité systémique (IgG) bloque l’accès à la salle aux trésors (notre poumon).

    Et les vaccins actuels, encore une fois, sont avant tout réalisés pour empêcher les formes graves. “Avec un vaccin injecté en intramusculaire, on aura une réponse immunitaire au niveau des muqueuses de courte durée, alors que la réponse systémique va durer plus longtemps”, explique Morgane Bomsel.

    Étude française en cours

    “A ce stade, on ne sait toujours pas si les vaccins autorisés en urgence interfèrent avec notre transmission au long terme. Qu’il y ait un effet sur la transmission est probablement transitoire”, abonde Cecil Czerkinsky, directeur de recherche INSERM, immunologiste des muqueuses et spécialiste des vaccins interrogé par Le HuffPost .

    Mais pourquoi? Quand on vous injecte un vaccin contre un organisme que vous n’avez jamais rencontré au niveau des muqueuses, votre organisme va apprendre à créer les anticorps permettant de répondre au virus. Mais tout cela se passe au niveau de l’immunité systémique, pas au niveau des muqueuses. Or, pour empêcher une infection asymptomatique, et donc la transmission, il faut des anticorps au niveau de la porte d’entrée, donc dans les muqueuses. “Quand vous avez une forte réponse systémique, il y a une faible diffusion dans les muqueuses, mais transitoire”, explique Cecil Czerkinsky, qui ne table pas sur une immunité muqueuse de plus de quelques semaines suite à une injection de vaccin.

    Pour en avoir le cœur net, le chercheur a lancé avec son équipe une étude pour analyser la réponse immunitaire muqueuse et systémique de personnes ayant reçu le vaccin. Vont également être testées des personnes vaccinées alors qu’elles ont été infectés par le coronavirus auparavant. Ici, les choses pourraient être différentes, espère le chercheur: “est-ce qu’après une vaccination chez un individu qui a déjà le système muqueux sensibilisé par une infection antérieure, l’injection intramusculaire peut stimuler la réponse muqueuse?” L’idée ne vient pas de nulle part: son équipe ainsi que d’autres groupes de chercheurs ont déjà montré ce mécanisme dans le cadre de la lutte contre la polio.

    Si c’est le cas pour le coronavirus, cela confirmerait l’hypothèse défendue par Cecil Czerkinsky: pour bloquer la transmission et avoir une chance d’éradiquer la maladie, il faudrait une combinaison de vaccins muqueux (voie nasale) et de vaccins à injection. Les premiers résultats devraient être connus dans trois mois. D’ici là, les données sur l’efficacité des vaccins pour bloquer la transmission seront certainement plus claires.

    A voir également sur Le HuffPost : Des vaccins à 90% efficaces, ce que ça veut dire...et surtout pas dire

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      Combiner les vaccins d’AstraZeneca et Pfizer ? Une étude se lance dans cette voie

      Marcus Dupont-Besnard · news.movim.eu / Numerama · Friday, 5 February, 2021 - 10:13

    Une étude britannique est lancée ce 4 février 2021 pour tester l'efficacité et la sécurité d'une combinaison entre une dose du vaccin de Pfizer et une dose de celui d'AstraZeneca contre le coronavirus SARS-CoV-2. [Lire la suite]

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      En Europe, la Serbie est l'autre championne de la vaccination anti-Covid

      AFP · news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 5 February, 2021 - 08:04 · 4 minutes

    À Belgrade, un immense centre de vaccination a été installé pour faciliter la vaccination de masse, en grande partie avec le vaccin chinois contre le Covid-19 (Photo prise le 4 février 2021 par Andrej ISAKOVIC / AFP)

    INTERNATIONAL - Sous le dôme géant de la foire de Belgrade, des dizaines d’infirmières en combinaison de protection vaccinent à tour de bras jeunes et moins jeunes avec une efficacité redoutable: la Serbie est la championne de la vaccination anti-Covid de l’Europe continentale.

    Dans le petit pays des Balkans de sept millions d’habitants, plus de 450.000 personnes ont reçu une dose en l’espace de deux semaines, soit le deuxième taux de vaccination des pays européens après le Royaume-Uni, d’après la publication scientifique Our World in Data .

    Dans l’Union européenne, les campagnes vaccinales se heurtent à des retards logistiques et aux controverses mais la Serbie fait la course en tête, tournée vers l’Est et les fabricants chinois et russe.

    Sur le site gouvernemental dédié, les gens sont invités à cocher des cases pour dire leurs préférences. Pfizer, Spoutnik V et Sinopharm figurent actuellement au menu. Mais la part du lion revient au produit chinois. Un million de doses sont arrivées à la mi-janvier, permettant le lancement d’une campagne vaccinale massive.

    Le président Aleksandar Vucic, figure populiste qui n’aime rien mieux que se dépeindre sous les traits du capitaine à la barre dans la tempête, a expliqué la réussite vaccinale de son pays par ses amitiés personnelles et prouesses diplomatiques.

    Il a ainsi assuré, sans autre précision, avoir arraché “un bon accord” au géant pharmaceutique chinois. “J’ai écrit à Xi Jinping en octobre et le prix a été considérablement abaissé”, a-t-il dit à propos du président chinois. “Quand vous verrez le prix, vous ferez construire un monument à ma gloire”.

    “Sauver la Serbie”

    Quand ils se présentent dans le centre de vaccination de Belgrade, les gens s’entretiennent brièvement avec un médecin, puis ils suivent un fléchage rouge au sol jusqu’aux cabines où ils reçoivent la piqûre. Le tout prend à peine 15 minutes qui s’ajoutent à un bref moment de surveillance post-injection.

    Dans un pays en général pas avare en bureaucratie, l’efficacité de cette campagne nationale en a surpris plus d’un. “Tout le monde savait exactement ce qu’il avait à faire, il y avait assez de personnel, ils étaient tous gentils”, raconte à l’AFP Snezana Krivokapic, 38 ans, chargée de relations publiques, après avoir reçu son injection.

    Résultat, 7,5 doses ont été administrées pour 100 habitants, contre 2,5 en France ou 3,2 en Allemagne, selon Our world in data.

    Outre les vaccins chinois, la Serbie a également reçu plus de 30.000 doses de l’américano-allemand Pfizer-BioNtech et 40.000 du russe Spoutnik V . Belgrade recevra de ses “amis” un million de doses supplémentaires avant mars, selon Aleksandar Vucic.

    Comme le résumait en Une un tabloïd pro-gouvernemental: “Vucic, Poutine et Xi sont en train de sauver la Serbie”.

    Dans le même temps, l’UE est accusée d’avoir tourné le dos à ses voisins des Balkans occidentaux dans la course aux vaccins. Hormis l’Albanie, la Serbie est le seul pays de la région à avoir commencé à vacciner grâce à ses propres accords avec les groupes pharmaceutiques.

    Une coopération avec la Chine… avec quelles contreparties?

    Les autres pays des Balkans occidentaux, restés à l’écart du lancement en décembre des campagnes dans l’UE, attendent toujours les doses promises dans le cadre de Covax, un dispositif destiné à fournir des vaccins aux pays les plus défavorisés.

    La Chine et sa “diplomatie du vaccin” sont vantées par les autorités et dans les médias, rappelant les débuts de la pandémie. Sous l’œil des caméras, la Serbie avait alors déroulé le tapis rouge aux médecins chinois débarquant à l’aéroport de Belgrade pour prodiguer leurs conseils, accompagnés de masques et autres équipements.

    Cette mise en scène dramatique avait pu éclipser les centaines de millions d’euros injectés de longue date par Bruxelles dans le secteur serbe de la santé.

    La Serbie est candidate à l’UE mais joue des influences rivales de l’Est et de l’Ouest dans la région. Ces dernières années, elle a opéré un rapprochement remarqué avec la Chine, devenant une tête de pont de l’influence du géant asiatique en Europe.

    Mais au fil des prêts, la dette serbe envers Pékin a enflé, si bien que l’analyste serbe Stefán Vladisavljev se pose des questions sur les contreparties éventuelles au vaccin chinois. “Vu la nature de leur coopération cette dernière décennie (…) on peut se dire que la Serbie a fait quelques calculs pour obtenir ces livraisons”, dit-il à l’AFP.

    Dans l’UE, la Hongrie est le seul pays à avoir donné son feu vert aux vaccins chinois et russe considérés avec méfiance en Occident en raison du manque de transparence de leurs développeurs et de données cliniques.

    En attendant, à la foire de Belgrade, la médecin Dragana Milosevic explique que jusqu’à 2000 personnes par jour ont été vaccinées sans problème. “Il n’y a eu absolument aucun effet indésirable pour l’instant”.

    À voir également sur Le HuffPost: Covid-19: Comment cet emoji est devenu le symbole des pro-vaccins

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      "Inquiète" sur les variants du coronavirus, l'OMS appelle à vacciner plus vite en Europe

      AFP · news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 5 February, 2021 - 06:33 · 4 minutes

    CORONAVIRUS - Le patron de l’OMS en Europe a appelé ce vendredi 5 février les Européens à accélérer leur campagne de vaccination contre le Covid-19 , dans un entretien à l’AFP.

    “Nous devons unir nos forces pour accélérer la vaccination”, a appelé le directeur régional de l’organisation Hans Kluge, reconnaissant être “inquiet” sur l’impact des variants sur l’efficacité des vaccins.

    “Des entreprises pharmaceutiques d’habitude concurrentes doivent unir leurs efforts pour augmenter drastiquement les capacités de production, c’est de ça dont nous avons besoin”, a insisté le responsable basé à Copenhague, alors que la campagne de vaccination dans l’Union européenne a connu des débuts difficiles, seuls 2,5% de la population de l’UE ayant reçu une première dose.

    Aux États-Unis, après Pfizer/BioNTech et Moderna, un troisième vaccin, celui de Johnson & Johnson, attend le feu vert de l’Agence américaine du médicament (FDA).

    Ce vaccin est particulièrement attendu car il présente deux avantages non négligeables: il peut être stocké à des températures de réfrigérateur plutôt que de congélateur, et il ne s’administre qu’en une seule dose.

    Johnson & Johnson s’est engagé à acheminer 100 millions de doses aux États-Unis avant fin juin. Selon les premiers résultats des essais cliniques qu’il a communiqués, son vaccin est efficace à 66% dans l’ensemble, et à 85% pour prévenir les formes graves de la maladie.

    Mais ces résultats ont aussi soulevé une inquiétude: le remède était plus efficace aux États-Unis (72%) qu’en Afrique du Sud (57%), où un variant apparu dans ce pays y est devenu largement majoritaire.

    Les experts y voient l’indication que de futurs variants pourraient finir par totalement contourner les défenses immunitaires développées par les vaccins actuels. “C’est la grande question. Je suis inquiet”, a reconnu Hans Kluge, interrogé pour savoir si les vaccins anti-Covid arrivés sur le marché depuis décembre vont rester efficaces contre les nouveaux variants.

    L’UE vise 70% de vaccinés d’ici l’été

    Partout dans le monde, commandes et livraisons de vaccins s’accélèrent.

    L’Iran, où le coronavirus a fait plus de 58.000 morts, a reçu jeudi ses premières doses du vaccin russe Spoutnik V. Le même vaccin russe, commandé par l’Autorité palestinienne, est arrivé jeudi en Cisjordanie. Le Pérou, un des pays d’Amérique latine les plus endeuillés (plus de 41.500 morts) a commandé 20 millions de doses du vaccin de Pfizer.

    Bien qu’elle affirme être exempte du virus, la Corée du Nord a fait une demande de vaccins contre le Covid-19, dont elle devrait recevoir près de deux millions de doses. Il s’agit de la première confirmation officielle que Pyongyang a demandé une aide internationale.

    L’Union européenne, critiquée pour la lenteur de ses campagnes de vaccination , ambitionne de vacciner 70% de sa population d’ici l’été, a affirmé jeudi la présidente de la Commission Ursula von der Leyen.

    Pour autant, “il y aura certainement d’autres obstacles, d’autres problèmes dans la production, nous devons aussi nous préparer à d’éventuelles pénuries de matières premières ou de certains composants des vaccins”, a-t-elle prévenu.

    “Passeports vaccinaux”

    La Suède et le Danemark ont annoncé jeudi qu’ils allaient développer des “passeports vaccinaux” électroniques pour faciliter les voyages à l’étranger, mais aussi pour accéder à des évènements sportifs ou culturels, voire à des restaurants dans le cas danois.

    “Avec un certificat de vaccination numérique, il sera rapide et facile de prouver une vaccination complète”, a plaidé le ministre suédois du numérique Anders Ygeman. La Suède compte lancer son passeport en juin, et le Danemark “d’ici trois ou quatre mois”, selon son gouvernement.

    “Il est absolument crucial pour nous de pouvoir redémarrer la société danoise, que les entreprises reviennent sur les rails”, a souligné le ministre danois de la Fiscalité Morten Bødskov.

    Plusieurs pays ont annoncé jeudi de nouveaux durcissements de leurs restrictions liées aux voyages. Le Royaume-Uni a confirmé jeudi que ses résidents arrivant de pays jugés à risque devront observer dix jours de quarantaine à l’hôtel, à partir du 15 février. Et à l’instar de l’Arabie saoudite, le Koweït a suspendu l’entrée des étrangers dans le pays pour deux semaines.

    Alors que près de 105 millions de doses de vaccin ont jusqu’ici été injectées dans au moins 82 pays ou territoires, la Croix-Rouge s’est alarmée jeudi du manque d’accès des pays pauvres aux vaccins.

    Selon une analyse de l’organisation, près de 70% des doses de vaccin administrées jusqu’à présent l’ont été dans les 50 pays les plus riches tandis que 0,1% ont été injectées dans les 50 pays les plus pauvres

    “C’est alarmant parce que c’est injuste, et parce que cela pourrait prolonger, voire aggraver, cette terrible pandémie”, a commenté le secrétaire général de la FICR, Jagan Chapagain. La Croix-Rouge a lancé un plan de 92,5 millions d’euros pour aider à immuniser 500 millions de personnes parmi les plus vulnérables.

    Selon un bilan établi jeudi par l’AFP à partir de source officielle, la pandémie a fait au moins 2.269.346 morts et plus de 104.350.880 cas de contamination.

    À voir également sur Le HuffPost: Chez Pfizer, ces élus demandent de “libérer les brevets” sur les vaccins anti-Covid-19

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      Covid-19: la stratégie vaccinale européenne, un fiasco de plus?

      Anthony Berthelier · news.movim.eu / HuffingtonPost · Friday, 5 February, 2021 - 02:49 · 8 minutes

    La stratégie vaccinale européenne, un fiasco de plus? (photo d

    POLITIQUE - Opération de sauvetage en prime time. Emmanuel Macron s’est invité dans le salon des téléspectateurs du journal télévisé de TF1, mardi 2 février vers 20h30, à la surprise générale . L’occasion pour le chef de l’État d’insister sur le rôle central joué par les Français dans le contrôle de l’épidémie de coronavirus ... mais surtout de monter au créneau pour défendre la stratégie vaccinale européenne.

    Un quart d’heure avant, c’est Angela Merkel qui apparaissait sur une chaîne de télévision allemande pour y donner une rare interview. Un moment aussi inattendu que la prise de parole de son homologue français puisqu’il ne figurait pas aux programmes du média outre-Rhin. Comme le président français, la chancelière allemande s’est attelée à répondre aux inquiétudes de son opinion publique sur les lenteurs de l’acquisition et du déploiement des vaccins sur le continent.

    Trois jours plus tard, ce vendredi 5 février, les deux dirigeants tiennent une conférence de presse commune en marge d’un conseil de défense franco-allemand. Nul doute que les débats sur l’efficacité de Bruxelles dans cette crise sanitaire reviendront sur le tapis.

    Car si certains continuent de saluer des avancées “historiques”, notamment en matière de politique économique, la petite musique qui monte n’est pas franchement flatteuse à l’égard de l’Union européenne.

    Pluie de critiques sur Bruxelles

    En Allemagne, c’est le quotidien Bild , le plus lu du pays, qui sonne la charge en qualifiant régulièrement la stratégie vaccinale de l’UE de “fiasco”. Et les critiques remontent jusqu’au gouvernement d’Angela Merkel. Dans un entretien publié lundi 1er février par le Süddeutsche Zeitung , le très puissant vice-chancelier et ministre des Finances, Olaf Scholz (SPD) accuse directement la Commission européenne d’être responsable du manque de doses de sérums.

    “Concernant l’achat des vaccins, c’est la Commission qui a négocié. Or, si la Commission nous avait demandé plus de moyens financiers, nous aurions donné l’argent nécessaire”, a-t-il fait valoir, quand, de l’autre côté du spectre politique, le président de l’Union chrétienne-sociale (CSU) en Bavière Markus Söder -souvent cité comme possible successeur à Angela Merkel- fustigeait, vendredi 29 février sur la chaîne ZDF des”procédures bureaucratiques typiquement européennes.”

    La Commission européenne a mis quelques jours avant de prendre la dimension de la crise qui était devant nous. La présidente n’en avait clairement pas mesuré l’ampleur.” Édouard Simon, chercheur à l'Iris, spécialiste des questions européennes.

    Accords trop tardifs, déficit d’investissement financier, manque de doses, manque de transparence... les reproches faits à l’exécutif européen , qui a négocié les contrats avec les fabricants de vaccins au nom des 27 États membres et sécurisé plus de 2,2 milliards de doses -pour 450 millions d’Européens- sont nombreux.

    Il faut dire que les pays de l’Union souffrent de comparaisons avec le Royaume-Uni. Outre-Manche, 15% de la population a déjà été piqué, quand, au 15 janvier dernier, seul 1% des Européens avait reçu le sérum, selon un décompte de l’OMS. “Je comprends la déception” de la population, a même fini par admettre Angela Merkel, lundi 1er février, “car tout le monde a pensé qu’au vu des volumes de commandes” de vaccins, ces derniers “allaient arriver beaucoup plus vite”.

    Un problème von der Leyen?

    D’autant que ces critiques visant Bruxelles ne sont pas franchement nouvelles. Les atermoiements du début de la pandémie, quand des Italiens, s’estimant abandonnés par Bruxelles brûlaient des drapeaux européens, continuent de laisser des traces. “La Commission européenne a mis quelques jours avant de prendre la dimension de la crise qui était devant nous. La présidente n’en avait clairement pas mesuré l’ampleur”, se souvient Édouard Simon, spécialiste des questions européennes, ajoutant immédiatement: “mais qui l’avait fait?”

    Au final, cette première crise n’a duré que “quelques jours” au printemps dernier, selon les mots du Directeur de recherche à l’IRIS, l’institut de relations internationales et stratégiques. Mais elle a entraîné des images dramatiques pour la solidarité européenne, lorsque la France et l’Allemagne interdisaient, par exemple, toute exportation de matériel médical à destination de l’Italie le pays du continent le plus touché par le covid-19 à l’époque.

    Depuis, les critiques n’ont guère cessé que pour l’adoption du plan de relance colossal commun. Presque un an plus tard, une personnalité politique concentre nombreux de ces griefs: Ursula von der Leyen , la présidente de la Commission européenne.

    “Le principal problème de la présidente de la Commission, c’est de trop vouloir coller au couple franco-allemand. On aurait besoin d’une Commission européenne qui reprenne sa spécificité institutionnelle, qui reprenne l’initiative politique”, nous explique Édouard Simon en évoquant “un sentiment qui se déploie de plus en plus” à Bruxelles.

    La réponse de l'Union européenne sur le plan économique a été beaucoup plus satisfaisante que sur le plan sanitaire." Édouard Simon, chercheur à l'Iris, spécialiste des questions européennes.

    Mais c’est surtout le dernier “pataquès” autour de l’exportation de vaccin en Irlande du Nord qui vient ternir l’image de l’ancienne ministre allemande de la Défense. Confrontée à des retards de livraisons du vaccin du laboratoire AstraZeneca, l’UE a mis sur pied un mécanisme pour contrôler les acheminements hors de l’UE des vaccins contre le Covid qui y sont produits et interdire les exportations non “légitimes”. Avant d’y renoncer face au tollé de Londres et Dublin.

    Plan de relance, mécanisme d’urgence...

    “Cette décision revenait à mettre en place une frontière avec l’Irlande du Nord. C’était une grosse erreur”, avance Édouard Simon en regrettant la réaction d’Ursula von der Leyen: rejeter la responsabilité sur ses services, ce n’est pas du très bon management. Et c’était politiquement mal venu.”

    Dans une tribune au vitriol publiée lundi 4 janvier sur Le HuffPost , le spécialiste des questions européennes Patrick Martin-Genier estime même que la question de son maintien à la tête de l’exécutif européen pourrait se poser. “Affaiblie, cherchant à cacher ses échecs, certains estiment qu’elle n’était pas de taille pour exercer ces fonctions alors qu’Emmanuel Macron recherchait une personne ayant exercé les plus hautes responsabilités”, croit savoir le spécialiste, enseignant de droit public à l’Institut d’études politiques de Paris.

    En attendant, pour bon nombre de ces spécialistes, les difficultés de l’Union à établir une stratégie sanitaire incontestée ne doivent pas occulter d’autres avancées majeures réalisées pendant cette pandémie. Le plan de relance, salué de toutes parts, en est une... mais il n’est pas seul.

    “La réponse de l’Union européenne sur le plan économique a été beaucoup plus satisfaisante que sur le plan sanitaire”, estime Édouard Simon. “Les flux de denrées alimentaires n’ont jamais cessé. L’union a adopté en urgence un plan de fonctionnement du marché intérieur en période de crise, ce qui n’existait pas auparavant”, se félicite le chercheur en évoquant également des “délais remarquables” pour la suspension du pacte de stabilité et le déblocage des aides.

    Et l’après covid?

    Mais au-delà de ces mesures d’urgence, le tournant le plus important est presque d’ordre philosophique. Car si l’annonce du plan de relance commun à tous les pays de l’Union européenne a déjà été décrite comme “historique” par les europhiles, sa concrétisation promet un changement de paradigme dans les politiques économiques menées par Bruxelles.

    “Ce n’est pas la première fois que les 27 s’endettent ensemble. Mais dans ces proportions, cela va lier leur avenir pour les vingt, trente prochaines années”, nous explique Édouard Simon. “On ne va pas s’attaquer uniquement aux effets du premier confinement, on va s’attaquer aux déséquilibres qui existaient avant la pandémie de coronavirus”, ajoute le chercheur qui entrevoit un “changement fondamental dans l’économie européenne” si cette stratégie se confirme dans le temps.

    “On accepte le fait que la crise de la zone euro a des causes structurelles. Et qu’on va s’évertuer à les corriger non pas avec des politiques d’austérité comme nous l’avons imposé à la Grèce, mais par des politiques d’investissement”, se réjouit encore Édouard Simon.

    Une nouvelle approche qui n’aurait pas pu s’amorcer sans le revirement de la chancelière Merkel au printemps dernier, les Allemands ayant “compris que la survie de la construction européenne était en train de se jouer.”

    Plus globalement, le choc du coronavirus a, semble-t-il, créé le terreau favorable à cette nouvelle solidarité européenne. Comme le montre la commande groupée de vaccins à l’échelle du continent. Sans cela, les pays les plus puissants comme la France ou l’Allemagne auraient sans doute trusté les premières doses de sérum... avec le risque de provoquer une -vraie- pénurie pour les plus petits États européens.

    À voir également sur Le HuffPost: Castex estime que la France peut encore ”éviter le confinement”

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      Le vaccin AstraZeneca sera distribué aux professionnels de santé

      AFP · news.movim.eu / HuffingtonPost · Thursday, 4 February, 2021 - 17:59 · 2 minutes

    VACCINATION - Le gouvernement veut aller plus vite sur la vaccination contre le Covid-19. Lors de son allocution ce jeudi 4 février , le Premier ministre Jean Castex a annoncé que 1,7 million de rendez-vous supplémentaires seraient proposés “ces prochains jours” pour la première injection.

    Pour ce faire, l’exécutif compte notamment sur le vaccin du laboratoire britannique AstraZeneca, validé par l’UE le 29 janvier dernier .

    Le vaccin AstraZeneca “va nous permettre d’accélérer le rythme de vaccination, a assuré Jean Castex. Grâce à ce nouveau vaccin, nous pourrons atteindre l’objectif de quatre millions de personnes ayant reçu leur première injection d’ici la fin du mois de février.”

    Ce vaccin a notamment l’avantage de pouvoir être stocké à long terme dans des frigos classiques, contrairement aux deux autres déjà disponibles, ceux de Pfizer/BioNTech et Moderna , qui doivent l’être à très basse température (-70°C pour le premier et -20°C pour le second).

    “Protéger les professionnels de santé”

    Dans le détail, le Premier ministre a annoncé que “la première livraison de vaccins Astrazeneca, dès la fin de cette semaine, sera affectée aux établissements de santé, pour protéger les professionnels de santé, hospitaliers et de ville, qui se battent en première ligne contre le virus et leur vaccination pourra commencer dès ce samedi”.

    Dans une interview à TF1 mardi 2 février, Emmanuel Macron a affirmé que ce vaccin serait réservé aux moins de 65 ans en France, comme l’a recommandé la Haute autorité de Santé française , et pourrait être administré par les pharmaciens et les sages-femmes.

    Sur les 1,7 million de rendez-vous supplémentaires annoncés, 500.000 seront ouverts à partir de vendredi pour être réalisés fin février, puis 1,2 million “dès le milieu de la semaine prochaine” pour le mois de mars. Ils seront suivis encore “d’au moins 500.000 rendez-vous supplémentaires sur le mois de mars que nous ouvrirons progressivement d’ici là”, a précisé le chef du gouvernement.

    Le ministère de la Santé n’a pu être joint par l’AFP pour préciser si les 500.000 rendez-vous devant ouvrir vendredi étaient les mêmes que ceux dont il avait décalé la semaine dernière l’ouverture, ou de nouveaux créneaux.

    A voir également sur Le HuffPost: Covid: des vaccins à 90% efficaces, ce que ça veut dire...et surtout pas dire

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      Pas de reconfinement : Jean Castex explique les décisions du gouvernement ce 4 février

      Marie Turcan · news.movim.eu / Numerama · Thursday, 4 February, 2021 - 17:41

    Le Premier ministre Jean Castex a globalement répété, ce 4 février 2021, les mesures qu'il avait déjà annoncées vendredi dernier. Avec quelques précisions sur les raisons (économiques et sociales) qui poussent le gouvernement à ne pas reconfiner. [Lire la suite]

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